Quand Venance Konan se trompe de cible

Depuis l’éjection du Président Laurent Gbagbo par les forces coalisées Forces Nouvelles (exrébellion)-Onuci-Licorne le 11 avril 2011, on assiste de plus en plus à un triomphalisme outrancier de la part de bon nombre de journalistes proches de M. Alassane Dramane Ouattara.
Longtemps reléguée au rang de simples «caquetage de journalistes» à cause de la haine véhiculée, la presse proche du pouvoir actuel connaît aujourd’hui par la force des choses un traitement de faveur. Auréolé des avantages du pouvoir construit sur du sable mouvant, les journalistes cautionnés par le RHDP (Rassemblement des Houphouëtistes pour la Paix) et du régime Ouattara peuvent tout se permettre. Rien ne leur résiste, ils peuvent tout dire sans en être inquiétés. Ce qui n’est pas le cas de leurs confrères de l’opposition. Ayant le vent en poupe, certains de ces journalistes veulent noyer le poisson dans l’eau.
Venance Konan, l’un des journalistes ivoiriens sur lequel l’Afrique comptait a fait une sortie de route dans le quotidien ‘’Le Nouveau Réveil’’. En mission, il veut décourager les sympathisants de Gbagbo en prêchant l’évangile selon saint Ouattara. En substance, il disait aux pro-Gbagbo de cesser de rêver, de tourner la page Gbagbo et que le bonheur se trouve dans la dictature, les enlèvements, les séquestrations, le rattrapage ethnique du pouvoir en place. Nous voulons lui dire qu’il est difficile d’oublier une personne qu’on aime et qu’on arrache à notre affection; qu’il nous permette de rêver car le rêve est consubstantiel à la vie humaine. Et puis, aussi dramatique que soit la situation, on ne fait que l’aggraver en perdant espoir. Son mentor Ouattara, quelle que soit sa puissance, ne peut ôter le rêve à un pro-Gbagbo. La seule chose que sa puissance du moment peut lui permettre de faire, c’est de lui ôter la vie.
D’ailleurs, c’est ce qui se passe tous les jours avec ses milices, supplétifs FRCI et dozo. Le silence coupable de Venance Konan sur les agissements d’un autre âge de ces milices nous inquiète. Lui et ses pairs, notamment Tiburce Koffi, ont vilipendé le Président Laurent Gbagbo dans une littérature, comme ils savent si bien le faire, pour démontrer la dictature et l’incompétence de ce dernier. Aujourd’hui les médias d’Etat sont inaccessibles à l’opposition. M. Ouattara gouverne en despote au vu et au su de tous, la paupérisation est grandissante, on nous oblige à payer des universités privées pour nos enfants, les parents dans les campagnes souffrent. Bref, il y a de la matière pour Venance Konan pour écrire que de s’intéresser à nos lamentations. Les pro-Gbagbo lui sont reconnaissants pour cette marque d’attention.
Seulement, ils lui disent ceci: «Nous sommes gbagboïstes et nous sommes fiers de nous glorifier de ce nom ; nous sommes fiers de l’esprit Gbagbo qui nous éclaire.» Nous ne pouvons pas oublier Gbagbo. L’esprit Gbagbo a déjà conquis le coeur de beaucoup d’Ivoiriens. Sait-on jamais, son tour viendra. Tu sais, mon cher Venance, «en politique, le vrai et le mensonge portent le même pagne», selon Ahmadou Kourouma.
Nous te comprenons, tu fais de la politique et la politique a fait de toi ce que tu es. Nous sommes heureux pour toi. Nous devons être des rêveurs, c’est parce que vous avez rêvé de voir Ouattara devenir président qu’il est président aujourd’hui et vous avez utilisé tous les moyens pour qu’il le soit. Le rêve est donc permis. Si une personne rêve d’une chose, cela peut être une utopie. Mais si plusieurs personnes rêvent de la même chose, cela peut être une réalité. Et c’est en cela que notre rêve de voir Gbagbo revenir se concrétisera. En plus, selon les lois de la nature, «il ne t’est jamais donné un désir sans que te soit donné le pouvoir de le rendre réalité.» Il y a une chose à laquelle nous devons attacher de la valeur : la vérité et l’honnêteté.
Tout ce qui n’est pas vérité et honnêteté est voué à l’échec. La Côte d’Ivoire se trouve dans le tourbillon de la haine. Nous devons oeuvrer pour la sortir de là car il n’y a pas de défi dans la vie qui soit trop difficile à relever. Il y a eu d’abord l’alliance RDR-FPI, ensuite RDR-PDCI, il reste enfin et inéluctablement l’alliance FPI-PDCI pour boucler la boucle afin de vider les rancoeurs et ramener la Côte d’Ivoire à un niveau convivial. Venance Konan, tu as déjà joué ta partition avant et pendant les élections présidentielles. Aujourd’hui, tu es le directeur général de Fraternité matin, un journal pro-gouvernemental, donc à un niveau de responsabilité.
Un journaliste de ta trempe doit se mettre au-dessus de la mêlée (…). Ton rôle maintenant, après les élections présidentielles entachées d’irrégularités dont tu es l’un des bénéficiaires, est de consoler les présumés vaincus, de panser les plaies, de tenir des discours rassembleurs et non de blesser des plaies en cicatrisation. La roue de la vie tourne et continuera de tourner, ça n’arrive pas qu’aux autres. Lorsqu’on veut abattre un baobab, il faut penser aux conséquences des dégâts qu’il pourrait engendrer dans son sillage, dit l’adage. Aujourd’hui, ce sont les pro-Gbagbo qui sont malmenés pendant ce temps les autres rient. Que nous réserve demain? Ne refuse pas de voir le soleil en plein jour. Nous sommes tous à la merci des hommes politiques. Ce n’est que par notre intelligence qu’on arrivera à se défaire d’eux. Retiens ceci: quiconque se fie aux Occidentaux voue sa vie à la mort.
Tu viens d’écrire un livre sur M. Edem Kodjo intitulé, je crois bien, «Un homme, un destin». Cet ancien secrétaire général de l’ex-OUA (Organisation de l’Unité Africaine) est pour toi un personnage mythique. Lors de la dédicace de ton ouvrage, il a pourtant dit qu’il n’est pas un «héros» mais plutôt un «héraut» de l’Afrique. C’est un message fort qu’il lance à l’endroit des hommes d’opinion. Tout dernièrement, sur RFI, au cours d’un débat sur les interventions intempestives des anciennes puissances dans leurs anciennes colonies, il a également fait cette déclaration : «Il faut laisser les évolutions internes se faire sans intervention extérieure», fin de citation.
Ici en Côte d’Ivoire, on applaudit les actions dévastatrices de la France sarkozienne et de l’ONUCI. Le régime Ouattara humilie et torture les pro-Gbagbo et les dignitaires de l’ancien régime. Que dit le journaliste émérite, l’écrivain, l’éveilleur de conscience Venance Konan?

Johnbaya Christian-d’Agathe

Mon, 09 Jul 2012 03:52:00 +0200

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