« Quiconque tient l'histoire d'un peuple tient son âme, mais quiconque tient la spiritualité d'un peuple le contraint à vivre sous le joug d'une servitude éternelle. »

Cheikh Anta DIOP
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Côte d’Ivoire / Election Présidentielle : Le 31 octobre, une utopie : Voici pourquoi !

La 7ème rencontre du Cadre Permanent de Concertation (CPC) qui s’est tenue récemment à Ouaga n’est rien d’autre qu’une farce où l’on s’efforce à cacher le soleil avec la main. Simplement, toute une mystification de grand rassemblement pour pondre un communiqué laconique dont les résolutions sont lettre morte d’avance. Au total, 1O chantiers se dressent encore sur la route du scrutin présidentiel. Qui doivent être entièrement exécutés dans moins de 37 jours. Quelle prouesse ? Si ce n’est par miracle, ce serait utopique de croire que ces questions aussi délicates vont être réglées aussi facilement.

Le CPC ayant pris connaissance du rapport sur l’évaluation globale de la mise en oeuvre de l’accord politique de Ouagadougou, a exigé que soit respecté, dans le délai prescrit, le chronogramme des étapes clés du processus électoral. A voir de près la complexité du travail, ce serait un leurre de penser réaliser ce chronogramme à temps. D’abord parlons de la publication de la cartographie électorale et l’affichage de la liste électorale définitive. Le problème n’est pas aussi simple qu’on le pense. Si les endroits susceptibles d’affichage sont déjà identifiés par la CEI, il se pose avec acuité la question de sécurisation de ces endroits. Surtout que les recalés qui ruminent de colère ne se laisseront pas faire et donneront du fil à retorde pour exprimer leur mécontentement. D’où la mise en œuvre d’un arsenal de sécurité autour des lieux d’affichage. Cette liste n’est aucunement une liste ordinaire de candidats admis à un simple concours. Mais il s’agit d’une liste définitive électorale qui suscite beaucoup d’émotions et de passions. En ce qui concerne la production des cartes d’électeurs et des documents électoraux, c’est le nœud gordien du rendez-vous du 31 Octobre prochain. C’est l’importante étape où tout se joue. Tellement la question est délicate. L’imprimerie nationale s’étant déclarée incompétente en la matière, selon une source officielle, c’est la SAGEM chargée de produire à la fois les cartes d’électeurs et les cartes nationales d’identités aux options technologiques exigées. Tenez-vous en. Cette confection se fera en Allemagne. Et ce n’est pas la porte d’à côté. De l’avis d’un spécialiste, il faut à cet opérateur, un délai d’au moins un mois pour la production de ces cartes. Sans oublier leur distribution qui peut s’étendre sur plus de deux semaines. Vérité Implacable! L’autre point crucial est le recrutement et la formation des agents électoraux. Avant même la formation de ces agents, il faut d’abord former les formateurs. D’où la formation des formateurs, un chapitre que la CEI feint d’ignorer. Parce qu’un agent électoral mal formé est dangereux non seulement pour lui-même, pour un électeur qui se présente à lui, et pour tout le processus qui risque d’être bâclé par la faute d’un seul individu. Le témoignage d’un ancien formateur d’agent électoral est révélateur. «Il faut prévoir deux semaines au moins pour le recrutement et deux autres semaines pour la formation. Ce qui fera au total un mois au moins.» a-t-il indiqué. Le dernier verrou, c’est la sécurisation des élections. Qui va sécuriser les élections ? C’est vrai, la réponse a été donnée par le CPC. Les éléments du Centre de commandement intégré (CCI) et les éléments de l’ONUCI assureront la sécurité des élections. Vraiment facile de le dire sur du papier. Mais on semble ignorer la grosse difficulté qui réside dans la pratique. Est-ce à dire que les forces régulières et les forces ex-rebelles dans leurs zones respectives resteront bras croisés sans rien faire? Est-ce le nombre des éléments du CCI et des éléments de l’ONUCI suffira pour s’occuper de la sécurisation des élections sur toute l’étendue du territoire national ? Autant de questions qui restent sans réponse, malheureusement. S’agissant de la sensibilisation et de l’éducation civique de la population, elles ne doivent pas se faire de façon lapidaire. Il faut prendre du temps pour apaiser les esprits déjà surchauffés. Si par extraordinaire tous les points du chronogramme sont exécutés concomitamment, ce n’est même pas certain que les 37 jours suffisent. Au regard de tout ce qui précède il serait bon de renoncer à l’idée folle qu’on peut faire en un mois ce qu’on n’a pas pu faire en huit ans.

Le miracle est-il encore possible ?

