« REFLETS D’ESPÉRANCE » BIENTÔT EN LIBRAIRIE

AVOIR LE SENS DE L’HISTOIRE

Côte d’Ivoire. Nous sommes à un tournant de la vie de la nation. L’approche à pas de géant des élections générales dans notre pays en 2015, provoque de grands débats vifs et même des tensions entre les citoyens et particulièrement entre ceux qui, majoritairement, se reconnaissent en la personne de Laurent Gbagbo qu’ils considèrent comme le seul vrai président élu de la Côte d’Ivoire aux termes du deuxième tour des élections présidentielles de décembre 2010. La chute, puis la déportation de ce dernier depuis novembre 2011 à La Haye, ont suscité deux camps farouchement opposés :
– les pessimistes qui ne pensent plus à son retour au bercail, du moins pas avant les élections prochaines. Ils se croient, dès lors, avisés de rechercher des voies de reconquête du pouvoir avec le Front populaire ivoirien (Fpi) uni autour de son président, le Premier ministre Pascal Affi Nguessan. Ils se sont laissé convaincre par les circonstances que ce dernier est le meilleur cheval à l’heure actuelle à pouvoir remporter les compétitions électorales présidentielles prochaines au regard des difficultés de gouvernance d’Alassane Ouattara, le président imposé aux Ivoiriens par la communauté internationale. Pour ceux-là, la stratégie trouvée est la recherche de compromis en participant à toutes les discussions avec les tenants actuels du pouvoir, au besoin, les escorter sans crainte de se compromettre en siégeant au gouvernement, afin de normaliser le pays, faire tomber les tensions pour espérer voir la libération des 800 prisonniers civils et militaires détenus dans les goulags du Rassemblement des Républicains (Rdr), le dégel des avoirs de ceux qui ont travaillé dans l’administration sous Gbagbo, le retour sécurisé, dit-on, des exilés politiques et autres réfugiés ivoiriens dans la sous-région, la libération des maisons assiégées par les forces d’occupation proches de Ouattara, etc. Pour ces derniers, c’est seulement après la reconquête du pouvoir d’Etat, qu’il sera plus aisé d’exiger la libération du président Laurent Gbagbo. Le Premier ministre Pascal Affi Nguessan qui s’inscrit dans cette voie et l’inspire, l’a soutenue en plusieurs occasions dans ses sorties médiatisées. Au lendemain de sa sortie de la prison de Bouna, il a donné l’impression de revendiquer la libération de celui qui est le fondateur du parti dont il est l’actuel chef, mais c’était juste pour mobiliser les citoyens ivoiriens autour de sa personne. Très vite, il s’est révélé comme un leader peut enclin à s’échiner à organiser des manifestations de masse en faveur du président Gbagbo. Au fil des jours, il ne cachera plus son aversion à voir ce dernier libre, et, dans une hiérarchie des priorités des actions du Front populaire ivoirien (Fpi), il a clairement indiqué que la libération du président Gbagbo devrait être subordonnée à la reconquête du pouvoir d’État. D’où sa disposition à participer aux rencontres pour l’amélioration des conditions consensuelles pour des élections libres, transparentes et démocratiques.
– les optimistes qui estiment eux, que discuter même des conditions de participation aux élections et y participer, est une manœuvre à la fois pour accompagner et reconnaître le pouvoir illégitime imposé aux Ivoiriens à coups de bombes par la coalition franco-onusienne et pour tourner la page de Laurent Gbagbo. Pour ces derniers, c’est admettre que Laurent Gbagbo n’a pas gagné les élections et avouer l’incapacité du parti, son parti, le Fpi à se battre pour lui. Une telle posture, selon eux, est non seulement abjecte mais elle fait ressortir au grand jour les actions souterraines ignobles de personnalités proches de Gbagbo qui ont pactisé avec les bourreaux des Ivoiriens et leurs mandants étrangers prêts à prendre la place de Laurent Gbagbo qu’ils ne souhaitent plus voir revenir au pays ; d’où leur refus catégorique de mener des actions de masse dans les rues pour exiger sa libération. Mais pour cette faction d’optimistes dans laquelle je m’inscris, le président Gbagbo est retenu dans les mailles d’un piège international. En témoigne l’action judiciaire intentée contre lui qui se révèle au fil des jugements aux yeux de tous, même des non initiés, comme un montage politico-juridique grossier juste pour nuire à un homme vu par les impérialistes occidentaux et les néo-colonialistes comme un insoumis, un souverainiste et un nationaliste qui travaille contre leurs intérêts. En conséquence, le risque est grand de voir ce leader africain bouleverser les cadres habituels de l’Histoire, en retournant libre chez lui dans son pays. Pour les tenants de la thèse pro-libération donc, il n’est pas question d’aller aux élections ni à un rendez-vous de réconciliation tant que le président Laurent Gbagbo restera déporté et maintenu dans les liens de la détention. Ils estiment que, une fois libre, c’est lui qui portera l’étendard du Fpi lors de consultations électorales dans un nouveau contexte apaisé.
