Les conflits de l’Occident, de la Russie ou du Moyen-Orient sont systématiquement présentés comme des enjeux mondiaux. L’Afrique y est associée, ou s’y associe, bien qu’elle ne soit pas directement concernée.
Une mondialisation à sens unique
L’Afrique est souvent convoquée comme un acteur de la « communauté internationale », mais seulement lorsque cela sert les intérêts des puissances dominantes qui réclament ses voix à l’ONU. Pendant ce temps, ces mêmes puissances occupent son territoire avec leurs bases militaires et exploitent sans vergogne ses ressources naturelles.
On impose l’idée que les priorités de l’Afrique doivent se calquer sur celles de l’Occident, alors que le continent fait face à ses propres urgences, parmi lesquelles l’insécurité, le changement climatique, l’instabilité politique, la dette, la souveraineté économique et la décolonisation des esprits. Cette vision « mondialisée » qui lui est dictée relègue systématiquement ses luttes au second plan.
Une solidarité religieuse qui détourne des luttes locales
Il faut également noter que certains Africains prennent position dans des conflits géopolitiques qui les dépassent, comme celui opposant Israéliens et Palestiniens, généralement en fonction de leur appartenance religieuse, chrétienne ou musulmane. Ils s’alignent sur des causes extérieures, sans tenir compte du manque de solidarité face aux drames qui secouent l’Afrique. Ce déséquilibre contribue à minimiser, une fois de plus, l’importance des luttes du continent.
Les « guerres mondiales » ? Parlons-en.
La « Première Guerre mondiale » et la « Seconde Guerre mondiale » sont deux conflits déclenchés par des Européens, sur le sol européen, pour des intérêts purement européens. Et pourtant, on les qualifie de « guerres mondiales ». Pourquoi ? Parce que ce qui touche l’Occident devient aussitôt un problème planétaire. Parce que l’Europe coloniale a imposé ses guerres au reste du monde.
L’Afrique a été utilisée comme réservoir de chair à canon. Des soldats africains ont été enrôlés de force pour aller mourir dans des conflits qui ne les regardaient pas. Ses ressources ont été pillées pour financer les efforts de guerre européens.
Ce que l’Histoire officielle préfère taire, c’est que ces guerres se sont aussi livrées sur le sol africain. Des armées européennes, coloniales, fascistes et alliées se sont affrontées dans des campagnes entières menées loin des regards occidentaux. Dans les savanes de l’Est, les forêts d’Afrique centrale, sur les côtes du Nord, le continent est devenu un champ de bataille. Tout cela sans consulter, sans prévenir, sans épargner les peuples qui y vivaient.
Une indépendance de pensée à conquérir
Aujourd’hui, les pays africains sont officiellement indépendants. Pourtant, les réflexes coloniaux persistent encore dans la diplomatie internationale. Les États africains sont toujours traités comme des satellites politiques.
En 2022, lorsque des pays africains ont refusé de condamner la Russie à l’ONU, l’Occident a crié au scandale.
Mais pourquoi devraient-ils se précipiter pour condamner la Russie, défendre Israël ou la Palestine, alors que le monde reste largement silencieux face aux conflits internes au Sahel, en RDC ou au Soudan ?
Ce deux poids, deux mesures révèle que l’Afrique n’est pas libre de choisir ses batailles, du moins pas aux yeux de ceux qui dominent la scène mondiale.
Les Noirs sont sans cesse sommés de compatir, de participer, de soutenir…
Les effets de la colonisation et de l’histoire pèsent encore lourdement. Le problème central, c’est que le monde est dominé par un groupe puissant qui impose sa vision.
Certaines puissances, certains peuples, se sont arrogé le droit de parler au nom de l’humanité tout entière. Leur civilisation est présentée comme la norme, leur histoire devient l’Histoire. Leurs drames sont érigés en drames universels. Et ce qui les touche devrait, par extension, concerner aussi les peuples qu’ils ont autrefois colonisés, dominés, humiliés.
L’Afrique n’est pas considérée comme un acteur à part entière, mais comme un simple soutien. Les Noirs sont constamment sommés de compatir, de participer ou de soutenir, sans qu’on demande leur avis. De plus, l’aliénation d’une partie des Africains les pousse à soutenir des causes étrangères, tout en ignorant les difficultés de leur propre continent.
Axel Illary