septembre 13, 2024

Côte d’Ivoire / Situation socio-politique: Richard Dakoury rompt le silence

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QUE DEVIENT RICHARD DAKOURY ?

Avant tout propos, je voudrais présenter mes vœux les meilleurs à tous les Ivoiriens et Ivoiriennes.
Je présente également mes condoléances aux parents des victimes de la crise postélectorale.
Je n’oublie pas les victimes des récents évènements du plateau, à Abidjan. Pour revenir à votre
question, cher ami, je suis en exil, depuis l’effondrement de la démocratie dans mon pays.
Pourquoi ce long silence? Après cette tragédie socio-politique sans précédent que notre
pays a vécu, il m’a paru bon de garder ce silence parlant, observateur, interrogateur et restaurateur
pour mieux comprendre et apprendre à connaître le monde et son fonctionnement.

DANS QUEL PAYS ETES-VOUS ?

Ce n’est pas important.

ON PARLE DU GHANA ?

Je suis là où Dieu m’a conduit.

C’EST-A-DIRE AU GHANA ?

Je suis là où Dieu m’a conduit.

COMMENT VIVEZ-VOUS VOTRE EXIL ?

Je le vis difficilement, car ce n’est pas facile d’être éloigné de sa terre natale sans l’avoir délibérément décidé. Cependant, J’accepte de porter ma croix dans la dignité. Ma personne n’est pas importante. C’est la souffrance de ces millions d’Ivoiriens qui vivent dans la détresse tous les jours qui me préoccupe et me chagrine.

QUE FAITES-VOUS EXACTEMENT ?

Vous savez, l’exil est un moment de réflexion et d’emmagasinement de connaissances. Et je m’y consacre entièrement.

LE POUVOIR VOUS ACCUSE DE FOMENTER UN COUP CONTRE LUI ?

(Rire…) Ah bon ! C’est vous qui me l’apprenez. Et avec quel moyen ferais-je ce coup ? Quand
même ! Soyons sérieux. Nous voulons parler des pro-Gbagbo… Le Président Laurent Gbagbo ne
nous a pas appris à faire des coups d’État. Bien au contraire, il nous a instruits sur les valeurs
de la démocratie et du dialogue depuis plus de trente ans. Souvenez-vous de cette célèbre maxime
du Président Laurent Gbagbo : «asseyons-nous et discutons». Elle est très expressive et explicite. Cette maxime est la locomotive philosophique qui fonde l’action politique du Président Laurent Gbagbo. On ne peut pas être imbibé, imprégné et estampillé par ce concept politique et prendre les armes. Il y a là une dichotomie. Il n’y a pas longtemps, nous étions à Dakar pour répondre à l’invitation du Président Macky Sall dans le cadre de la recherche de la paix dans notre pays. Telle est notre démarche.

SELON VOUS, QU’EST-CE QUI REND LE POUVOIR FRILEUX?

Vous savez bien les conditions dans lesquelles ils sont arrivés au pouvoir. Je ne vous apprends rien. En effet, ils ont peur de leur propre ombre. Ils voient les coups d’État partout oubliant l’essentiel. Pour dire vrai, ils ne sont pas préparés et prêts pour la contradiction dans un environnement politique apaisé. Le modèle de société qu’ils présentent aux Ivoiriens avec son cortège de justice à double
vitesse, d’enlèvement, de séquestration, de torture, de politique nécrologique et de violation des
droits de l’Homme les plus élémentaires sont aux antipodes de la démocratie. Vous observez
avec moi que ceux qui n’ont pas le droit de porter les armes, les ont et ceux qui y ont droit sont
dans l’expectative. Dans quel pays sommes-nous ? Les seigneurs de guerre font la loi et le régime reste impuissant face à toutes ces exactions inacceptables. Regardez, un président qui prétend lutter contre l’impunité alors qu’il est entouré par des criminels impunis formellement identifiés et indexés par les organisations internationales de défense des droits de l’Homme (Human Right Watch et Amnesty international). Ils sont débordés et ne savent plus à quel saint se vouer. Ils n’arrivent plus eux-mêmes à comprendre leur pouvoir. Ils ne savent plus ce qu’il faut en faire. L’économie vacille.
La démocratie est morte. Les libertés sont embastillées. Au final tout s’écroule et c’est à juste titre
qu’ils naviguent à vue à la recherche de boucs émissaires. En vérité, ils savent d’où ils viennent
mais ils ne savent pas où ils vont et où conduire le navire Ivoire. Ils ont peur parce que les Ivoiriens les attendent au résultat.

