« Quiconque tient l'histoire d'un peuple tient son âme, mais quiconque tient la spiritualité d'un peuple le contraint à vivre sous le joug d'une servitude éternelle. »

Cheikh Anta DIOP
Categories: Économie

Contrat désendettement-développement : Les vérités de la France à Ouattara

Dans le cadre du point d’achèvement de l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés, la France a annulé 3,76 milliards d’euros, soit 2462,8 milliards FCFA, au titre de la dette extérieure ivoirienne. C’est une promesse de la France sarkozienne faite au régime Ouattara lors de la visite, le 15 juillet 2011 en Côte d’Ivoire, du Premier ministre François Fillon. Pour ce représentant français, c’est la contribution française la plus significative depuis des décennies. Euphorie du régime Ouattara. Mais joie vite douchée par une conditionnalité « iconoclaste » : l’annulation de cette dette se fera dans le cadre du Contrat désendettement-développement (C2D). Aïe !
La raison est que le C2D est un mécanisme de refinancement par don des échéances du service de la dette des pays pauvres très endettés. Concrètement, la Côte d’Ivoire va continuer d’honorer sa dette extérieure. Mais aussitôt le remboursement constaté à due date, le Trésor français reverse la somme correspondante dans un compte spécifique ouvert à la Bceao sous forme de don pour qu’elle soit affectée à des programmes de lutte contre la pauvreté sélectionnés d’un commun accord avec le gouvernement ivoirien.
Là où tous les observateurs de la vie économico-politique ivoirienne s’inquiètent pour le régime Ouattara, c’est que la gestion du processus d’allocation des ressources est faite par un comité de pilotage C2D et un comité d’orientation et de suivi, tous deux basés à Paris. Ce ne sont donc pas des affaires qui vont se passer dans le noir entre copains, coquins et intrigants. L’actualité des faits divers économiques nous présente au quotidien les cas de concussions, détournements de fonds, prévarications. L’avion présidentiel acheté à crédit en est un des nombreux exemples.
En effet, juste après le renversement de Laurent Gbagbo, le soutien financier de la France de Sarkozy à la Côte d’Ivoire a été exceptionnel : 200 milliards FCFA pour payer les salaires, mettre en marche l’administration, relancer l’économie (financement ders dépenses sociales, apurement des arriérés vis-à-vis des partenaires financiers internationaux). Tout cela s’est fait dans précipitation avec promesse de tout régulariser quand la situation sera vraiment normalisée. Comment cet argent a-t-il été utilisé ?
Réfugié au Golf hôtel, Alassane Ouattara avait promis de payer trois mois d’arriérés de salaires aux fonctionnaires et agents de l’Etat (janvier, février et mars, puisque avril n’était pas encore achevé). Finalement, il n’a payé que un mois (le mois d’avril 2011 : les salaires de mars ayant déjà été positionnés, un certain nombre de fonctionnaires ont pu prendre leurs salaires, les autres attendaient que la sécurité revienne dans leurs zones avant de se rendre dans les banques). Au niveau de l’administration publique, à l’exception de quelques ordinateurs acquis, on a plutôt assisté à une chasse aux sorcières. Alors que l’économie était à plat, on a vu des immeubles pousser comme des champignons, des grosses cylindrées neuves débouler sur les routes.
Quand François Hollande a pris le pouvoir, il a regardé de très près le contour de cette aide. Il se murmure que la cour des comptes française a découvert des choses pas trop claires dans ce soutien. D’où les précautions et les mises en garde que Paris multiplient chaque fois qu’il s’agit d’appuyer la Côte d’Ivoire.
Ainsi de l’avertissement au régime Ouattara par le nouvel ambassadeur de France en Côte d’Ivoire, Georges Serre, lors de la conférence de presse co-animée, à l’ouverture du Forum franco-ivoirien. « La première partie du contrat désendettement-développement sera bientôt signée. Elle portera sur près de 530 milliards FCFA et va concerner six secteurs. Quand les projets vont démarrer, des audits vont être conduits pour chaque opération. Au moindre manquement, on arrête tout et on transmet l’information à tous les pays de l’Union européenne », a-t-il averti.
Toutefois, pour parer à toute éventualité, Paris a signé, récemment une convention avec la Côte d’Ivoire pour l’envoi d’un expert. Son rôle sera, officiellement, de réfléchir sur le contour de la première partie du C2D qui va être signé. Officieusement, il sera chargé de surveiller de très près toutes les opérations relatives à ce contrat.
Sur le chapitre de la rénovation des universités, Ouattara a vraiment eu chaud !!! La France a récemment fait un don de 656 millions FCFA en termes de contribution au financement du projet d’Appui à la gouvernance universitaire et à la réforme de l’enseignement supérieur (Agures). Heureusement que ce projet vise la gouvernance du système universitaire et la consolidation du système Lmd. S’il avait concerné la construction des bâtiments, il est certain que le régime Ouattara aurait été épinglé vu que lui-même a limogé le coordonnateur des travaux de réhabilitation de l’université de Cocody pour « détournement de fonds ». L’audit se fera sur la gouvernance universitaire.
Tel est le fond du C2D et les vérités de la France au régime Ouattara.

J-S Lia in NOTRE VOIE
liasylve@yahoo.fr

Fri, 19 Oct 2012 10:40:00 +0200

0
La Dépêche d'Abidjan

Recent Posts

Le monde noir de demain : Africain… Américain… woke… décolonial… sinon bien au delà ?

Ivoiriennes, Ivoiriens, chers Amis L'on va célébrer un peu partout dans le monde le 80e…

22 heures ago

Côte d’Ivoire : Le laisserons-nous avoir un quatrième mandat ?

Le retour de la Côte d’Ivoire au programme du Ppte (pays pauvres très endettés) annoncé…

3 jours ago

NIGERIA : Daniel Ojukwu, symbole des menaces qui pèsent sur les journalistes d’investigation

Le journaliste d’investigation Daniel Ojukwu, membre de la Fondation pour le journalisme d'investigation (FJI), a…

5 jours ago

L’art de dire et de se dédire aussi facilement

En 2010, Achille Mbembe, qui n’est pas philosophe mais historien, invitait les Africains qui «…

6 jours ago

This website uses cookies.