Instabilité chronique: Qui attaque l’Ouest ?

Cela passe pour être désormais un fait banal. Que des coups de feu se font entendre ou qu’une bombe explose à l’Ouest, fait partie du quotidien des habitants de cette zone de la Côte d’Ivoire.
Entre coupeurs de route, attaques armées pour des questions foncières, affrontements sur fond de règlements de compte politique, les victimes se comptent tous les jours à l’Ouest. La dernière attaque intervenue le vendredi 08 juin 2012 et qui a fait plusieurs morts, dont des casques bleus de l’ONUCI et des soldats des FRCI, vient rappeler que cette zone a besoin d’un traitement de choc.

A commencer par rechercher les auteurs des attaques et les raisons qui motivent leur forfait. Des questions dont les réponses peuvent être multiples. Il faut déjà rappeler que seulement 48 heures avant l’attaque meurtrière du vendredi, l’ONG internationale de défense des droits de l’Homme, Human Rights Watch (HRW), dans son dernier rapport en date du 6 juin 2012, avait clairement accusé les forces fidèles à l’ex-président ivoirien, Laurent Gbagbo, d’être les auteurs des attaques perpétrées dans l’Ouest, ce depuis un an.

Il s’agirait, selon cette ONG, de combattants libériens et ivoiriens (des miliciens qui foisonnaient à l’Ouest, ndlr), retranchés à l’Est du Liberia, dans les comtés de Grand Gedeh, River Ge et Maryland, qui ont pris part à la sanglante guerre post-électorale en Côte d’Ivoire, aux côtés des forces fidèles à Laurent Gbagbo. On se souvient en effet que pendant ce conflit, précisément la bataille d’Abidjan, de nombreux mercenaires libériens avaient été aperçus dans la commune de Yopougon, l’un des bastions de l’ex-président ivoirien.

Avec pour slogan : « No Gbagbo, no peace », les exploits au combat de ces « chiens de guerre » libériens et des miliciens qui appuyaient les ex-forces de défense et de sécurité (FDS), se racontaient comme des légendes. Sur le chemin de leur fuite après la prise de Yopougon par les FRCI, ces combattants libériens et les miliciens ont pour la plupart trouvé refuge dans les forêts qui bordent la bande frontalière ouest, ne pouvant ni entrer au Liberia où ils n’étaient pas les bienvenus, ni retourner en Côte d’Ivoire où ils étaient activement recherchés.

Selon le rapport de HRW, on devrait regarder du côté de ces combattants pro-Gbagbo pour rechercher les auteurs de ces attaques.

Les guerres libérienne et sierra-léonaise

Il faut également tourner le regard ailleurs pour voir ceux qui sèment la mort à l’Ouest. Au cours d’une interview qu’il a accordée récemment à notre journal, l’ancien Premier ministre guinéen, Lansana Kouyaté avait fait une analyse de l’instabilité à l’Ouest. Pour lui, en effet, « il y a une armée de mercenaires qui combat de pays en pays, et tant qu’on n’aura pas neutralisé cette armée, il faut s’attendre à l’instabilité chronique dans la Sous-région ».

L’ancien président ivoirien, Laurent Gbagbo, avait d’ailleurs fait le même diagnostic concernant le mal de l’Ouest. Il avait en effet, dénoncé l’errance des anciens combattants désœuvrés des guerres civiles du Liberia et de la Sierra Léone, comme le facteur des troubles à l’Ouest. Ces mercenaires bon marché, prêt à servir toutes les causes, pourvu qu’ils soient payés en conséquence. Faut-il le rappeler, les conflits armés qui ont dévasté le Libéria et la Sierra Léone, ont déversé dans la nature, de nombreux « chiens de guerre ».

Sans emplois ni ressources et devant assurer leur pitance quotidienne, ces anciens combattants ont très souvent recours aux armes pour faire face à leurs besoins. Retranchés dans les forêts, ils en sortent de temps à autre pour des incursions dans des villages environnants. Ils tuent, pillent et retournent dans leur tanière. Il faudrait aussi chercher les auteurs des attaques répétées parmi ces anciens guerriers en manque d’activité.

L’un des problèmes qui peut tout aussi expliquer l’insécurité à l’Ouest, reste sans nul doute la question foncière. Les conflits sur la terre entre les autochtones Guéré, Yacouba et les allogènes Malinké et Burkinabé, sont souvent à l’origine des tueries. Les premiers estimant que leurs terres leur ont été arrachées par les ‘’ étrangers ‘’, multiplient les actions pour les récupérer. Les seconds, eux, se battent pour garder les terres qu’ils disent avoir acquis de dur labeur et qu’on veut leur arracher. Qui a tort, qui a raison ? En attendant de savoir, les attaques continuent à l’Ouest, avec leur lot de morts.

Hamadou ZIAO in L’Inter

Mon, 11 Jun 2012 02:32:00 +0200

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