Ivoiriennes, Ivoiriens, chers Amis !
Les médias en notre pays, diffusés sous toutes les formes, nous fondent à penser que le sujet de société le plus important pour un pays, à savoir le tandem éducation/formation, demeure une priorité en Côte d’Ivoire, autant chez les politiques, la société civile que pour la population générale. L’urbanisation galopante y contribue pour l’essentiel, car dès que l’environnement devient ville, la première urgence, dès que l’on a trouvé un toit, est d’assurer garderies et écoles pour les tout petits.
Nous sommes encore loin de la couverture des besoins en écoles, classes et enseignants à 100%, objectif atteignable et à atteindre absolument, avant que de prétendre un jour voir notre pays s’inviter à la cour des grands de ce monde ;
C’est un fait que la croissance de notre population, en interne, et en prenant en compte l’afflux d’immigration des pays frères de la sous région Ouest africaine qui ne faiblit pas, condamne pratiquement tous nos programmes d’investissement dans le social ( éducation, santé, logement, transport/mobilité, création d’emplois, etc…) à être dépassés dès leur entrée en exploitation.
Mais la Côte d’Ivoire l’accepte et assume. Mettons la barre toujours plus haut !
Dans l’urgence, et actualité obligeant, nous ne pouvons que nous permettre d’inviter le gouvernement de Côte d’Ivoire à être plus attentif aux conditions de vie et d’exercice de tous les enseignants ; ils ne constituent certes pas une confrérie à part, à privilégier par rapport aux autres ; mais, puisque ce sont nos enfants et le futur de la Côte d’Ivoire qui sont en jeu, que toute leur tutelle veille à ce qu’ils ne soient jamais gagnés par le sentiment d’être de vulgaires cinquièmes roue de carrosse !
Nous allons ce jour revenir sur un phénomène que la rentrée scolaire a révélé à l’attention de tous. Il s’agit des volontés de nombreux pays et puissances, soucieux de se hisser encore plus haut au niveau mondial, et qui nous prodiguent aide et assistance, toujours bienvenues dans le domaine de l’éducation de nos enfants et jeunes ; mais, ils les assortissent subtilement d’une invitation à apprendre leur langue nationale à eux !
La Côte d’Ivoire sera certainement la prochaine cité de Babbel, tant l’on a vu les partenaires internationaux à l’aide à l’éducation/formation créer des cadres agréables, où les jeunes Ivoiriens, souvent les meilleurs des différentes promotions, pourront apprendre et s’exprimer avec excellence en espagnol, allemand, néerlandais, grec, italien, le turc, le portugais, russe, sanskrit de l’Inde, mandarin de Chine, etc, etc.
Les autorités politiques en notre pays, et les parents en général, semblent considérer cela comme un légitime accompagnement, une juste cerise sur le gâteau, et n’y prêtent pas d’attention particulière.
C’est à se demander si, encore aujourd’hui, en 2024, soit plus de 60 ans après que la Côte d’Ivoire ait été admise à la souveraineté internationale des nations, les Ivoiriens ont seulement commencé à se demander ce qu’est un État, une nation, ce que représentent des armoiries, un drapeau national, avec son hymne, etc. ?
Nos athlètes footballeurs seront ils condamnés à toujours l’emporter, en compétition, pour que le orange/blanc/vert nous réunisse et rassemble pour 2 ou 3 semaines, même si nous ne savons pas ce qu’il contient et induit ?
Toutes les grandes et moyennes puissances de ce monde, qui anticipent la fin de la domination des États-Unis d’Amérique sur l’ensemble du monde, installée depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale, en 1945, savent, qu’en plus de travailler dur à leur développement économique interne, il est nécessaire de s’assurer économiquement, diplomatiquement et militairement, comme un prolongement de leur espace territorial propre, par des alliances dynamiques avec certains pays, principalement producteurs de matières premières.
Ces états du tiers échelon sont condamnés à se lier à une puissance tutélaire de substitution, qui, elle-même, sera membre de l’une des super alliances d’États en formation.
