Les aveux stupéfiants d’un ministre de Ouattara

‘‘Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement, et les mots pour le dire arrivent aisément», disait Nicolas Boileau au XVIIè siècle. Et si on le ressuscitait pour faire de lui l’un des nombreux «sorciers blancs» d’Alassane Ouattara, qui a fait du Palais présidentiel de Côte d’Ivoire une administration française?
En effet, les actuels maîtres d’Abidjan semblent ne plus maîtriser le storytelling dont le cadre leur a été généreusement fourni par la Sarkozie. On avait arrêté de regarder leur film de série B au moment où le «brave tchê» (le héros, ndlr), ses avocats et les médias à sa solde disaient : qu’il avait gagné les élections, qu’il était «président de fait» depuis décembre 2010, que Gbagbo était donc dans une situation de putschiste.
Dans une interview récemment accordée à Soir Info, Coulibaly Gnénéma, ministre des Droits de l’Homme d’Alassane Ouattara, remet en cause de manière assez surprenante la mythologie officielle du régime. «J’ai déjà dit quelque part qu‘en cas de conflit, il ne peut avoir de responsabilité unilatérale, ce n’est pas possible. Si vous prenez des armes et que vous vous confrontez, il y a la participation de chacun aux résultats. (…) Dans cette circonstance, je pense que chacun doit humblement reconnaître qu’il a pris part d’une certaine manière à la survenue de tout ce qui est arrivé. Certains ont pris une part plus importante, d’autres une part moins importante. Le problème de Laurent Gbagbo, c’est bien qu’il était chef de l’Etat et que son serment prêté à l’occasion de son investiture lui fait l’obligation du résultat contraire de ce qui a été constaté, c’est ça.»
Si Gbagbo était chef de l’Etat pendant la guerre post-électorale, selon l’aveu du ministre Gnénéma, c’est que ce qui s’est passé le 11 avril 2011 peut être qualifié de renversement de régime. Chers messieurs du CNP, ce n’est pas nous qui le disons, c’est Gnénéma qui le sous-entend. Si Gbagbo était chef de l’Etat, la thèse de la «légitime défense» brandie par Soro tombe à l’eau. Si Gbagbo était chef de l’Etat, d’où vient-il que ses proches sont inculpés d’atteinte à la sûreté de l’Etat et de constitution de bandes armées ? Si Gbagbo était chef de l’Etat, Ouattara doit le remplacer à La Haye. Soro, Ahoussou et… Gnénéma doivent prendre le chemin de Bouna et de Boundiali et se constituer prisonniers.
Conseil gratuit au régime d’Abidjan : vite, organisez un séminaire portant sur «les éléments de langage» à utiliser en public. Si même vos ministres en viennent à adopter une vision «pro-Gbagbo» de l’histoire récente de la Côte d’Ivoire, ça promet !

Benjamin Silué in Le Nouveau Courrier

Thu, 19 Jul 2012 05:17:00 +0200

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