Mali: L’école soumise à la charia au Nord Mali

Le Nord Mali est revenu au Moyen âge depuis qu’il est tombé aux mains des islamistes armés de l’Ansar Dine et que la rébellion touarègue de tendance laïque du Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA) a été évincée en juillet dernier. La charia ou loi islamique s’applique dans toute sa rigueur.
Les flagellations publiques à l’encontre de ceux qui refusent de s’incliner se multiplient. Les mains des voleurs sont coupées. L’horreur absolue a été atteinte le 29 juillet quand un couple non marié parent de deux jeunes enfants dont un de six mois a été lapidé, devant un public contraint d’y assister.
En quelques semaines tout a changé dans la région, le domaine de l’éducation dont on parle moins est pourtant l’un des premiers visés par la loi islamiste qui touche en priorité les filles. Les nouvelles réglementations poussent des milliers d’élèves à quitter les écoles et même les universités. 5000 d’entre eux auraient déjà fui le nord pour être scolarisés à Bamako ou dans les villes du sud du pays.
« Le 7 mai, Ansar Dine et son allié, Al Qaida au Maghreb islamique, ont rouvert les écoles de Tombouctou et de Gao, mais les élèves ont entamé un nouveau système [d’apprentissage] dont ils n’avaient pas connaissance avant l’occupation de la région », explique au site d’informations des Nations unies, Irin, le directeur de l’enseignement de Tombouctou, Abou Bacri Cissé.
« Des codes vestimentaires ont été mis en place, la mixité a été abolie et les matières considérées comme susceptibles de favoriser l’« infidélité » ont été rayées du programme ». Selon un instituteur de Tombouctou toujours cité par Irin, les islamistes « terrorisent les enfants » avec leurs nouvelles lois. « Ils ont instauré leur propre programme, avec de nouvelles matières comme l’enseignement de l’islam et des séances de prière collective qu’ils dirigent eux-mêmes ».
La non mixité est donc en passe de devenir la règle. A Tombouctou les garçon ont cours le matin et les filles, contraintes de porter une robe couvrant tout le corps, l’après midi. A Gao, ville occupée par le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujeo), elles n’ont plus droit d’assister au cours qu’assises au fond de la salle de classe. Une enseignante de la ville raconte même que les filles sont en train de déserter l’école. Elle n’a dans ses cours de français plus que 3 filles au lieu de 19 au début de l’année.
« La charia doit être appliquée, que les gens le veuillent ou non. Nous veillerons à ce qu’elle soit respectée. Nous ne demandons l’avis de personne. Nous ne sommes pas des démocrates. Nous sommes des serviteurs d’Allah, qui ordonne la charia », défend Sanda Ould Boumama, porte-parole d’Ansar Dine à Tombouctou.
Un début de résistance semble toutefois s’organiser. Outre les parents qui refusent d’envoyer leurs enfants dans les écoles réformées, les jeunes manifestent contre les pratiques barbares d’un autre temps, comme on l’a vu à Gao le 4 août quand ils ont empêché l’amputation de la main d’un voleur présumé. Les érudits religieux montent aussi au créneau et « réfutent les visées extrémistes de la charia », note le site de l’Association de défense des Touaregs, Tamoudré.
« L’approche violente adoptée au Mali va également à l’encontre de l’histoire de l’Islam qui s’est répandu progressivement, en tenant compte de la mentalité des sociétés, et n’a pas commencé en appliquant des lois punitives”, précise Haddim Ould Salek, imam de la mosquée Abbas de Nouakchott en Mauritanie, cité par le site Magharebia.
Quand au gouvernement de Bamako, il a condamné avec la plus grande sévérité « ces pratiques d’un âge révolu et assure que cet acte ne restera pas impuni.”, a indiqué le ministère de la Communication d’un un communiqué pour dénoncer la lapidation. Reste qu’il est lui-même empêtré dans ses propres problèmes et contradictions. Sans parler de son incapacité à gérer la crise qui sévit dans la région.
A ce sujet, l’Association Cri du cœur de Bamako a lancé une pétition en ligne pour soutenir les habitants du Nord Mali.

Par Anne Collet – Carlson pour Afrique Monde

Thu, 16 Aug 2012 17:48:00 +0200

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