Côte d’Ivoire : Et si l’opposition avait raison !

Un palmarès dont ne peut se réjouir aucun Ivoirien, encore moins le pouvoir Ouattara. Le régime ivoirien, depuis son avènement en avril 2011, est accusé par l’opposition d’exactions sur les proches de l’ex-président Laurent Gbagbo.

Des dénonciations qui ont amené des Organisations non gouvernementales à braquer leurs projecteurs sur la Côte d’Ivoire durant l’année 2012. Conséquences, plusieurs rapports de Human Right Watch Amnesty International et bien d’autres ont conclu qu’il y a des violations des droits de l’homme en Côte d’Ivoire. La réaction du gouvernement face à ses accusations est allée du déni à une reconnaissance partielle des faits qui lui sont reprochés. Une façon de dire que, malgré lui, que l’opposition avait raison.

Au nombre des crimes, le cas de la destruction du camp de réfugiés de Nahibly à Duékoué, suivie de la tuerie de plusieurs personnes, a été très frappant en 2012. Officiellement 11 tués là où l’opposition parle de plus d’une centaine de morts, tout en ne présentant seulement qu’une liste de quelques dizaines de personnes qui auraient été enlevées, tuées et cachées. Mais plus tard, des corps en putréfaction seront extraits de deux puits. Ils viennent jeter le doute sur les chiffres avancés par le gouvernement.

En attendant les autopsies, l’on avance que ces corps sont des victimes de l’attaque du camp de Nahibly par la population malinké appuyée de dozos et de FRCI. Jusqu’à ce jour, presque six mois après, malgré la volonté exprimée par le Président Ouattara et son engagement devant le peuple ivoirien, en particulier les Wê, et la communauté internationale, de faire la lumière sur ce drame et de punir tous ses auteurs, les enquêtes n’ont donné aucun résultat. Personne n’a été culpabilisé ni arrêté.

Pour l’opposition, c’est parce que les tueurs sont des partisans de Ouattara que le Président veut protéger, et les tués, des pro-Gbagbo qui mériteraient d’être exterminés. Vrai ou faux ? Apparemment vrai. Car bien après ces faits, de nombreuses enquêtes pour assassinat ou pour tentatives de déstabilisation du pays ont lieu. Plusieurs personnes ont été arrêtées, jugées et écopent de peine allant de quelques mois à quinze ans de prison. En grande partie des pro-Gbagbo. Ce qui fait dire que le pouvoir s’adonne à une justice des vainqueurs, même si ce dernier dit ignorer ce que ce terme veut bien signifier. Les ambassadeurs ont interpellé le Président Oauattara sur le problème du respect des droits de l’homme, même des prisonniers, au cours de la cérémonie de présentation de voeux.

On croyait la mort sauvage derrière qu’elle nous a effroyablement frappés, aux premières de l’année nouvelle, pendant que les Ivoiriens dans les lieux de prières louaient et remerciaient Dieu, ou dans les maquis célébraient la naissance de 2013 autour des tables garnies de boissons. 63 personnes tuées en quelques minutes dans une bousculade au Plateau. Partant pour admirer la beauté des feux d’artifices, elles ignoraient qu’elles avaient pris rendez avec "les feux de la mort". Un bien début d’année malheureuse illustrée d’autre part par la hausse inattendue du prix des hydrocarbures, quelques jours après ce drame.

72 heures soit trois jours, c’est le temps record que le gouvernement ivoirien a accordé aux enquêteurs pour faire la lumière sur cette tragédie. Bien entendu parce que c’est lui, en tant qu’organisateur des feux d’artifices, le responsable de la présence de cette population à cet endroit. Les Ivoiriens s’attendaient donc à être situés sur les raisons et les auteurs de ce malheur qui a plongé la Côte d’Ivoire dans un deuil national de trois jours. La réponse à leurs questionnements, ils l’ont depuis le samedi 5 janvier de la bouche du procureur de la République Simplice Kouadio.

