Côte d’Ivoire. Regain de violence et de barbarie

Depuis quelques semaines, les Frci s’adonnent à une répression aveugle avec pour cibles les partisans avérés ou supposés du président Laurent Gbagbo. Une situation de violence inouïe qui s’est empirée avec les agissements des partisans de Ouattara depuis quelque temps, confirmant une volonté de mise oeuvre d’une épuration politique.

Alors que les autorités s’évertuent à leur offrir une posture d’armée nationale et républicaine, les Frci, sinon la majorité de ses éléments continuent de se comporter en force armée privée du camp Ouattara. En témoigne la vague de répression et d’enlèvements qui a cours depuis plusieurs semaines en Côte d’Ivoire et qui ne cible que principalement et presque toujours des partisans du président Laurent Gbagbo. Depuis deux semaines en effet, Yopougon vit au rythme des arrestations, enlèvements et autres rafles ciblées visant à perpétuer un climat de peur et de terreur généralisée. Dans cette atmosphère d’insécurité, plusieurs responsables et/ou militants, sympathisants du Fpi ou encore de simples citoyens pour des délits de faciès, ont été arrêtés ou enlevés pour des destinations inconnues.

Accentuation des arrestations arbitraires Yopougon, Koumassi, Adjamé, Bingerville, Divo, Lakota, Gagnoa, San Pedro, Daloa, Guiglo sont autant de villes/communes où plusieurs militants, responsables du Fpi ou simples citoyens ont été arbitrairement arrêtés et/ou enlevés par des éléments des Frci.

A Yopougon les enlèvements se comptent par dizaines quand les arrestations se font par centaines. Franck Gnagne, Godé Maurice et plusieurs militants du Fpi toujours entre les mains de leurs «bourreaux», enlevés chez eux à Yopougon. Traoré Drissa, responsable Jfpi à Adjamé, Diarrassouba Yacouba, SG de la Jfpi de Bramacoté, séquestrés par Koné Zakaria au camp Génie d’Adjamé. Dans la nuit du dimanche dernier, des éléments des Frci ont enlevé Kohou Jean, SG Fpi de Goya (à 5 km de Guiglo) et ont tenté d’en faire de même pour le SG Fpi de Yaoudé, village situé à 3 km de Goya. Hier lundi 20 août 2012, Naky Yves, professeur d’anglais au Collège moderne Khalil de Daloa, membre du bureau fédéral de la JFPI, a été enlevé par les FRCI pour une destination inconnue. A Daloa, au moins cinq personnes ont été arrêtés le week-end dernier, par des éléments des Frci, au motif saugrenu qu’ils ont tenté de «se préparer mystiquement ». Dans le but, toujours selon les Frci, de venir les attaquer plus tard.

Le régime conduit-il vers un chaos planifié ?

Au-delà de l’émotion que peut susciter cette atmosphère de terreur instaurée par le régime Ouattara, c’est bien la programmation d’une épuration politique qui est en cours. Avec la décapitation des structures de base du Fpi, avant d’atteindre le sommet. Les fondements de la cohésion sociale se sont profondément détériorés, au point de faire craindre le pire. Le Rdr et les Frci ne préparent-ils pas le pire ? Puisqu’à côté de cette terreur instaurée par les Frci, des partisans se sont invités dans la danse.

Coup sur coup durant le week-end dernier, ils ont saccagé le siège du Fpi et ont pillé puis incendié en partie les locaux du Groupe Cyclone, éditant les journaux Le Temps, LG infos et Prestige Mag. Dans la nuit du dimanche dernier, c’est un maquis (Padré), à Yopougon-Selmer, qui a été attaqué et saccagé par une dizaine d’éléments armés des Frci, alors que des clients s’y trouvaient encore. Au nombre desquels les confrères Barthélémy Inabo et Fernand Dédé (ex-agents de la Rti) qui sont sortis sous le choc. Dans un tel contexte de violence qui se perpétue, le gouvernement semble avoir perdu la langue ou tolère à la limite ces dérives qui font planer de réels dangers sur la paix sociale.

Focal. Rafle tous azimuts des Frci à Yopougon. Les populations rançonnées

La commune de Yopougon vit depuis plusieurs jours l’enfer avec la présence massive des soldats des Forces républicaines de Côte d’Ivoire (Frci) qui se livrent à de véritables abus.

