CI : ELECTION PRESIDENTIELLE DU 31 OCTOBRE 2010

17 ans après, l’on se souvient encore de ce vent vespérale qui avait emporté notre illustre commensal, celui que nous appelions affectueusement ‘’ Aba’’, c’est-à-dire ‘’le vieux’’. Il nous avait quitté dans des conditions difficiles, emporté par une maladie pernicieuse que les plus grands féticheurs de notre village et même de gros villages environnants n’avaient pu vaincre.
Ne dit-on pas chez nous que l’on guérit de toute maladie, sauf de la dernière ? C’était le cas de le dire, car des maladies, le vieux en avait connus et vaincus. Mais hélas, cette dernière lui retira le souffle de vie.
Quoiqu’on dise, il faut rendre grâce à notre Dieu protecteur de lui avoir accordé tant de pluies qu’il consacra à la consolidation de l’harmonie au sein du village et à l’épanouissement des siens.
Patriarche de la tribu, il avait vu grandir ses arrières petits fils.
Une vie bien remplie que celle du ‘’vieux’’, notre père et ‘’Grand chef’’.
La plus inconsolable fut et reste notre bourgade, car le ‘’vieux’’ avait fait d’elle une dame rayonnante dont la beauté et la grandeur n’avaient d’égales dans toute la région. L’on venait de toutes les contrées l’admirer et profiter de son hospitalité légendaire.
En effet, dans notre village, quant il y’ avait à manger pour un, il y en avait pour tous. Et comme le ‘’Vieux’’ aimait à le rappeler : ‘’le repas appartient à celui qui le trouve’’.
C’était la belle époque et il faisait bon vivre dans les foyers.
Comme le veut la tradition, la chefferie reste toujours dans la famille, à condition qu’il n’y ait pas de postulants sérieux pour la succession. Auquel cas, on va chercher ailleurs, dans d’autres familles.
En ce qui concernait la famille du ‘’Vieux’’, ce n’était pas les prétendants qui manquaient, car même de son vivant, certains avaient poussé l’audace d’afficher leur impatience de le voir partir.
Beaucoup parmi les oncles présents sur le banc d’attente salivaient à l’idée qu’un jour la tête de cette dame intemporelle, riche et toujours si belle leur reviendrait de fait ou de droit.
De fait oui, car faut-il le mentionner, durant ces dernières heures, le ‘’vieux’’ avait permis que l’un des ses plus fidèles serviteurs flirte avec les attributs de la chefferie, sans lever le petit doigt.
De fait donc, ce dernier se voyait en pôle position. Tandis qu’en face, il y’avait le grand oncle qui depuis des années était perçu de tous comme celui que le ‘’vieux’’ préparait à sa succession.
Pendant que dans la famille du ‘’vieux’’, la convoitise s’en allait grandissante, des voix s’élevaient peu à peu à peu dans le village, pour réclamer en son temps, le droit à tous les fils du village de prétendre à la chefferie car, poursuivaient les mêmes voix, ‘’tous doivent avoir les mêmes chances et compétire en usant des meilleurs atouts de séduction pour gagner l’adhésion de la masse villageoise’’.
Et comme toujours, la tradition l’emporta. Avant même l’inhumation du ‘’Vieux’’, l’oncle muni d’un grelot fit le tour du village en s’autoproclamant nouveau Chef. Il devint ainsi le nouvel homme fort du village.
Mais très vite la tribu déchanta car le nouveau chef passa le plus clair de son temps à régler de vieux comptes, à rappeler à tous que si le village avait atteint cette renommée, c’était grâce au travail abattu par son défunt frère (Paix à son âme). Il sombra dans les excès, se laissa emporter par l’orgueil et l’intolérance, n’hésitant pas à répudier tous ceux qui lui faisaient des reproches fondés où non.
Si bien qu’après la disparition du « Vieux», le village est toujours à la recherche de ses repères. L’adultère, la violence, les assassinats et les règlements de comptes ont remplacé les valeurs de fraternité et de paix que prônait le ‘’vieux’’.
« Quand le baobab s’effondre, comment garder les oiseaux ? Si les héritiers ne se donnent pas la main, ils ne pourront assumer l’héritage », déclarait, au lendemain de la mort du ‘’Vieux’’, le chef d’un village voisin au nôtre. Des propos prémonitoires au regard des querelles de tout ordre que nous connaissons depuis plus d’une dizaine d’années.
Les divisions déjà présentes au sein de la bourgade vont s’amplifiées et prendre des proportions démesurées. Le village était désormais partagé entre des fils qui ne s’entendaient plus, entre plusieurs clans qui se distinguaient par des symboles aussi bizarres les uns que les autres.
Pêle-mêle, on peut citer le clan des braconniers avec pour symbole un éléphant, le clan des maçons avec pour symbole une case, le clan des jardiniers avec pour symbole une fleur, le clan des serruriers avec pour symbole une clé, le clan des célibataires avec pour symbole trois hommes… Ainsi de suite, ainsi de suite. Il y a tellement de clans et de symboles qu’on ne pourrait les citer en une journée.
Après 7 années passées à la tête du village, l’oncle sera emporté par un tourbillon venu de l´ouest, mené par un guerrier du village. Ce dernier se fera d’ailleurs appelé ‘’ Père de la fête des Ignames’’. Du fait de son arrivée qui coïncida avec cette célébration sacrée de chez nous.