Aller embarquer dans la nacelle du BRICS ne suffit pas s’il n’y a pas 2 ou 3 pays africains, sud américains ou asiatiques, un peu connus, qui se reconnaissent votre arrière cour.
Mais, alors, pourquoi la Côte d’Ivoire, pays à fort potentiel de l’espace ouest africain, ne devrait elle pas voir ou miser haut, pour demain, et compter sur le trésor de richesse humaine que lui constitue sa jeunesse éduquée et entreprenante, pour être à la tête d’un grand pool, et compter enfin elle-même dans une ou deux décennies ?
Nos ministres en charge de l’éducation, de la formation et de la culture brillent dans des cérémonies où les pays cités plus haut s’invitent en intervenants vers notre jeunesse, proposent toujours un savoir-faire à partager avec nous, et terminent par l’apprentissage de leur langue, à eux, chez nous.
Mais avant que de nous parler de leur excellente langue, savent ils qu’en Côte d’Ivoire, il y en a des dizaines ? Ignorent ils qu’en dehors du français, langue nationale officielle, chaque adulte de notre pays comprend et parle aux moins deux des ces vocables que le colonisateur, qui voulait leur disparition, qualifia de << dialecte >> ou << parler vernaculaire >> ?
Les états généraux de notre éducation/formation et de nos cultures/civilisations ont jusqu’à ce jour évité de prendre le taureau par les cornes en proposant que le français du colonisateur et de la francophonie voisine avec les dizaines de langues et vocables du pays.
Le véritable fond de ce problème, pour la normale et légitime solution duquel les décideurs en notre pays se sont toujours montrés hésitants et frileux, est qu’au prétexte du grand nombre de parlers en notre pays, le français s’impose non seulement comme langue officielle et la plus “vernacularisée”, puisque choisir ou privilégier une ou deux des langues du pays pourrait susciter refus, résistance sinon même troubles à l’ordre public.
Dans tous les grands pays, il y a une langue du cru, parlée et pratiquée de tous, et qui est l’officielle enseignée dans les écoles ; mais il y a des dizaines de parlers et dialectes que chaque groupe locuteur a le devoir de sauvegarder, comme part de son patrimoine identitaire particulier ou spécifique.
N’oublions pas que le << français >> n’a été que la résultante de la longue évolution de nombreuses langues et parlers en interconnection, et que c’est la langue de l’Ile de France, le terroir autour de Paris. L’on peut encore en 2024 recenser près de 45 langues régionales et dialectes ou parlers sur le territoire de la France, et c’est une volonté politique, une décision souveraine, qui en fit la langue nationale.
Les langues les plus couramment pratiquées en Côte d’Ivoire sont : le français, le Dioula et le Baoulé.
Si, entre 1946 et 1977, le Président Houphouet Boigny, qui en avait le poids et l’autorité morale, avait institué que le Malinké ou Dioula du Nord, le Baoulé/Akan du centre, et du sud, soient enseignés à l’école primaire, nous aurions aujourd’hui tous les adultes Ivoiriens qui seraient trilingues, dans les bureaux, dans les rues comme sur les marchés et places publiques.
Et c’est bien le Français qui se débattrait avec le fameux Nouchi, qui monte irrésistiblement en ampleur, comme langue de communion générationelle et panafricaine, et dont la première place se profilera dans une trentaine d’années.
Le moment est venu, en Côte d’Ivoire, que la grande décision qui s’impose soit prise. Que le Dioula et le Baoulé soient imposés à l’école, et que cela rejaillisse dans l’espace audiovisuel. Tous les grands pays sont passés par là !
Sinon, en l’an 3000, la Côte d’Ivoire sera l’un des rares pays d’Afrique Noire où les élèves se chercheront des ancêtres gaulois.
Ceux de France les auront depuis longtemps laissés en route puisqu’ils pratiqueront une mixture de Verlan et de néo-anglicisme réservée aux initiés !
Que la Côte d’Ivoire ne subisse pas son avenir ! Qu’elle s’en empare et le formate au fil de ses grandes ambitions !
Fait à Abidjan, le 6 novembre 2024
Le Ministre Kobena I ANAKY
Président du MFA
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