Liquidation de la succession d’Houphouët-Boigny: Une héritière abreuvée de mensonges

L’héritage d’Houphouët-Boigny, premier président de la Côte d’Ivoire fait, encore couler beaucoup d’encres et de salives depuis la disparition de ce dernier en decembre 1993.
L’omerta et le mystère qui l’entourent témoignent de l’hypersensibilité d’un dossier qui divise jusqu’à ce jour ces héritiers et dérange jusqu’au plus haut sommet de l’Etat ivoirien. Une affaire que l’on croyait définitivement close, et qui vient d’être remise au goût du jour par le séjour en Côte d’Ivoire du 6 au 13 mai dernier de l’Avocate de Marie-Hélène Houphouet Boigny Abla Pokou, Me Isabelle Coutant-Peyre. Un sejour pendant lequel, elle s’est entretenue avec le ministre Marcel Amon Tanoh, directeur de cabinet du Chef de l’Etat et Philippe Serey Eiffel, conseiller du président Alassane Ouattara au sujet de la question.
Pour la petite l’histoire, c’est en 1994, juste après le décès de l’ancien président que la convoitise latente sur sa colossale fortune estimée à plusieurs centaines de milliards de Fcfa disséminés à travers le monde, notamment en France et en Suisse, débouche sur une lutte fratricide entre ses héritiers d’une part et entre ces derniers et certaines personnalités du pays qui avaient en charge des affaires du Bélier de Yamoussoukro.

Le combat des « Petits béliers » de «YaKro»

Marie Hélène Houphouet Boigny, une des six enfants du «vieux», s’estimant lésée dans le partage du «gâteau » familial par ses autres frères et soeurs, Augustin (aujourd’hui décédé), François, Guillaume et Marie N’dri Kan de Messé Zinsou, tous issus de la même génitrice Kadine Racine Sow, a décidé de saisir la justice pour reclamer la part d’héritage qui lui revient. Elle leur reproche de se proclamer seuls héritiers et par conséquent de se tailler la part du lion sur la colossale fortune du ‘’vieux’’. En effet, en 1995, ces derniers entament une procédure auprès du tribunal de Bouaké en sa section de Toumodi pour se faire reconnaître comme seuls héritiers légaux. Au détriment d’Hélène, d’un garçon adopté en Angola et d’une autre soeur naturelle.
Le 27 juillet 2000, le tribunal de Bouaké écarte cette dernière de la succession mais confirme Hélène et son frère adoptif comme cohéritiers. Maître Agueh-Tahou Monique, notaire à Abidjan fut alors mandatée pour régler la question du partage de l’héritage, dans les six mois. « Depuis, aucune nouvelle, j’ai touché 133 146 euros qui m’ont été présentés comme ma quote-part sur les avoirs bancaires de mon père», affirmait Hélène Houphouet dans un magazine français du 15 janvier 2009.
Loin de baisser les bras, celle-ci exige l’inventaire de tous les biens de son père afin d’avoir une idée nette de ce dont elle a droit. Parce que, estime-t-elle, les biens de son père sont bien au delà de ce qui a été déclaré comme tel. Ce à quoi Me Cheickna Sylla, le notaire qui s’est occupé du dossier jusqu’en 2000, rétorque dans les colonnes du même journal qu’il s’agit d’un « Pur fantasme. Ce qu’il faut comprendre, c’est que le défunt avait réglé sa succession bien avant son décès. Le peu d’actifs connus ont été traités conformément à la loi». Hélène Houphouet Boigny se tourne alors vers le fisc français et de ‘’pur fantasme’’, il n’en est rien lorsqu’elle découvre en 2000 toute l’immensité de la fortune de son défunt père.