À QUAND VOTRE RETOUR AU PAYS ?

La date de mon retour au pays m’est inconnue. Je ne connais ni le jour ni l’heure pour l’instant.
Je le saurai quand certaines conditions seront remplies. Une chose est sûre, un jour, je retournerai dans mon pays, la terre de mes ancêtres qui m’a vu naître.

QUELLES SONT CES CONDITIONS ?

Il faut que les conditions de la définition étymologique de «vivre ensemble» selon leur propre
terme se mettent en place. On ne peut pas vouloir une chose et ramer à contre-courant. Que le pouvoir comprenne qu’il ne doit pas vivre seul .Ce serait se faire hara-kiri en violant les principes politiques de base de leur vision sociétale. Qu’il s’en souvienne. Nous sommes fatigués de paroles emphatiques.
Nous voulons des actes concrets qui rassurent sur la volonté d’aller à la réconciliation.

UN MOT SUR LA RÉCONCILIATION…

Dans le cas de la Côte d’Ivoire, la réconciliation est une nécessité. Il est impérieux que le pouvoir d’Abidjan en fasse une priorité et non un slogan. La réussite de cet exercice est subordonnée à la volonté politique du pouvoir en place.

QUE FAUT-IL FAIRE POUR RÉCONCILIER LES IVOIRIENS ?

Après le traumatisme post-électoral que notre pays a connu et le diagnostic du climat social
actuel qui reste délétère, il faut surtout se surpasser en acceptant de mettre en place le véritable
levier de la réconciliation. De mon point de vue, la réconciliation sera effective si le pouvoir
en place joue la carte du Président Laurent Gbagbo. Je lui demande de convaincre ses partenaires internationaux de libérer le Président Gbagbo en vue de faciliter et favoriser une réconciliation vraie et réussie .Le modèle sud-africain est très éloquent en la matière.

DES IVOIRIENS SOUTIENNENT QUE LA RÉCONCILIATION EST UN LEURRE…

Ils n’ont pas tort. Vous savez, la réconciliation exige un minimum
de volonté, d’adhésion et d’actes concrets. La Commission Dialogue-Vérité-Réconciliation
mise en place par le pouvoir d’Abidjan et dirigé par le premier ministre Charles Konan Banny
peine à se relever. Les raisons sont toutes simples. Il faut faire échouer le président Banny pour
ne pas qu’il glane des lauriers et comptabilise cette réussite ; qu’il pourrait éventuellement utiliser
au cours des futures batailles électorales. Aussi la pagaille politico-judiciaire à laquelle nous assistons dans notre pays faite d’enlèvement, d’emprisonnement quasi-quotidien d’opposants politiques a fragilisé le processus de réconciliation donnant ainsi raison aux plus sceptiques. Les actes contradictoires du gouvernement ont décapité la Cdvr de Banny qui est aujourd’hui en putréfaction très avancée. Je demande donc au président Charles Konan Banny d’en tirer les conséquences et de
courageusement rendre sa démission. Ils ont certainement une lecture différente du vocable
«réconciliation».

PEUT- IL Y AVOIR RÉCONCILIATION SANS JUSTICE ?