Ces deux positions se sont cristallisées lorsque le président actuel du Fpi, sans aucune courtoisie et sans informer préalablement ses camarades, a décidé et rendu public délibérément et unilatéralement à travers la presse, un nouveau Secrétariat général profondément modifié au nombre pléthorique qualifié de « gouvernement Affi » (?!) par Notre Voie, le journal proche du parti. En filigrane, ce changement de la nomenclature de l’instance d’exécution du parti, affiche la volonté manifeste du président Affi de se donner les moyens mécaniques pour dominer les débats au niveau des organes de décision qui l’ont souvent mis en minorité. Les réactions ne se sont pas fait attendre .
Au-delà de cette guéguerre entre désormais pro-Gbagbo et pro-Affi à l’intérieur du parti, cette situation provoquée et entretenue par l’environnement de crise que connait la Côte d’Ivoire depuis le 11 avril 2011, ressemble étrangement à celle vécue par les Athéniens de la dernière décade du V ème siècle avant Jésus-Christ. Au cours de cette période en effet, Athènes, la cité de Périclès, qui a inventé la démocratie est en conflit avec celle de Lycurgue le tyran de Spartes dont le pouvoir s’appuyait sur les oligarques. Les conséquences de ce conflit qui menaçait l’avenir de la démocratie, avaient provoqué une situation délétère entre les citoyens athéniens dont nombreux étaient apeurés par la domination spartiate. Dans cet environnement, les successeurs de Périclès qui se montrèrent indignes notamment Cléophon, Pisandre et surtout Hyperbolos, cherchèrent à tirer avantage du désarroi général provoqué par une politique intérieure qui se présentera comme une « succession d’intrigues et de déloyautés, chacun changeant de parti selon les circonstances et se livrant à la démagogie » . Aujourd’hui en Côte d’Ivoire, comme hier à Athènes, l’environnement politique et social s’est dégradé, tout le monde est corrompu, du moins les premiers acteurs proches du président Gbagbo, chacun cherchant à triompher pour son compte personnel sans se soucier du salut de la nation et de la restauration de l’Etat qui passe par la libération du président Gbagbo. Il y a dans le pays, une sorte d’anarchie qui compromet la cohésion nationale ainsi que la moralité de l’homme en même temps que paradoxalement on recherche la paix et la réconciliation nationale pour ne pas dire l’harmonie entre les citoyens.
Dans ces conditions, quel sens donner au devenir de notre pays ? Peut-on espérer un meilleur lendemain après avoir transcendé les désespoirs actuels ? Ma réponse est oui !
Face à la démission des acteurs politiques préoccupés par leur âpreté au gain qui prostituent l’Etat et les institutions par leur accointance avec les forces qui se sont imposées au pays, face à la démagogie de chefs de l’opposition en panne de stratégie pour engager la bataille de la libération du pays, des soldats couards et avides de prébendes qui ont perdu tout repère et tout courage pour modifier l’actualité, je crois moi, au peuple souverain dont l’action organisée peut renverser l’ordre présent. Cependant, pour y parvenir, il faut engager toute la nation autour d’un vrai leader qui fait corps avec le peuple et qui comprend le sens de l’histoire. Or, que remarquons-nous ?
