Le pharaon, roi-dieu de l’Égypte ancienne, et le pape, chef spirituel du christianisme, incarnent des médiateurs du divin. Par ailleurs, l’étude attentive des symboles, des rituels et de la mythologie révèle que le christianisme a emprunté nombre d’éléments à la civilisation égyptienne, en ce qui concerne les fonctions du pape, les rites religieux ou même les grandes figures de la foi.
Des autorités spirituelles suprêmes
Le pharaon était à la fois souverain politique et chef religieux, considéré comme un dieu vivant, fils de Rê, incarnation d’Horus. Le pape, lui, est le Vicaire du Christ, représentant de Dieu sur Terre. Tous deux concentrent en leur personne le pouvoir terrestre et céleste, et agissent comme intermédiaires entre les hommes et le monde divin. En effet, cette fusion du pouvoir politique et spirituel, déjà centrale dans la tradition égyptienne, se retrouve dans l’Église catholique, qui fait du pape un lien direct entre Dieu et les hommes.
Emprunts liturgiques et symboliques
De nombreux éléments rituels et symboliques du christianisme ont leur origine dans la civilisation égyptienne. Par exemple, l’onction sacrée, utilisée lors des sacres, des baptêmes et d’autres rites chrétiens, découle des pratiques égyptiennes de consécration des pharaons, qui recouraient également à des huiles saintes pour marquer leur élévation spirituelle et politique. De même, l’accoutrement du pape, comprenant la mitre, le bâton pastoral, le pallium et l’anneau, reprend les codes visuels associés au pharaon, tels que la double couronne (pschent), le némès rayé, ainsi que la houlette et le fléau, symboles de son autorité divine. Enfin, l’utilisation de l’encens, des chants liturgiques, des processions et des sanctuaires sacrés dans le christianisme trouve également des parallèles dans les rituels des cultes d’Osiris ou d’Amon-Rê, où ces éléments étaient utilisés pour établir un lien avec le divin et sanctifier les lieux de culte. En outre, le récit de la passion d’Osiris, où ce dieu bienveillant est trahi, assassiné et ressuscité, rappelle, par sa structure, la passion du Christ, qui a souffert, a été crucifié et a triomphé de la mort pour apporter le salut. Ce parallèle entre la passion d’Osiris et celle du Christ renforce l’idée d’une adaptation des thèmes spirituels de l’Égypte antique.
Le symbolisme de la croix et de la vie éternelle
La croix Ankh, symbole de la vie éternelle, est omniprésente dans la spiritualité égyptienne. Le christianisme adopte la croix de Jésus comme symbole central de la mort, de la résurrection et du salut. Cette continuité du « passage vers l’éternité » constitue une réinterprétation de l’héritage égyptien.
Des récits mythologiques étonnamment proches
Dans la mythologie égyptienne, les parallèles les plus éloquents avec le christianisme apparaissent notamment dans l’histoire de la triade Isis-Osiris-Horus, qui présente des points communs étonnants avec le récit chrétien de Marie, Dieu et Jésus. Osiris, dieu miséricordieux, est assassiné par son frère Seth. Cependant, il ressuscite grâce à l’intervention magique d’Isis, sa femme et sœur, qui redonne vie à son corps, effectue une union mystique avec lui et met au monde Horus. Isis utilisa les pouvoirs d’Osiris pour enfanter Horus, afin que celui-ci venge son père et rétablisse l’ordre. Horus, fils d’un dieu et d’une femme divine, devient le protecteur du peuple, le vainqueur du mal, et est appelé à régner après avoir triomphé de Seth. Cette histoire partage des analogies frappantes avec certains éléments clés du récit chrétien, où l’on retrouve un père divin, une mère pure et consacrée et un fils sauveur. De plus, comme dans la naissance divine d’Horus sans union charnelle, la naissance de Jésus est aussi marquée par une conception miraculeuse.
Le thème de la lutte contre le mal est également commun aux deux traditions. À l’instar d’Horus triomphant de Seth, Jésus, par sa résurrection après sa crucifixion, triomphe de Satan et du mal, annonçant ainsi l’établissement d’un nouveau règne spirituel. Tant dans l’Égypte antique que dans le christianisme, ces récits véhiculent un même message de victoire sur les forces du mal.
Ces ressemblances ne sont pas une simple coïncidence. À l’époque de la naissance du christianisme, le culte d’Isis était encore largement pratiqué dans tout le bassin méditerranéen, y compris à Rome. Les représentations d’Isis allaitant Horus ont sans aucun doute influencé l’iconographie chrétienne de Marie et Jésus. De fait, ces emprunts ont facilité une transition culturelle en douceur entre la religion égyptienne et le christianisme.
Une même promesse de résurrection
La vie après la mort, au cœur de la religion égyptienne, se retrouve pleinement dans la foi chrétienne. En Égypte, le pharaon espère rejoindre Osiris dans l’au-delà après un jugement basé sur la pureté de son cœur. De même, dans le christianisme, la résurrection du Christ ouvre la voie au salut éternel des croyants, eux aussi jugés selon leur foi et leurs œuvres. Le parallèle entre le Jugement d’Osiris et le Jugement Dernier est frappant.
Un héritage spirituel manifeste
Le christianisme ne s’est pas construit dans un vide. Il s’est développé dans un monde imprégné de traditions religieuses grecques, juives, orientales, mais surtout égyptiennes. Qu’il s’agisse des symboles, des vêtements liturgiques, des rituels ou des récits fondateurs, l’empreinte de l’Égypte antique est bien présente, et les emprunts sont nombreux. Ainsi, le pape, chef suprême de l’Église catholique, perpétue un modèle de pouvoir spirituel dont les racines plongent jusqu’au temps des pharaons.
Axel Illary