La réconciliation et la justice sont deux termes diamétralement opposés. La justice suppose
que la même norme de référence soit appliquée sans discrimination à tous les membres d’une
même catégorie. La notion renvoie en ce sens à une égalité de droit. L’application la plus simple
de l’idée de justice est celle qui exprime l’adage : «à situation égale, traitement égal». Elle a
pour finalité en termes plus simple de donner droit à réparation pour un préjudice causé et de
condamner celui qui a tort. A contrario, la réconciliation quant à elle s’instruit de la sagesse, se
nourrit de la vérité et se vêtit du manteau du pardon dans un environnement où l’Amour est
sublimé. Elle a aussi pour vocation de rapprocher des personnes qui se sont brouillées et qui
se regardaient en chiens de faïence. Il a appartient donc au gouvernement de faire un choix,
car les deux voies sont incompatibles. S’il choisit la justice, alors qu’elle s’applique à tous sans discrimination. Je suis convaincu pour ma part que la voie de la réconciliation reste la meilleure ;
malheureusement le pouvoir a décidé d’appliquer la «justice» injustifiable qui ressemble trait
pour trait à celle des vainqueurs faisant croire qu’ils sont blancs comme neige. Ils ont tellement
consommé la haine de l’autre et instruit la vengeance à leurs militants, qu’ils sont entre le marteau
et l’enclume. Ouattara, même s’il a cette volonté d’y aller, a peur de la réaction de ses militants
revanchards qui l’ont pris en otage.

PEUT-IL S’EN SORTIR ?

L’avenir nous le dira

COMMENT VOYEZ-VOUS LE PROCÈS DU PRÉSIDENT LAURENT GBAGBO ?

C’est aujourd’hui un secret de polichinelle que d’affirmer que le procès du Président Laurent Gbagbo est politique. Nicolas Sarkozy et Alassane Ouattara sont les principaux auteurs de cette tragédie politico-judiciaire qui une fois de plus humilie l’Afrique et nos ancêtres. Les charges retenues contre le Président Laurent Gbagbo m’ulcèrent et me confirment dans l’idée que ce monde est pervers et insouciant de certaines valeurs que Dieu a incrusté en l’Homme.

LES JUGES SOUTIENNENT QU’IL EST POPULAIRE. ET QU’IL A UN RÉSEAU DENSE. IL POURRAIT FUIR OU REVENIR AU POUVOIR. QU’EN DITES-VOUS ?

Le rejet de la requête de mise en liberté provisoire du Président Laurent Gbagbo le 26 octobre
2012 par le juge de la Cpi a fait couler beaucoup d’encre et de salive. En ce qui me concerne, je n’ai pas été surpris. Vous savez, la nature du dossier est complexe eu égard aux connexions politiques qui supplantent l’action judiciaire. Et l’argument des juges est illustratif de l’étau dans lequel ils sont engouffrés. Vont-ils s’en sortir, là demeure toute la question. Sinon, comment comprendre qu’ils s’adonnent à un argumentaire plutôt politique que juridique. Cette décision pue le juridisme. Ils viennent de révéler officiellement au monde entier ce que nous savions déjà. A savoir que ce procès est purement politique. De nos jours, être populaire, avoir un réseau puissant et des ambitions politiques sont désormais des actes constitutifs d’infraction. C’est la nouvelle réécriture du droit. Qui l’eut cru ; il a fallu que le Président Laurent Gbagbo soit à la Cpi pour que l’univers du Droit s’étoffe de nouvelles théories démentielles. Ce leader charismatique panafricain dont la renommée a dépassé les frontières africaines, est très gênant pour ce système mondial de braquage des richesses de l’Afrique. Ils détiennent un grand homme politique et non un criminel de guerre. Ils arrêtent
le co-auteur indirect pendant que les auteurs direct sont en liberté et même nommé à de haut poste de l’Etat. Cette justice internationale ne finira pas de nous surprendre. N’ayant pas d’argument juridique contre lui, je voudrais leur demander de libérer le Président Laurent Gbagbo le prisonnier politique
pour le bonheur des Ivoiriens et des Africains, et pour le triomphe de la justice. Les experts médicaux de la Cour soutiennent qu’il a été torturé.

POURTANT, IL CONTINUE D’ETRE DÉTENU…

Cet argument ne les intéresse pas. Ils sont plutôt préoccupés à répondre aux injonctions de leurs mandants. En principe, cet élément pouvait jouer dans la mise en liberté provisoire du Président Laurent Gbagbo si les juges étaient habités par le souci d’impartialité. Ceci lui aurait permis de récupérer physiquement et moralement afin de participer sereinement à la procédure judiciaire devant laquelle il ne veut pas se dérober.

QUI A INTÉRÊT À CE QUE LE PRÉSIDENT LAURENT GBAGBO NE SOIT PAS LIBÉRÉ ?