Ceux qui veulent se positionner aujourd’hui comme des leaders de notre peuple sont fortement marqués par leur aliénation aux Blancs dans un contexte qui milite fortement à rompre avec ces derniers. On assiste à la dégénérescence des consciences cinquante ans après les indépendances. Face aux Blancs, des leaders actuels sont contemplatifs et admiratifs ; pour eux, pour avoir leur soutien à être poussés à la magistrature suprême de nos Etats, ils sont disposés à mettre entre parenthèse nos indépendances et à étouffer nos souverainetés. Combien de fois n’ai-je pas entendu cette interrogation de certains de nos leaders : « Les Blancs-là même, ils disent quoi ? » Pour avoir la réponse, ils ne rechignent pas à aller sillonner dans les couloirs des ambassades et à solliciter les avis de diplomates sur leurs visions des choses. On comprend donc, comme le dirait Frantz Fanon, que la lutte pour la désaliénation n’est pas achevée malgré les indépendances. Plus que jamais, dans un nouvel ordre mondial marqué par le retour à pas de géant du colonialisme et de l’oppression impérialiste du monde occidental, les Africains doivent se regrouper et ensemble se battre non pas seulement pour une nouvelle affirmation identitaire et raciale face au Blanc mais davantage pour transformer l’actuel et agir sur l’actualité, surtout sur l’actualité économique avec son penchant à produire un système de domination. Refuser de nous enfermer dans le système colonial qui se reconstruit est un impératif urgent pour libérer l’Afrique à l’horizon 2050. Dans cette vision, le président Gbagbo en collaboration avec le journaliste François Mattei montre la voie dans son récent ouvrage dans lequel il dénonce avec courage, bien qu’encore détenu à La Haye, les systèmes mafieux de la Françafrique et invite à s’opposer au diktat de l’Elysée sur les chefs d’Etat africains. Aussi, sont-ils nombreux, les Africains qui, sachant que nos Etats ne sont libres qu’en apparence, – on parle d’indépendance fantoche ou de pseudo-indépendance- partagent son opinion et donc se mobilisent pour lui. Mais en Côte d’Ivoire, dans son propre camp, les nouveaux leaders trouvent insensées ces mobilisations et continuent de dérouler le tapis rouge au chef d’Etat français. Comme a raison, pour une fois, Dominique de Villepin lorsqu’il soutient dans son ouvrage de campagne en 2002, qu’il n’y a « pas de héros sans félon, pas de courage patriotique sans un cortège de lâchetés individuelles et de misères morales »
Toutes les attitudes des acteurs politiques actuels sont révélatrices de deux catégories d’individus : ceux qui tête baissée comme des moutons broutent les herbes qui sont à leur portée sans tenir compte de l’environnement ; et ceux qui marchent, la tête haute, qui regardent de temps en temps le ciel pour suivre le mouvement des astres afin de détecter par avance les intempéries. Alors que les premiers ne pensent qu’à leur bonheur immédiat, à leur jouissance primaire et instinctive en s’accaparant par tout moyen le pouvoir même si cela doit coûter la vie de leurs proches, les seconds, prudents, recherchent avant toute action, ce qui favorise la cohésion et le progrès de tous et de chacun. Tous les hommes sont égaux, cela est vrai, mais ceux qui ont le sens de l’Histoire sont supérieurs à ceux qui sont attachés à la pitance et à la jouissance des plaisirs, ces choses temporelles qui empêchent l’âme de s’élever et de voyager dans l’admirable jardin de l’étique, de la gratitude et du devoir envers la patrie.
Ce recueil de poèmes, comme le premier , dénonce les félons et tous ceux qui nient leur identité et humilient leurs pays ainsi que l’Afrique entière. Tout en faisant corps avec l’humanité souffrante des Ivoiriens, tout en cheminant avec eux pour les soutenir et les exhorter à rester debout face à l’adversité quotidienne, il interpelle les consciences et leur montre la nécessité de se mobiliser pour revendiquer la libération du président Laurent Gbagbo, le nouveau vrai leader africain. Il invite à se remettre en marche car l’espérance d’une Afrique libre est permise, espérance dont les reflets perceptibles jaillissent de partout sur tout le continent noir. L’ambition donc de ce nouveau recueil de poèmes est de rassurer, aussi bien les Africains, mes compatriotes ivoiriens que les militants du Front populaire ivoirien, de la justesse de notre combat. Ceux qui soutiennent le président Laurent Gbagbo, ont raison de le faire. Ce sont eux qui sont dans la vérité car, à l’heure actuelle, seul lui, dans toute l’Afrique, incarne le sens de l’histoire, l’histoire de la lutte de la libération néocoloniale.

Lazare KOFFI KOFFI
Exilé politique
(Extrait de l’Avant-propos de mon recueil de poèmes Reflets d’espérance à paraitre bientôt chez L’Harmattan)

Fri, 08 Aug 2014 16:21:00 +0200

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