Selon lui, c’est le rétrécissement de la voie à cause de la présence d’une clôture en tôle, de la présence de tronc d’arbres, d’un déficit d’éclairage public et du manque de force de l’ordre sur les lieux du drame qui ont favorisé l’incident. Si le dernier point ne peut se mesurer qu’avec l’oeil du spécialiste qu’il est, les trois premières raisons laissent à désirer. Car pourrait-on se poser ces questions : Quand est-ce que la clôture a été bâtie ? A quel moment les troncs d’arbres se sont-ils retrouvés sur la chaussée et depuis quand l’éclairage public fait défaut ? Les organisateurs n’avaient-ils pas vu ces obstacles ?

A la vérité, cela fait des mois que ladite clôture existe, et que, comme dans plusieurs endroits d’Abidjan à l’instar de la route internationale de Port Bouët Bassam, l’éclairage public ne fonctionne pas. D’aucuns se sont demandés pourquoi ne pas alimenter ces réseaux électriques au lieu de dépenser des millions de francs pour des enseignes lumineuses éphémères, qui du reste, puisent son énergie du réseau d’éclairage public.

Les questions encore à élucider après le rapport du procureur semblent donner raison à l’opposition qui, très tôt, accusait le pouvoir de n’avoir pas pris les mesures appropriées dans la sécurisation de la population. Le Front Populaire Ivoirien (FPI) est allé jusqu’à demander la démission du ministre Hamed Bakayoko. Car, à considérer que les causes étaient là bien longtemps avant l’organisation de ces feux d’artifices, les coupables ne peuvent pas être le propriétaire de la clôture, ni la Compagnie Ivoirienne d’Electricité, ni ceux qui ont jonché la rue de troncs d’arbres.

En clair, les vrais responsables sont du côté du comité d’organisation de festivités de lumières, qui visiblement n’ont pas arrêté les mesures idoines qu’il fallait. D’autant plus que c’est le gouvernement qui a la gestion des forces de sécurité. Donc s’il y a déficit de policiers, c’est encore sa faute. Même s’il est vrai que le FPI, qui a géré les déchets toxiques et bien d’autres scandales de la façon qu’on connaît, n’est bien placé pour demander la démission d’Hamed Bakayoko, car derrière ce souhait se cache vraisemblablement un dessein inavoué, on comprend mal l’attitude du Rassemblement des Républicains, le parti au pouvoir.

Le RDR s’est fait l’avocat du ministre en indiquant que le FPI n’est pas un exemple en matière de démission. Le ministre Bakayoko lui également a affirmé que "dans ce pays, le FPI n’a pas de leçon à donner à personne" et que "la démission ne règle pas le problème" de la bousculade. Alors question: qui donnera l’exemple si le RDR, "le parti de la démocratie" veut faire pareil que le FPI, "le parti de la dictature", selon les tenants du pouvoir? A savoir protéger, les yeux fermés ses militants, lui qui veut changer la Côte d’Ivoire pour en faire un pays émergent à l’horizon 2020. Si le régime actuel avait critiqué les errements du FPI, il doit montrer les signes d’un parti moderne à la démocratie occidentale.

En attendant, espérons que la suite des enquêtes nous en dira davantage sur les responsabilités de chacun. A ce stade, il serait bien que l’enquête sur l’attaque du camp de Nahibly livre également ses résultats dans les premières semaines de ce mois. Car le Président Alassane Ouattara l’a rappelé dans son message de nouvel: "Je suis le Président de tous les Ivoiriens".

Par César DJEDJE MEL in linfodrome.com

Mon, 07 Jan 2013 19:20:00 +0100

0

Laisser un commentaire

Nous utilisons des cookies afin de vous offrir la meilleure expérience possible sur notre site Web. En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez notre utilisation des cookies.
Accepter
Refuser
Privacy Policy