Ivoiriennes, Ivoiriens, chers Amis !
Un signal fort vient de nous être lancé à tous, lorsque nous prenons connaissance de la décision des autorités du Royaume du Maroc et de la République de Côte d’Ivoire de réinstaurer un visa pour les détenteurs d’un passeport ivoirien se rendant au Maroc.
Bien sûr, le communiqué rassure tout le monde, et multiplie toutes les parenthèses, pour que tout le monde comprenne bien, qu’à aucun moment, les deux pays, dont la fraternité et l’alliance se fondent dans la relation politique et personnelle privilégiée qui a uni Félix Houphouet Boigny, côté ivoirien, et le Roi Mohammed V, côté chérifien, ne sont nullement en froid.
Quelle idée ! Alors que pour l’Afrique et le monde entier, la Côte d’Ivoire vient de remporter sa troisième Coupe d’Afrique des Nations en quasi pool avec le Maroc, et que la finale fut célébrée avec autant de jubilation à Casablanca qu’à Abidjan !
On a éteint tout débat ou questionnement, dès la source, en précisant que cette mesure ne s’applique pas aux sujets marocains arrivant en Côte d’Ivoire, et que du côté ivoirien, c’est seulement le citoyen du commun, porteur de passeport ordinaire vert, qui devait être contrôlé.
Les << en haut de en haut >> ne sauraient être soumis à cette petite avanie, et les Ivoiriens porteurs de passeports diplomatiques ou de service ne noteront aucun changement aux guichets des polices de frontière marocains.
C’est en quelque sorte l’aboutissement du coup d’éclat, survenu début octobre 2023, lorsque l’agence européenne Frontex annonça que l’arrivée massive de migrants ou exilés sur l’île italienne de Lampedusa avait révélé la présence de plus de 14.000 Ivoiriens dans le lot !
Nonobstant le grand art des rédactions des communiqués par des diplomates des deux pays, nous, Ivoiriens, devont principalement retenir que le Royaume du Maroc a finalement décidé de se soumettre à toutes les procédures imposées par l’Union Européenne, entité qu’il ambitionne d’intégrer depuis près de trois décennies, en y mettant tous les moyens, et même à marche forcée, pour accompagner les investissements financiers colossaux qu’à nécessité Tanger Med Port, l’entrée sud du continent Ouest Européen !
Oui, désormais la filière d’émigration clandestine en provenance d’Afrique Sud saharienne vers l’Europe doit être cassée.
Le Maroc ne peut absolument plus se permettre d’être désigné à Bruxelles ou à Strasbourg, comme l’une des principales voies d’aboutissement des trafics honteux qui vivent sur la mouvance de la chair des miséreux d’Afrique Noire.
Le grand mouvement migratoire et même invasif, de populations du sud condamnées à la misère et au mal vivre, vers un nord qui baigne dans la relative aisance de vie que lui assure des siècles de domination hégémonique sur les autres continents, ne s’arrêtera sûrement pas de manière ; et, à la vérité, pourquoi attendre qu’il ralentisse puisque les migrants clandestins qui arrivent à prendre pied en Europe constituent une source de main d’œuvre indispensable à l’économie des sociétés du Nord ?
Mais c’est là un feuilleton à épisodes variés, et espérer en voir la fin prochaine serait une gageure, puisqu’il est établi que presque la totalité des acteurs de cette pantomime évoluent sous des déguisements ou masques à multiples facettes.
Mais, pour nous, Ivoiriennes et Ivoiriens, en nous en tenant au communiqué de notre Ministère aux Affaires Extérieures, nous apprenons que, pour notre gouvernement, également à la base de cette initiative, l’objectif était d’assécher une importante et très lucrative filière clandestine d’acheminement de centaines ou milliers de ressortissants d’Afrique Noire vers les portes d’entrée d’Europe du Sud par le transit via les pays du Maghreb, et en particulier le Maroc.
Mais est ce un événement, en Côte d’Ivoire ? Qui ne sait pas qu’en donnant de l’argent, le premier venu, de quelque origine qu’il soit, peut se trouver en possession de documents officiels attestant qu’il est citoyen ivoirien ? Attestation d’acte de naissance, certificat de nationalité, carte nationale d’identité, passeport, qu’est ce qu’on n’obtient pas lorsque l’on est prêt à y mettre le prix ?
Il y a longtemps que la Côte d’Ivoire est grosse de ce problème, et c’est presque un tabou au niveau national, puisque les vagues de production massive de faux vrais documents ont chevauché sur des échéances électorales, pour lesquelles les différentes forces politiques, et en premier lieu celle au pouvoir, y ont vu un super raccourci pour obtenir une marée de délivrance de cartes d’électeurs à leurs partisans, leur vote étant conquis à l’avance ?
Et au moment où une grande campagne nationale de mise à jour des listes électorales pour les échéances de 2025 s’ouvre, faut-il continuer, tous, de faire comme si l’on ne savait pas ?
Le Ministère de l’Intérieur a pu prouver aux autorités européennes que des milliers d’Africains arrivant à Lampedusa n’étaient pas d’authentiques citoyens de notre pays, cela nous rassure et nous réjouit tous.
De nombreux partis politiques et organisations de la société civile ont déclaré avoir travaillé sur le sujet, et c’est sur des millions de cas que les contrôles devraient porter.
Quelle est la proportion d’ << authentiques >> non Ivoiriens qui figurent sur notre registre général de la population, et, partant, sur notre liste électorale ?
Réclamer l’audit du registre général de la population, qui est la colonne vertébrale de tout état, doit-il être associé ou assimilé à de la xénophobie, à une volonté d’apartheid ou de discrimination au sein de nos villes et villages ?
C’est plus tard, dans de longues années ou décennies, lorsque ce véritable poison pour notre pays et notre état aura tout gangrené, que l’ampleur de nous sautera aux yeux.
Oui, continuer en l’état ne nous permettra jamais de constituer et construire un jour une nation véritable. Parce que le grand pôle unificateur, qui modèlera nos différentes souches ethniques en un moule identitaire spécifique et bien à nous, n’existera pas, même pas de mémoire !
Il n’y aura pas de modèle identitaire national auquel tous, en intérieur comme arrivants, chercheront à se reconnaître !
Que l’on ne perde pas de vue que l’histoire récente de son peuplement a fait de la Côte d’Ivoire une destination privilégiée de migrations dans le grand espace ouest africain.
Aujourd’hui, un peu partout sur le globe, les pays qui ont connu ce genre de phénomène, quelques fois sur des décennies ou des siècles, se trouvent confrontés à des situations d’impact post migratoire assez difficiles à gérer ; et c’est au moment où l’on pensait que le mixage et l’expérience de cohabitation de proximité, sans problèmes majeurs liés aux origines culturelles ou ethniques, et qui devaient assurer des sociétés à l’intégration parfaite et réussie que tous les acquis semblent remis en cause.
L’Europe de l’Ouest les vit dans tous ses pays, en France, en Grande Bretagne, et même en cette Scandinavie, qui était longtemps la destination de salut de tous ceux au monde qu’un contexte hostile forçait à l’immigration.
Voici, de notre modeste avis, l’un des sujets, d’importance nationale, pour lesquels un nouveau round d’échanges entre toutes les forces vives du pays, tel que sollicité par toute l’opposition politique, est légitimement fondé.
Puisse cela être entendu de tous !
Que la Côte d’Ivoire soit bénie !
Abidjan, le 21 août 2024
MINISTRE KOBENA I ANAKY
PRÉSIDENT DU MFA
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