D’abord, ceux qui se sont précipités à sa déportation à la Haye. Ils ont peur de sa popularité et des liens forts qui l’unissent au peuple de Côte d’Ivoire. C’est un adversaire politique très redoutable
dont le franc-parler met en déroute tous ceux qui ont choisi les armes comme moyens d’accession au pouvoir. Il aime la parole, qui, pour lui, est l’instrument par excellence de l’homme politique. Cette parole, moteur de la démocratie n’est pas leur point fort. Ils n’en veulent pas. Le langage que ses adversaires «politiques» tirent de la parole ; c’est «faisons la guerre». C’est là leur champ de prédilection.

PARTAGEZ-VOUS L’AVIS DE CEUX QUI SOUTIENNENT QUE LA COUR PÉNALE INTERNATIONALE EST DANS LA TOURMENTE SUR LE DOSSIER DU PRESIDENT LAURENT GBAGBO ?

La Cpi n’est pas dans la tourmente. Elle sait exactement ce qu’elle fait. Je voudrais dissocier le bureau du procureur de l’instance judiciaire internationale de celui des juges. Le procureur a pour rôle de poursuivre et les juges de décider de l’issue du procès. Et j’espère qu’ils se détacheront des pressions politiques encombrantes en disant le Droit ; C’est-à-dire libérer le Président Laurent Gbagbo. Cette décision va mettre fin aux spéculations qui décrédibilisent cette institution. J’encourage donc les juges à revenir au droit et à se démarquer des élucubrations de la procureur en prenant le bon arrêt qui restaure la dignité de Gbagbo et arrête cette pièce cabalistique digne de l’époque de «l’homme est un loup pour l’homme».

COMMENT EXPLIQUEZ-VOUS LA FORTE MOBILISATION AUTOUR DU PRÉSIDENT LAURENT GBAGBO ?

Je voudrais profiter de l’occasion que vous m’offrez, pour féliciter tous les patriotes en Côte d’Ivoire, en France, en Angleterre, aux Etats-Unis, en Europe, partout dans le monde et les panafricanismes qui ont porté et qui continuent de porter la flamme inextinguible de la mobilisation autour de ce digne fils d’Afrique injustement incarcéré, dont Patrice Emery Lumumba, Kwame Nkrumah et Thomas Sankara sont aujourd’hui fiers. Un écrivain français a dit : «les grandes crises révèlent les grands hommes, malheureusement ce sont les médiocres qui les provoquent». En effet, la crise politico-militaire injuste que notre pays a vécue depuis 2002 a révélé la grandeur internationale d’un homme qui était déjà grand, le Président Laurent Gbagbo. Il est un démocrate, un pan africaniste, un homme de paix qui a décidé d’engager des réformes sociales, politiques et économiques qui apportent des changements qualitatifs dans le quotidien de ses concitoyens. Il voulait, dans la gestion de la chose publique, imprimer une ligne de conduite qui amène l’Ivoirien à compter sur lui-même et également donner un contenu à notre indépendance politique. C’est tout. On ne peut pas toujours tendre la main. Il faut être capable de conduire le destin de son pays en comptant sur soi. Les richesses doivent servir au bien-être du peuple et non les brader aux multinationales voraces et insatiables. Ce n’est qu’une question de bon sens. Les intellectuels africains ont compris le sens du combat de Laurent Gbagbo. Et c’est la raison pour laquelle la mobilisation ne faiblit pas. L’Ambassadeur des Etats-Unis soutient qu’il est incongru qu’aucun chef de guerre ne soit transféré…Ils ne peuvent pas être transférés, dans la mesure où ce sont eux qui établissent la liste des transférables et qui procèdent à leur arrestation. Les chefs de guerre ne sont pas seulement les responsables des Frci, mais aussi, les politiciens qui ont tout orchestré et qui détiennent les clés de la rébellion. Même la procureur de la Cpi, Fatou Bensouda, malgré tous les rapports accablants des organisations internationales des droits de l’Homme sur les crimes de génocide des chefs de guerre est restée impassible. Parce que préoccupée à remplir la mission d’asservissement et d’avilissement à elle confiée par ses maîtres qui décident de tout. Seul le camp du Président Laurent Gbagbo les intéresse. Elle n’est nullement émue par les 1200 morts de Duékoué et des centaines de personnes tuées par les ex-chefs de guerre dans les zones qui étaient contrôlés par l’armée régulière. Ces morts ne sont certainement pas des humains qui doivent mériter une attention particulière aux yeux de Fatou Bensouda. Vive la justice des vainqueurs. L’ambassadeur américain qui soulève la question du transfèrement des chefs de guerre en sait certainement beaucoup sur les dessous de la crise ivoirienne.