Si l’on se plait à dire que Dieu est Ivoirien, mais l’Ivoirien n’est pas Dieu. Qu’on le sache par conséquent, le miracle qui vient de Dieu ne saurait provenir de l’homme qui n’est nullement l’égal de son créateur. Pour le cas d’espèce, les quatre leaders s’obstinent à maintenir la date du 31 octobre sachant très bien que les chantiers à réaliser sont encore nombreux sur la route des élections. Cet empressement d’aller vite, très vite même, après avoir perdu inutilement 8 bonnes années, traduit bien l’idée de certains leaders politiques de ne pas être perçus comme ceux-là même qui ne veulent pas des élections. Pour d’autres, ils ont peur d’être vus comme des activistes qui mettent de l’huile sur le feu. Voici ce qui sous-entend leur crainte de ne pas approuver la date du 31 octobre. Pour ne pas qu’ils soient tenus pour responsables d’un éventuel chaos, c’est qui explique ce jeu de cache-cache. Une danse de sorciers qui ne dit pas son nom. Où seuls les initiés savent d’avancent ce qui se préparent dans les bois sacrés. Quand au peuple, il ne subit que les conséquences des stratégies paranoïaques des politiciens à bout de souffle et qui le conduisent inéluctablement dans le mur. Cette fois-ci la démagogie politicienne ne peut pas occulter les raisons d’un énième report. Car on peut mentir sur tout. Mais on ne peut pas mentir sur le temps. Car le temps, lui, n’est à la merci de personne. Ni de l’argent, ni d’une pression, ni aucune autre force ne peut avoir raison du temps. C’est le temps qui a toujours raison de tous ceux qui rusent avec lui. Il est donc temps d’en finir avec la roublardise politique et de se rendre à l’évidence. Mais le vrai problème c’est que le CPC est devenu une foire entre les 4 grands de la scène politique ivoirienne et le beau-frère Blaise Compaoré où le partage des richesses du pays sont discutées en sourdine au mépris de la misère du vrai peuple. Cela se comprend aisément lorsqu’on compare cette situation à celle d’un gros malade qui quitte chez lui et une fois devant le médecin ne demande que la prescription des vitamines pour grossir au lieu de chercher à soigner le mal qui le ronge. C’est sûr que ce malade là, trainera toujours son mal qui finira par l’emporter. Car dit-on, Il n’est de pires maladies que celles qui ne se diagnostiquent pas. Et c’est ce qui se passe malheureusement dans notre pays. Notre opposition dont les deux grands leaders brandissent la misère des populations, mais une fois en conclave ne parlent que de leurs avantages avec pour priorité les postes ministériels. Il en est de même pour le Chef d’Etat affaibli par la crise qui ne cherche qu’à pérenniser son pouvoir dans les compromissions et attendre que la tempête cesse « miraculeusement ». Ces leaders ont pris gout des arrangements politiques et le pays est bloqué à cause de ces compromis. Dans le contexte actuel, on ne peut pas parier sur ce délai très court surtout avec un éventail de problèmes à résoudre. Ce n’est pas le charisme exceptionnel du facilitateur Blaise Compaoré qui peut faire, à lui seul, plier l’échine à ses leaders aux intentions parfois trompeuses. Même si Laurent Gbagbo est plus optimiste pour le 31 octobre qu’à aucun moment de cette crise, on court inévitablement vers un report. Surtout que lui-même l’a affirmé au sortir du 7ème CPC, qu’il s’agira d’un énième report technique et non politique

Patrice Pohé

Encadré

La présidentielle décalée en Novembre / Les vraies raisons

Il n’y a aucun doute. Le premier tour de l’élection présidentielle n’aura plus lieu le 31 octobre prochain comme annoncée tambours battants. C’est plus raisonnable et plus responsable. C’est du moins l’information qui nous est parvenue. D’une source très crédible. Selon cette source, on tente de s’accorder sur l’essentiel au plus haut sommet de l’Etat pour rendre l’information officielle. On parle de «léger report» de 2 semaines ou d’un mois au plus. Et l’annonce officielle se fera probablement avant le 14 octobre prochain, soutient la même source. A l’origine de ce décalage, on avance multiples arguments. Certaines raisons concernent les étapes du chronogramme tandis que d’autres sont qualifiées de «raisons personnelles» aux candidats. Ce n’est un secret pour personne. Les raisons des reports, ont été toujours identiques. Sauf qu’on évoque ici un décalage de date ou de délai «supplémentaire» pour régler définitivement et proprement ce qui pourrait retarder le processus. Il s’agit notamment des problèmes clés de la confection et de la distribution des cartes nationales d’identité et d’électeurs, du recrutement et de la formation des agents électoraux, du redéploiement des éléments du Centre de Commandement Intégré (CCI) et de l’ONUCI, du transport et de la répartition du matériel électoral et enfin de la campagne de sensibilisation de la population. A part ces aspects officiels du processus électoral, les candidats eux-mêmes ne sont pas véritablement prêts. Pour preuve, aucun candidat n’a entamé le recrutement de ses scrutateurs encore moins leur formation. A côté avec le problème des scrutateurs, il y a la formation et la sensibilisation de leurs militants à maitriser le vote du bulletin unique, de l’impression des tee-shirts et pagnes de campagne, de la confection des banderoles, affiches, pancartes, panneaux, des gadgets à l’effigie des candidats, de la distribution des moyens logistiques de campagne aux staffs locaux de campagne et bien d’autres stratégies à déployer. Il y a aussi le fait que bon nombre de candidats n’ont pas véritablement mis le ‘’paquet‘’ dans la précampagne. Ceux-ci espèrent en ce décalage pour se rattraper. Dans tous le cas de figure, le 31 octobre n’est plus la vraie destination pour le premier tour de l’élection présidentielle. A en croire certaines indiscrétions, les leaders de l’opposition soutiendraient «discrètement» ce report. La même source ajoute que le Chef d’Etat n’y voit pas d’inconvénient dans la mesure où tous les problèmes politiques ont été réglés et ce report serait utile et nécessaire pour régler les questions purement techniques.

Patrice Pohé

Avec le partenariat de l’Intelligent d’Abidjan

Fri, 24 Sep 2010 09:53:00 +0200

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La Dépêche d'Abidjan

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