La réconciliation nationale d’accord, mais pour quoi faire?

Au pays Bété, un adage dit qu’entre frères, il n’y a pas de règlement de conflit. Parce que la fratrie n’est pas mutable. On peut avoir un bon frère ou un mauvais frère, mais jamais d’ancien frère. La fratrie s’impose à chaque membre de la famille, on ne choisit pas son frère. Certes, il y a différentes catégories de fratries, mais l’élément commun entre toutes, est l’impossibilité de rompre le lien de la fraternité. Même si des frères ne s’aiment pas, ils sont obligés de vivre ensemble. Ainsi donc, entre les Ivoiriens, il y a ce lien indéfectible qu’on appelle Côte d’Ivoire. Tant que nous serons tous liés par ce pays, nous serons comme la bouche renfermant la langue et les dents. Elles peuvent se mélanger, se blesser, mais elles sont condamnées à vivre ensemble dans la même bouche. Alors une fois pour toutes, il faut rompre le contrat à durée déterminée du gouverneur Banny. S’il a peur du chômage, on peut toujours lui trouver une autre occupation, mais qu’il arrête d’endormir et d’ennuyer les Ivoiriens.
Son histoire de manque de moyens financiers est un faux problème, car si tel était le cas, même Alassane Dramane Ouattara, un Ivoirien de circonstance (et non authentique), aurait résolu ce problème depuis longtemps. Par ailleurs, il faut déjà qu’ADO et lui soient d’accord sur la nature de la réconciliation dont ils ont besoin ! En bon Baoulé (Akan), Banny veut réconcilier des cœurs meurtris, au même moment, ADO veut une réconciliation de vengeance et de haine distillée ; ça ne peut pas marcher… Tu veux manger dans le même plat avec ton frère et tu massacres sa progéniture ! Comment sera-t-il d’accord avec toi ? La réconciliation nationale est-elle une obligation ? Si oui, pour qui l’est-elle ? Le peuple, les gouvernants ou pour la communauté internationale ?
Ce que nous voyons dans notre pays actuellement, c’est le tissage de la toile de Pénélope. Le parti républicain et ses dirigeants puent la haine des autres Ivoiriens, alors ils font du sur-place. Ils déconstruisent au quotidien ce que le gouverneur Banny construit chaque jour. Si seulement cet homme pouvait dans un sursaut d’orgueil crier son indignation haut et fort et jeter l’éponge, peut-être qu’Alassane Ouattara comprendrait qu’il demande une chose et son contraire à la fois. Si Banny pouvait, (toute honte bue) comprendre que son entreprise prend l’eau de toutes parts, il y renoncerait et alors, Alassane Ouattara nommerait quelqu’un du RDR qui partage la même vision que lui.
M. Banny évoque une insuffisance de moyens financiers, est-ce pour indemniser un préjudice ? Mais lequel ? Parce qu’il y a plusieurs sortes de préjudice (corporel, moral et matériel) : Le premier comprend les décès, les atteintes corporelles et les pretium doloris. Le second concerne les troubles dans les conditions d’existence et autres, le troisième étant matériel. Vu sous cet angle, cinq ans ne suffiront pas à mettre les Ivoiriens d’accord. Par ailleurs, si c’est pour imiter les Sud-Africains, il faut savoir que l’Histoire dans ces deux pays est dissemblable…
A notre humble avis, Houphouët-Boigny a commis l’erreur d’ouvrir les frontières de notre pays à n’importe qui. Aujourd’hui, notre problème est qu’on n’arrive plus à gérer nos immigrés de deuxième génération. Dans notre pays, les étrangers ne connaissent pas leur place. Alassane Dramane Ouattara, après avoir fait longtemps du vagabondage de nationalité, (Séplou Laurent Gbagbo) s’est vu des dons de messie venu du Burkina-Faso pour diriger notre pays. Il est donc normal que depuis son accession au pouvoir (avec la complicité de M. Konan Bédié), que des Burkinabés veuillent chasser les Wês de leurs villages et des terres ancestrales. Le ministre de l’artisanat qui se sait un vrai Guinéen, menace des gens à Man à l’occasion des élections législatives. Or, tout le monde sait bien que le père du ministre venu de sa Guinée natale, s’est fixé à Man ; allez comprendre quelque chose dans tout ça ? Les gens oublient très souvent et très vite d’où ils sont venus. La terre n’est pas élastique, donc elle ne peut pas évoluer au gré du gonflement de la population. La seconde erreur d’Houphouët-Boigny a été d’avoir minimisé le problème foncier. Il avait en son temps, osé dire que la terre appartient à celui qui la met en valeur. Or, la terre appartient à son propriétaire, elle n’est pas un bien marchand. Elle peut se prêter, mais ne se vend pas. Aussi longtemps qu’on n’aura pas mis dehors tous les étrangers qui pullulent dans les forêts de l’Ouest et ce depuis 1960, on déplacera d’inévitables conflits fonciers sans jamais les résoudre. Alors ils reprendront au plus prochain changement de gouvernants.
Par ailleurs, nos parents Wês ont été trop naïfs pour croire que des gens qui n’ont rien à manger chez eux, puissent venir cultiver toute leur vie durant, des terres pour les beaux yeux de ceux qui n’en connaissent pas l’utilité ! Souvent, malgré les problèmes soulevés çà et là, il y a des gens qui vendent pour une bouchée de pain, la terre qui ne leur appartient pas. Ces gens pensent-ils que leurs parents ne connaissaient pas l’argent au même titre qu’eux ? Ou bien, pensent-ils qu’ils n’avaient pas de problèmes financiers ? Au lieu de penser à leur postérité, ils préfèrent pour des broutilles, vendre les biens de la communauté villageoise toute entière. Or les étrangers ne sont pas dupes. Dès qu’ils ont payé le prix convenu, ils font borner les parcelles achetées. Au pire des cas, ils y mettent de la culture pérenne ; histoire d’éviter la répétition des sommes d’argent perçues.
C’est douloureux voire cruel, mais la seule façon de pacifier l’Ouest et la zone forestière en général pour de bon, est au pire des cas, détruire ces plantations ouvertes sur des terres affectées à la communauté villageoise pour sa subsistance. Sinon, dans le meilleur des cas, l’Etat se portera acquéreur et alors se chargera d’indemniser le malheureux acheteur. Après la crise de Duékoué, que chacun rentre déjà dans sa région, qu’on soit Ivoirien ou non. Repartons sur de bonnes bases.
Le miracle de M. Banny n’aura pas lieu, il faut donc prendre le taureau par les cornes. Une fois que les indésirables rentrés chez eux, mais bien indemnisés, alors la paix reviendra. La population augmente fréquemment, et nous ne sommes plus à l’ère houphouétien où la superficie de la Côte d’Ivoire était à 80% inexploitée. Il faut donc réparer les erreurs d’Houphouët-Boigny, mais aussi et surtout, celles de nos parents vendeurs de terres dont ils ne sont pas les vrais propriétaires. A fortiori, ceux qui n’ont aucun droit et se sont installés par la force doivent absolument partir. Ce qui est sûr, c’est que tous les étrangers et allochtones quitteront de gré ou de force, cette zone de turbulence ; parce que les décennies prochaines seront celles du retour à la terre pour l’agriculture post-moderne… Chacun revendiquera son lopin coutumier de terre. A bon entendeur salut !

Louis-Freddy Aguisso

Sun, 22 Jul 2012 04:38:00 +0200

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