
La clause secrète de 1961 ressuscitée
En avouant que la France s’opposera à toute velléité de déstabilisation du régime Ouattara et qu’elle participera activement à la formation de la nouvelle armée ivoirienne, le Premier ministre dévoile que la Françafrique n’est pas morte. Elle est si vivante que cet engagement de Paris constitue la résurgence du curieux l’accord de défense entre la Côte d’Ivoire et la France signé en avril 1961 dont une clause secrète prévoyait la protection du pouvoir Houphouët-Boigny par la France, en retour Paris exploitait en priorité exclusive les richesses minières et minéralogiques de la Côte d’Ivoire. Pendant plus de 30 ans, c’est ainsi que les choses se sont passées jusqu’à la mort d’Houphouët. 18 ans après la disparition d’Houphouët, la Françafrique revient au galop en Côte d’Ivoire et la clause secrète est ressuscitée. L’accord de défense que la France n’avait pas voulu activer sous Bédié (lors du coup d’Etat de décembre 1999) puis sous Gbagbo (alors que le pouvoir ivoirien faisait face à une rébellion armée ayant pour base arrière le Burkina Faso) est évoqué aujourd’hui par Paris avec le régime Ouattara. La France est même en lobbying au Ghana, a-t-on appris, pour ne pas le pays du Président Atta Mills serve de base arrière à une attaque armée contre le régime Ouattara. Ce que Paris n’avait pas fait pour Bédié ni Gbagbo auprès du Burkina Faso. La France avait même soutenu les rebelles.
Paris paie le salaire des fonctionnaires ivoiriens
Bédié et Gbagbo n’ont pas bénéficié de l’assistance de la France parce le premier et sa famille s’étaient posés en concurrents des multinationales françaises sur le marché ivoirien ; et le second prônait l’indépendance économique assortie de la diversification des partenaires économiques de la Côte d’Ivoire. Un crime de lèse-majesté pour la France. Ouattara, quant à lui, a montré dès 1991, ses « bonnes intentions françafricaines » en privatisation des senteurs entiers de l’économie ivoirienne au profit de la France. Paris a vu, très tôt, en Ouattara, son pion. L’ayant aidé à accéder au pouvoir en avril dernier, Paris trouve normal de le prendre par la main. D’où cette autre gaffe faite, le 15 juillet dernier, par le Premier ministre français lorsqu’il affirme que « c’est la France qui a payé les salaires des fonctionnaires ivoiriens ». Il s’agit de propos bien humiliants pour le chef de l’Etat, Alassane Dramane Ouattara. Qui avait pourtant promis dès sa prise de pouvoir qu’il payerait les salaires des fonctionnaires. Nulle part, il n’a dit que c’est la France qu’il payerait ces salaires.
En faisant une telle déclaration, M. Fillon a mis assurément le chef de l’Etat ivoirien dans une posture pas reluisante aux yeux de l’opinion ivoirienne.
L’affaire Eva Joly
Autre gaffe émanant du Premier ministre français, la réponse de François Fillon, vendredi dernier, à l’écologiste française, Eva Joly, en présence du chef de l’Etat ivoirien, Alassane Dramane Ouattara, à Abidjan. Réagissant aux propos de Mme Joly qui s’opposait au défilé militaire du 14 juillet en France, il a soutenu qu’elle n’a pas « une culture très ancienne de la tradition, de l’histoire et des valeurs françaises ». Ces propos jugés vexatoires ont suscité une polémique dans l’hexagone. Perçus de Côte d’Ivoire, ces propos sont gênants d’autant qu’Eva Joly est d’origine norvégienne. Attaquer ainsi une Française d’origine étrangère alors qu’on se trouve en Côte d’Ivoire où on a adoubé un chef d’Etat à qui une bonne partie de l’opinion ivoirienne attribue, à tort ou à raison, une origine voltaïque (voltaïque), constitue un mauvais pas diplomatique.
Didier Depry in Notre Voie
Mon, 18 Jul 2011 11:50:00 +0200
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