QUELS COMMENTAIRES FAITES-VOUS SUR LA MUTATION DU COJEP EN MOUVEMENT POLITIQUE ?

Le Cojep vient de faire un grand pas dans le marigot politique ivoirien. Cette mutation voulue par ses dirigeants démontre leur adaptabilité à la nouvelle configuration politique en Côte d’Ivoire. Je voudrais féliciter ses dirigeants et les encourager à abattre un travail de qualité pour passer de mouvement politique en parti politique. C’est le cercle des Gbagboïstes qui s’agrandit. Certains estiment que ce n’est pas opportun…Ceux qui le disent ont une lecture myotique et sélective de
l’évolution de la météorologie politique. La politique se nourrit d’évènements et ceux-ci créent
des opportunités optionnelles de la ligne politique du leader. L’imperceptibilité de cette dimension conduit à une analyse approximative de la démarche du Cojep.

DE QUOI S’AGIT-IL ?

Le Fpi du Président Laurent Gbagbo fait désormais face à une coalition d’houphouétistes (Rhdp) déterminée à se maintenir au pouvoir et à l’isoler. Je dirai même à l’anéantir. La triangulation politique Rdr, Pdci et Fpi est dominée par les principaux partis au pouvoir, qui arithmétiquement place le Fpi dans un champ magnétique d’isolement. Le combat stratégique et tactique doit nous enrichir de partenaires solides, déterminés, engagés à faire prévaloir la philosophie politique du président Gbagbo. Il n’est donc pas bon que le Fpi soit seul. Il nous faut agrandir la famille (Gbagboïste), seule cette voie est capable de nous solidifier et nous préparer à répondre à la
multidimensionnalité des combats à venir. D’un côté, nous aurons les houphouétistes instruits par la culture de paix, dont la philosophie politique est la prise du pouvoir par les armes, la phobie de la démocratie et de l’embrigadement des libertés individuelles et collectives. Et de l’autre côté, les Gbagboïstes qui ont pour repère politique, la prise du pouvoir par les urnes, le plébiscite de la démocratie et le respect du droit à la différence. Ne soyons pas amnésiques. Vous vous souvenez très bien que la candidature du Président Laurent Gbagbo a été portée par des partis politiques, des mouvements politiques et des organisations de la société civile en son temps et ce gros ensemble a été
baptisé Lmp. La démarche du Cojep me fait penser à la parabole des talents dans la Bible. Quand le maître reviendra il faut qu’il soit fier de ses partisans. Nous n’avons pas le droit de demeurer statique et improductif. Le président nous fera le reproche de n’avoir pas décuplé les vertus de sa semence politique. De là où il est, je suis convaincu qu’il salue le mouvement politique de Charles Blé Goudé son disciple. J’invite les amis à ne pas être misonéistes et à se débarrasser du manteau de l’égocratie.
Mettons notre talent à la disposition du Président Laurent Gbagbo et non au dénigrement intempestif. Un Cojep fort ne peut que renforcer le dispositif de défense du Fpi pour le bonheur des Gbagboïstes.
D’ailleurs, le congrès du Cojep a hanté le pouvoir pendant des semaines. Cela voudrait dire que le nouveau mouvement politique lui donne un sommeil cauchemardesque et ceci n’est pas fait pour arranger leur coalition. C’est pourquoi je salue cette décision courageuse et responsable du Cojep.

EST-CE QU’IL N’ÉTAIT PAS BIEN POUR CHARLES BLÉ GOUDÉ QU’IL REJOIGNE LE FPI ? CETTE ATTITUDE N’EST-ELLE PAS UNE TRAHISON ?

