Pauvreté grandissante, manque d’emploi, …. : Le temps de la débrouillardise

C’est le cas de jeunes gens qui ont compris qu’avec le délestage, des personnes n’arrivent pas à charger les batteries de leurs téléphones cellulaires. Alors, ils ont décidé de se transformer en chargeurs ambulants de téléphones portables. Ils passent de maison en maison, récupèrent les cellulaires déchargés et vont les charger dans les zones qui ont encore de l’électricité moyennant un montant qui peut varier entre 200 FCFA et 300 FCFA. A côté d’eux, des tenanciers de cabines téléphoniques ont ajouté à leur activité, celle qui consiste à charger les portables. Ainsi, toute personne dont la batterie n’a plus d’énergie et qui est loin de chez elle, peut avoir recours à eux pour charger son téléphone. Le jeune David, tenancier de cabine à Angré, a cinq prises électriques auprès de lui. « Grand frère, tu sais que pour pouvoir s’en sortir dans notre métier, il faut diversifier ses activités. Nous avons commencé, en plus des appels et la vente de crédits téléphoniques, par vendre les accessoires de portable. Ça marchait. Mais, depuis quelque temps, les Ivoiriens eux-mêmes ont des difficultés. C’est pourquoi, on a commencé à charger les portables pour « soutra » les gens qui sont déchargés. Si dans la journée tu as eu cinq clients, ça te fait 1000 FCFA. Le soir on peut manger quelque chose», nous explique-t-il.

Autre métier insolite, les mannequins-bloqueurs. Connus en tant que supporters sur les stades lors des matches de football, de nombreux jeunes ont décidé d’en faire une activité. Désormais, ils ont envahi les principaux carrefours d’Abidjan. Badigeonnés de peinture, bloqués dans des positions qu’ils changent toutes les 5 ou 10 minutes, ces individus attirent beaucoup l’attention des automobilistes et autres badauds. Fait remarquable, ils ont toujours à leur pied, une calebasse ou un petit canari. Les âmes généreuses y jettent des pièces d’argent. L’un d’eux que nous avons rencontré au carrefour Petro Ivoire à Angré, et qui a refusé de dévoiler son identité, a soutenu : « Abidjan est devenu dur. Il n’y a plus d’argent au pays. Chacun fait ce qu’il peut pour se nourrir. C’est ce que nous avons décidé de faire. C’est mieux que voler ». Est-ce qu’ils s’en sortent financièrement ? Sa réponse : « Les autres, je ne sais pas. Mais, me concernant, ça dépend des jours. Il y a des jours où je peine à récolter 2000 FCFA. Mais, une autre fois, un seul individu peut me donner 5000 FCFA. Quand c’est comme ça, la journée est gagnée ».
Agent de la circulation. Ne vous y méprenez pas. Il ne s’agit pas de forces de l’ordre affrétés à la régulation de la circulation. Mais plutôt des bénévoles qui se substituent à eux pour réguler la circulation. Arrêtés en plein milieu des carrefours, sifflet en bouche, arrêtant des véhicules et laissant passer d’autres, le tout avec de grands gestes, cette nouvelle catégorie d’agent de la circulation s’est beaucoup développée après la crise postélectorale. Au carrefour Sainte Cécile, à la 7ème tranche, à l’entrée de la rue des jardins en venant du quartier Gobélé et à beaucoup d’autres endroits, ils sont visibles aux heures de pointe. Le seul hic, c’est que n’ayant pas la formation adéquate, ils créent parfois du désordre. Leur difficulté est que, n’ayant pas la tenue adaptée à cette activité, certains automobilistes ne respectent pas leurs injonctions de s’arrêter ou de circuler. N’empêche, ils continuent leur boulot surtout que, de temps en temps, on leur jette des pièces de monnaie qui, à la fin de la journée, peuvent constituer un bon petit pactole.
A côté de ces métiers pour le moins insolites, la pauvreté grandissante a fait que les Ivoiriens s’orientent désormais vers des métiers qu’ils n’exerçaient pas auparavant. Il s’agit notamment de la vente de viande de porc au four qui s’est fortement développée, la vente de friperie qui s’est répandue à tous les carrefours où il y a une forte affluence de piétons et d’automobilistes, les vendeurs ambulants (de produits qui curieusement sont toujours en promotion), etc.
En fait, cette situation n’est pas fortuite. Elle symbolise clairement la pauvreté dans laquelle les Ivoiriens vivent. Et, comme le nageur qui se noie, ils s’accrochent à tout ce qui peut leur assurer la pitance quotidienne. Car, à la vérité, la plupart de ces jeunes qui exercent ces métiers ne le font pas par amour, mais par obligation. Tant qu’il n’y a plus d’alternative.

Koné Modeste in Notre Voie

Wed, 17 Apr 2013 07:55:00 +0200

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