Réputée bastion du Front populaire ivoirien (Fpi), la commune de Yopougon paie aujourd’hui son attachement à Laurent Gbagbo. Depuis les attaques qui ont eu lieu à plusieurs endroits du pays, cette commune vit un véritable calvaire avec ces soldats Frci. Qui se livrent à des rafles au cours desquelles les populations sont dépouillées de tous leurs biens.

Et comme si cela ne suffisait pas, ces personnes, des hommes en particulier, sont conduites manu militari à des lieux de détention de fortune, tenus au secret et qui varient selon l’équipe en mission. Dans ce contexte, être en possession de ses pièces d’identité n’arrange rien. Une fois embarqués, leurs parents et/ou connaissances des victimes qui tentent des interventions sont invités à payer des rançons en échange la libération de leur protégé. Entre 5000 francs Cfa et 100.000 francs Cfa pour les cas usuels. Ces rafles qui, au départ, se faisaient de façon sporadique se sont intensifiées depuis le vendredi dernier dans cette commune.

L’on en veut pour preuve l’irruption, dans la nuit de vendredi à samedi dernier, des Frci dans un hôtel de passe situé au quartier Selmer. Selon le gérant que nous avons rencontré, ces soldats, prétextant d’une rafle, ont débarqué autour de 23 heures cette nuit-là dans l’hôtel dont ils ont dépouillé tous les clients. Emportant avec eux, argent, téléphones portables, bijoux et autres biens matériels. Comme si cela ne suffisait pas, pour marquer leur passage, ces soldats ont pris le soin de déshabiller tous les clients qu’ils ont passés à tabac avant de s’en aller.

Cette même nuit, du côté du quartier Maroc, 5 jeunes hommes ont été enlevés par des soldats Frci qui ont prétexté de rafles générales pour troubler la quiétude des populations et arrêter des jeunes sous l’accusation générique de milicien pro-Gbagbo. Selon les riverains désemparés, ces soldats ont fait des tirs à la kalachnikov dans le seul but d’apeurer les populations et procéder à l’arrestation de personnes ciblées à l’avance, conduite à des destinations inconnues. Depuis le début des attaques, les cas d’agression, de vol, d’enlèvement et autres violations des droits de l’Homme par ces soldats sont légions.

Pendant ce temps… Ouattara poursuit ses vacances en France

La date du retour au «pays natal» du chef de l’Etat, Alassane Ouattara, n’est toujours pas officielle, à en croire son ministre des Affaires étrangères, Sem Daniel Kablan Duncan, qui animait une conférence de presse hier lundi 20 août 2012, à son cabinet au Plateau.

Le ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères, Sem Daniel Kablan Duncan était face à la presse, hier lundi 20 août 2012, dans l’après-midi, pour faire le point des activités diplomatiques au cours de la période de janvier à août 2012. Après avoir égrené le chapelet des voyages et réunions à l’extérieur effectué par le chef de l’Etat, ponctués d’intenses moments d’activités, le chef de la diplomatie ivoirienne, a fait savoir que ce dernier a «pris un bon repos mérité» en France. «Il (Alassane Ouattara, ndlr) a pris quelques jours de congés. Il viendra bientôt ici en Côte d’Ivoire, probablement à la fin du mois», a laissé entendre Daniel Kablan Duncan. Visiblement, malgré le contexte de violence armée et physique qui s’intensifie depuis plusieurs jours, le chef de l’Etat poursuit tranquillement sa villégiature à Mougins, où il possède une résidence.

Il profite ainsi de ses vacances «méritées», loin des bruits de kalaches et autres grincements de dents des populations. Sur la série d’attaques perpétrées récemment contre des cibles militaires, le ministre des Affaires étrangères a réitéré l’appel du gouvernement.

«L’objectif du gouvernement est de tendre la main à nos frères qui ont pris les armes…, s’asseoir et discuter autour d’une table des problèmes de la Côte d’Ivoire», a déclaré le ministre Kablan Duncan. Qui n’a pas manqué de révéler que le gouvernement s’emploie à remédier à ces attaques. Avec la livraison dans les jours à venir de matériels militaires. «Ces attaques sont les derniers soubresauts de quelques gens qui n’ont pas encore compris que la période de l’affrontement est passée et qu’il est maintenant question de reconstruire la Côte d’Ivoire. Il y a quelques rêveurs qui pensent qu’ils peuvent freiner la dynamique du développement de notre pays, mais ils sont heureusement une minorité», tente de rassurer les Ivoiriens, Daniel Kablan Duncan.

Gérard Koné / Hermann Djea / Franck Toti
in Le Nouveau Courrier

Wed, 22 Aug 2012 13:12:00 +0200

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