Le journal télévisé de 20h de la principale chaîne d’État a ouvert, le mardi 6 mai dernier, sur le démarrage des examens à grand tirage des écoles et établissements d’enseignement islamique; écoles où l’arabe est la langue en vigueur ; les autorités qui sponsorisent et financent le système, le Cosim, le Qatar et la Banque Islamique de développement, n’ont pas manqué d’exprimer la satisfaction devant la montée en puissance de cette filière de formation, en infrastructures, mais surtout en recrues.
De toute évidence, il n’y avait là aucun événement ni fait nouveau en Côte d’Ivoire, et l’équipe de reportage a semblé simplement soucieuse d’insister sur le succès et la croissance quasi exponentielle de cet enseignement bis, parallèlement au système d’état ivoirien qui repose sur le français qui est la langue nationale en Côte d’Ivoire selon notre constitution.
Nous n’allons pas prétendre rouvrir le débat sur la où les langues du pays à rendre officielles après l’épisode de colonisation qu’ont connu la plupart des pays d’Afrique Noire.
Il va de soi que, dans deux ou trois décennies, l’usage du français que nous pratiquons aujourd’hui déclinera au profit de nos quatre parlers culturels ethniques et territoriaux principaux que sont l’Akan/Baoulé, le Sénoufo/Gur, le Malinké/ Mandingue, et le Dan/Toura.
C’est la nature et le coût de l’histoire qui l’imposent et la seule étrangeté est le tissu inextricable de paramètres et paradoxes historiques, culturels et administratifs qui a conduit la Côte d’Ivoire a attendre si longtemps avant de le réaliser et l’assumer.
Et c’est justement parce que, nous allons enfin aborder un sujet aussi vital pour notre perception identitaire vis à vis des autres et en nous mêmes qu’il ne faut laisser place à aucune ambiguïté, à aucun “tohu bohu”.
La Côte d’Ivoire en tant qu’état ne peut engager le challenge de sa définition nationale par le canal linguistique s’il n’y a pas une adhésion totale et de tous aux options qui seront retenues.
Est ce au moment où nous commencerons à imposer l’enseignement du Baoulé, du Malinke, du Sénoufo et du Dan dans nos écoles maternelles et primaires, et les développerons sur les radios et télévisions, que nos élèves et étudiants seront concomitamment instruit en Arabe pour les musulmans, en latin, grec ou araméen pour les divers chrétiens, avec en embuscade les bouddhistes qui donnent déjà des cours en chinois ou japonais ?
Abandonner le français ou toute référence systématique à l’univers du colonisateur d’hier n’ouvre pas une boîte de pandore où les cultures et civilisations d’ailleurs sont prêtes à nous sauter au cou !
Abandonner le français – et ce n’est nullement un hasard que l’idée même ait pris tant de lustres à s’imposer à l’intellect des élites qui ont dirigé la Côte d’Ivoire depuis 1960 – induit que nous avons d’abord procédé à notre introspection culturelle et civilisationnelle de fond, et retrouvé nos véritables âmes.
L’Ivoirien hospitalier et prompt à privilégier ce qui vient d’ailleurs, n’a pas sa place à cette assise. C’est celui qui garde les forêts sacrées qui doit y aller de son petit bréviaire, nous faire noter ce qu’il confessera pour que dans deux siècles, même si une autoroute ou tout autre projet d’infrastructures a fait raser l’espace, on trouve dans la sous préfecture voisine,une petite aile du musée témoignera de cette part de notre identité nationale.
Pour en revenir à l’accueil facile des enseignements des différents pays pour les enfants en Côte d’Ivoire, l’histoire récente nous a enseigné que notre grand voisin ouest africain, le Nigeria a son expansion sociale et économique freinée et gangrenée, pour encore longtemps hélas, par une rébellion islamiste radicale qui se baptise << Boko Haram >>.
Ce mouvement armé naquit de nombreux cadres des nombreux emirats du pays qui furent orientés vers les grandes universités du monde arabe.
Plus tard, s’étant présentés au pays pour offrir leurs services et compétences, ils se retrouveront éconduit par l’administration centrale fédérale qui ne reconnaissait que le système britannique (anglais). Leurs protestations, suppliques et appels au dialogue restèrent lettre morte.
Tout le monde connaît la suite.
Que l’on prenne la peine de rassurer les parents en les assurant qu’un jeune licencié ou maitrisard en mathématiques, sciences physiques où chimie, abordera les épreuves de recrutement de professeurs du secondaire avec les mêmes chances de succès que son vis à vis issu du système de langue française.
La Côte d’Ivoire a urgence à s’unir pour se retrouver, et devrait commencer à savoir fermer certaines fenêtres souvent les plus séduisantes.
Fait à Abidjan, le 14 mai 2025
Le Ministre Kobena I. ANAKY
Président du MFA
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