Je ne crois pas qu’il ait eu des propositions de la part des dirigeants du Fpi, ni du poste qu’il lui aurait confié. Vous savez, l’adhésion à un parti politique est libre. Depuis que la crise a éclaté le 19 septembre 2002, le Cojep est resté constant dans le combat pour la dignité de la Côte d’ivoire. Il n’a donc pas failli à sa mission. Ce n’est pas le changement de nom ou de poste qui façonne impérativement la personnalité. C’est l’éducation de base qu’il a reçue qui construit sa personnalité et détermine sa posture. Il est de notoriété publique que Le ministre Charles Blé Goudé n’a jamais milité au Fpi mais plutôt à la Fesci. Et cela ne l’a pas empêché de piloter le navire de la résistance du mouvement patriotique. Personne ne peut en Côte d’Ivoire être surpris de la transformation de son
organisation en mouvement politique. Les traîtres il faut les chercher ailleurs et non en exil. C’est à cause de ce combat que le camarade Blé Goudé est privé de la liberté de voyager et est sous le coup d’un mandat d’arrêt international. On ne peut pas dire de telles énormités. C’est une insulte que de le penser. Que chacun apporte sa pierre à l’édifice. Le combat en a besoin.

LES MÊMES CRITIQUES SOUPÇONNENT LE LEADER DU COJEP DE TOURNER LA PAGE DU PRÉSIDENT LAURENT GBAGBO ?

Le Président Laurent Gbagbo n’est pas une page ; il est une encyclopédie dont Blé Goudé et
le Cojep sont une des pages principales. Jugeons au résultat et non sur la base d’allégation et de
préjugé. Je demande aux critiques de ne pas se tromper de combat, mais de faire des propositions
constructives et objectives capables de redynamiser la flamme militante et d’offrir une plate-forme politique plus crédible ; car la solidarité consolide la solidité du combat.

OUATTARA EXPLIQUE LA RARETÉ DE L’ARGENT PAR LE SIMPLE FAIT QU’IL TRAVAILLE. QU’EN DITES-VOUS ?

Cher ami, on aura tout vu et tout entendu avec ce régime. Le monde des économistes vient d’être ingurgité d’une nouvelle doctrine spectaculaire : «l’argent se fait rare parce qu’il travaille».
En d’autres termes, selon Ouattara (l’économiste ?), l’économie est dynamique quand l’argent se fait rare et qu’il travaille. Cette théorie Ouattaraïste innovante est le signe annonciateur d’un tsunami social indescriptible qui attend les pauvres ivoiriens. Cette assertion économique suicidaire fait le lit d’un grand «vuvuzelement» des ivoiriens qui sont encore sous le choc. Loin de moi l’idée d’invectiver, là n’est pas mon intention. Je suis seulement choqué d’entendre le «meilleur» économiste d’Afrique et de surcroît chef d’Etat de Côte d’Ivoire donner une telle affirmation apocalyptique. Vous savez, dans la famille des économistes il y a plusieurs branches comme en droit, et en médecine etc. Chez les économistes, il y a les banquiers. Et ce que je sais des banques, c’est qu’elles partent sur le marché financier pour faire des placements ou acheter des titres qui souvent sont à risque. Il n’en demeure pas moins que les salariés perçoivent leur paie et que l’argent circule dans la banque pour le bonheur des clients. En dépit des placements, l’argent ne se fait pas rare dans l’établissement financier.
S’il se fait rare, parce que ne circulant plus, c’est que la banque est en cessation de paiement et on
lui appliquera une procédure de liquidation judiciaire. Cette procédure a pour but de mettre fin
à l’activité de l’entreprise ou à réaliser le patrimoine du débiteur par une cession globale ou
séparée de ses droits et de ses biens. On appelle cela, la faillite. Dans le cas d’un pays comme le
nôtre, On ne peut pas voter un budget de près de 4000 milliards de Fcfa et parler de rareté de l’argent.
C’est insoutenable. Et ce n’est même pas digne d’un chef d’Etat et d’un premier ministre qui sont des économistes. Ou alors le budget 2012- 2013 a été surévalué. La gestion d’un Etat est différente de celle d’une banque. On ne prend pas tout l’argent de l’Etat pour le placer sur le marché financier et dire après de façon péremptoire qu’il travaille. Quand l’on dit que l’argent travaille, c’est qu’on l’injecte dans l’économie à travers les grands travaux de l’Etat qui sont de gros œuvres pourvoyeuses
d’emplois jeunes. Les jeunes bénéficient également de ligne de crédit qui leur permet de créer des emplois générateurs de revenue. Voici un des agrégats de l’économie moderne qui impulse
le levier économique à un niveau exponentiel. Dans ce cas d’espèce, l’on peut sans se tromper
dire que l’argent travaille. Et c’est parce qu’il travaille qu’il doit circuler dans tous les secteurs d’activité. Ceux qui travaillent en jouissent et le font circuler à partir des dépenses qu’ils effectuent.
Et s’il se fait rare, c’est que l’argent ne travaille pas, donc il y a problème. On ne peut pas soutenir l’insoutenable. Je demande à Ouattara de nous dire où il a mis exactement notre argent ? En fait, cher ami, il vient d’annoncer à travers sa déclaration, la faillite qui guette la Côte d’Ivoire. L’homme solution vient de nous dire qu’il est en réalité le problème. Ouattara le chercheur d’argent ne le trouve toujours pas. Ceux qui y ont cru n’ont que leurs yeux pour pleurer. Je demande à Ouattara de courageusement rendre sa démission car il vient encore d’échouer lamentablement. La réalité est
implacable.