Une fortune vertigineuse loin d’être un «pur fantasme»
Comme seuls en ont le secret les Chefs d’Etat sous nos tropiques, le vieux Houphouet n’a pas dérogé à la règle en amassant une fortune vertigineuse impossible à chiffrer. Et au nombre des biens listés par le trésor public français qui avoisineraient les 20 millions d’euros, deux pavillons et six appartements ont été vendus dans les quatre mois précédant la mort d’Houphouët-Boigny. Le superbe Hôtel, rue masseran dans le 7e arrondissement au coeur de Paris est tombé dans l’escarcelle de l’Etat de Côte d’Ivoire après son décès. En l’absence de testament, il a été décidé que Felix Houphouet-Boigny avait effectué un legs verbal en faveur de l’Etat de Côte d’Ivoire qui pouvait s’emparer de 25% de l’héritage. Selon Hélène Houphouët-Boigny «La Côte d’Ivoire en a profité pour mettre la main» sur ce magnifique hôtel particulier de 3 000 mètres carrés au milieu d’un parc arboré de 8 500 mètres carrés, rue Masseran, dans le 7e arrondissement, acheté au baron Rothschild.
En juin 2008, l’Etat ivoirien en a vendu le mobilier aux enchères à Fontainebleau pour 7,5 millions d’euros. En tout, une centaine d’objets d’art parmi lesquels un Renoir cédé pour 1,5 million d’euros, six fauteuils et un canapé Louis XVI pour 450 000 euros, une tenture ayant appartenu à Marie-Antoinette et des béliers en or massif aux yeux d’émeraude. L’ambassadeur de Côte d’Ivoire à Paris à cette époque avait affirmé que Félix Houphouët-Boigny a fait don à son pays de l’hôtel Masseran avant de mourir. Avant de préciser que : «L’argent de la vente va servir à rénover cette propriété qui sera la résidence du président Gbagbo à Paris». Y a-t-il servi?
Bien malin qui pourra l’affirmer. Hélène Houphouët-Boigny découvre par ailleurs des comptes de feu son père à la SIB toujours détenus et gérés par son frère Guillaume Houphouët-Boigny. UBS, (l’Union des banques Suisses) détiendrait toujours deux comptes appartenant au « père de la Nation » et qui n’ont pas enregistré de mouvements inférieurs ou égaux à 100.000 francs Suisses. La fille de feu Houphouët Boigny se rend aussi compte de l’existence de biens en Amérique, en Angleterre, au Maroc, au Sénégal… Des sociétés comme S.I. Picalpoc, S.I. Grand Air, Intercafo, S.I. La Glaneuse…, font partie du patrimoine. Il y a aussi des comptes dans les banques suivantes : Rotschild Bank (Zurich), United Overseas Bank (Génève), B.N.P (Paris), Crédit Lyonnais Montparnasse.
Sans omettre ses 17 villas dans la ville de Yamoussokro ainsi que certaines sociétés qui seraient gérées en tant que prête-nom d’Houphouët par des personnalités proches du défunt président, dont M. Abdoulaye Diallo et l’actuelle première dame de Côte d’Ivoire, Dominique Ouattara. Selon Hélène, l’actuelle première dame aurait géré des biens immobiliers de son père à travers une société du nom de « AICI » devenue plus tard « AICI SA » et à qui elle demande de produire depuis des années la liste de ces biens. En vain!
L’agence « A.I.C.I. S.A. », interpellée à deux reprises à travers des sommations interpellatives n’aurait jamais donné d’informations quant à la gestion des biens immobiliers de Feu son Père le Président Félix Houphouët-Boigny jusqu’à ce jour. Elle a aussi interpellé à travers différents courriers les différents chefs d’Etat ivoiriens afin que toute la lumière soit faite autour des actifs successoraux de son défunt père, mais apparemment personne ne veut s’étendre sur cette affaire. Et le recent sejour de son avocat, Me Coutant ne fait que reveiller une affaire qui dérange la République de Côte d’Ivoire et autour de laquelle l’ombre semble prospérer plus que la lumière. Mais Hélène Houphouët-Boigny peut dormir tranquille à présent. Avec Ouattara installé au Palais présidentiel, les choses vont bouger… Parce que notre président ne supporte pas l’injustice.

CARELL BOHOUI in L’Éléphant Déchaîné

Wed, 30 May 2012 22:57:00 +0200

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