Mais le village va se porter encore plus mal car les quelques acquis que le cher oncle avait pu préserver vont s’écrouler comme un grenier de toupie. Les villageois vont sombrer davantage dans la pauvreté. Le guerrier salvateur s’érige en bourreau et pille l’économie villageoise aidé en de petits guerriers qui étaient en rupture de ban avec la notabilité.

La question de la chefferie sera remise en cause, et nous allons exiger que le village se dote d’un nouveau chef en qui tous se reconnaitront.

Alors des scrutins ont lieu, mais seront contestées : l’oncle ayant été empêché de se présenter pour cause de mauvaise gestion de l’économie villageoise, le fidèle serviteur du ‘’vieux’’ barré, parce qu’il ne serait pas originaire du village, leurs deux clans choisissent le boycott.
Restent en lice le guerrier venu avec le vent de l’ouest, et l’un des plus audacieux et téméraire fils du village qui depuis longtemps (même du vivant du vieux) réclamait la chefferie.
Contre toute attente la victoire reviendra à ce fils téméraire. Qui à la vérité contrôlait toute la machine dès le départ. Comme si c’était hier, on se rappel encore de cette victoire plombée de sang qui a vu tomber tant de fils du village. Son règne est des plus triste car de mémoire de villageois jamais on avait enregistré autant de morts dans le village. Même du temps où la sorcellerie battait son plein.
C’est dans ce contexte trouble que la grande crise survint, divisant le village entre deux blocs.
Cette crise dure depuis 8 ans, parsemée d’accords et de désaccords aussi fantaisistes les uns que les autres. Les différents responsables de clans ont dû faire le tour de toute la région allant de village en village pour sceller des pactes que eux mêmes ont été toujours les premiers à violer, en commençant par le chef lui même. Les mauvaises vont aller jusqu’à affirmé qu’il maître dans l’art de se dédire.
Plus rien ne va. Voilà 17 ans que le ‘’vieux’’ nous a quitté, laissant derrière lui une bande d’héritiers et de fils plus divisés que jamais, en dépit des alliances de façade tissées ça et là.
Paradoxe des paradoxes, tous ces fils du village se proclament héritiers des idéaux du ‘’vieux’’, déclarant à tout vent qu’ils sont décidés à faire bouger les choses en poursuivant l’action du ‘’vieux’’.
Finalement, d’une façon où d’une autre chacun d’eux à fait ses preuves malheureusement le village va encore plus mal.
Tous les chefs de village et de tribu impliqués à un moment ou à un autre dans la résolution de notre crise se disent fatigués. Fatigués de savoir que la descendance du ‘’vieux’’ refuse de s’entendre sur l’essentiel, c’est à dire la vie du village, le bien être des villageois.
Le village est en danger permanent, en dépit des espoirs que certains voudraient entretenir. Et comme d’habitude la peur monte une fois de plus chez les villageois car il y’a peu, une nouvelle date de scrutin à été promulguer.
A la vérité bon nombre de villageois ne s’attendent pas à voir grand-chose au sortir des se ce scrutin (si et seulement si il a lieu), car ce sont toujours les mêmes clans avec à leur tête les mêmes individus qui veulent la chefferie. Que peut-on espérer de nouveau si ce n’est le même ballet.
Ni le fidèle serviteur, ni l’oncle déchu encore moins le fils téméraire ne se surpasseront pour faire mieux que ce qu’ils ont déjà fait depuis la disparition du ‘’Vieux’’. Or, au grand dam de tous, ce sont eux les véritables et sérieux postulants à la chefferie.
L’avenir du village nous inquiètent, et nous jeunes issus de la nouvelle génération qui avons vécu et subit les impairs de ces ainées incohérents et nombrilistes sur les bords, formulons un vœu :
‘’Puisse dieu et les mânes de nos ancêtres nous révéler un chef qui transcende les clivages claniques’’.

OUATTARA SEKOU
225 08096656
46394615
Email : sekou72003@yahoo.fr

Sun, 22 Aug 2010 10:46:00 +0200

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