LE PRIX DU CARBURANT VIENT D’AUGMENTER DANS LA SITUATION ECONOMIQUE DIFFICILE QUE LE PAYS TRAVERSE. QUEL COMMENTAIRE ?

Nous étions tous dans ce pays quand on nous annonçait des miracles et des prodiges économiques. Que n’a-t-on pas dit sous le régime du Président Laurent Gbagbo à propos de l’augmentation du prix du carburant. Aujourd’hui l’homme solution est devant le fait accompli. Cette augmentation du prix du carburant est la conséquence de la gestion improvisée et approximative des ressources énergétiques.
La flambée des prix des denrées alimentaires est souvent tributaire de l’augmentation du prix du carburant. Le mythe et le mystère qui entourent l’argent en Côte d’Ivoire plongent les Ivoiriens dans une situation de précarité inqualifiable. Et c’est dans cette situation économique drastique que le gouvernement Duncan procède à une augmentation inadmissible du prix du carburant. Le panier de la ménagère ne constitue certainement pas une préoccupation majeure pour ce gouvernement allergique aux critiques, qui passe son temps à emprisonner les pro-Gbagbo et à allonger la liste des personnes capables de leur apporter la contradiction. Je m’associe à la douleur des Ivoiriens et j’espère que l’argent qui est allé travailler reviendra bientôt dans les foyers. Un mot sur la situation tragique que notre pays vit en ce moment suite aux évènements douloureux qui se sont produits au plateau.
Je présente encore mes condoléances aux familles des victimes et je souhaite un prompt rétablissement aux blessés. Ces morts sont une mort de trop. Cela doit cesser car les Ivoiriens souffrent trop et ont besoin de quiétude. Il faut que les responsabilités soient situées et que les mesures coercitives soient prises. Cette tragédie m’emmène à m’interroger sur l’état spirituel du pays. Pourquoi tant de mort ? Qu’est ce qui se passe dans mon pays ? Je demande aux Ivoiriens de beaucoup prier pour la Côte d’Ivoire. Pour finir, j’invite le gouvernement de Côte d’Ivoire, à favoriser un climat de paix dans le pays en acceptant un dialogue direct et sincère avec l’opposition. Le dialogue que Houphouët Boigny leur a inculquer ne doit pas être une vue de l’esprit mais plutôt un moyen de règlement des crises. Nous sommes obligés de nous parler parce que nous avons la Côte d’Ivoire en commun. Houphouët a parlé de dialogue comme l’arme des forts et Gbagbo a dit : «asseyons- nous et discutons». Allons donc à la table du dialogue pour nous asseoir et discuter franchement pour une sortie heureuse de la crise. Si nous voulons, nous pouvons nous donner les moyens de le réaliser pour le bonheur du peuple de notre pays. Frère, rien n’est éternel sur la terre des hommes. Les hommes passent mais le pays demeure.

Interview réalisée par :
Yacouba Gbané in Le Temps

Sat, 12 Jan 2013 16:03:00 +0100

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