Sylvain Miaka Ouretto, Président par intérim du FPI: “Si Gbagbo est libéré, la réconciliation va passer comme lettre à la poste”

Notre Voie : Monsieur le président, vous avez lancé un appel au pouvoir à l’occasion de l’hommage aux prisonniers libérés. Quel sens donnez-vous à cet appel?

Sylvain Miaka Ouretto : J’ai voulu que les choses soient dites une bonne fois pour toutes et de façon claire. Nous ne devons pas continuer à jouer au jeu de quilles, à savoir : ‘’je t’envoie la balle, tu me la renvoies’’.
Nous rentrons d’une tournée et je puis affirmer de manière objective et sans faux-fuyant que toutes les personnalités françaises, qui ont accepté de nous ouvrir leurs portes, ont demandé au Fpi de rentrer dans le jeu politique. A chacune de ces personnalités, que nous saluons encore une fois, nous avons répondu que le Fpi n’est jamais sorti du jeu politique en Côte d’Ivoire. Et nous sommes d’autant plus à l’aise pour le dire qu’il y a un cas de jurisprudence. Rappelez-vous. Laurent Gbagbo, qui se trouve aujourd’hui à la Haye, avait donné l’exemple.

NV : Comment ?

S.M.O : Lorsque Gbagbo a accédé au pouvoir en octobre 2000, dès 2001, il a organisé le Forum national de la réconciliation. Il a fait venir Henri Konan Bédié et Alassane Ouattara qui étaient à cette époque exilés en France. Pour donner toutes les chances de succès au forum, Laurent Gbagbo a envoyé les principaux leaders politiques en Afrique du Sud pour qu’ils s’inspirent de l’exemple de réconciliation de ce pays. J’y étais au titre du Fpi et Alassane Ouattara y était au titre du RDR. Bernard Ehui, pour le compte du Pdci. Et devant nous, des personnalités de marque d’Afrique du Sud, à commencer par le président Frederik De Klerk et Monseigneur Desmond Tutu, ont fait des exposés. Et ce qui est revenu de façon récurrente, c’est que quand on va à la réconciliation, on renonce à un peu de soi. Cela veut dire qu’il faut mettre de côté son orgueil, son amour propre et ne privilégier que l’intérêt national.

N.V : Et vous pensez que le forum s’est bien passé?

S.M.O : Tout le monde a été témoin de ce qui s’est passé. Bédié était là. Gbagbo a tout mis en œuvre pour qu’il rentre au pays. Il a fait de même pour Alassane Ouattara. Même Guéi Robert, qui s’était replié chez lui à Kabacouma, est rentré à Abidjan. Chacun s’est exprimé librement dans une sorte de catharsis. Et au sortir de là, on s’est dit qu’on était réconcilié. Mieux, Laurent Gbagbo n’a pas attendu le forum pour mettre en place un premier gouvernement de large ouverture en tendant la main à tous ses frères pour qu’ils travaillent ensemble parce que c’est en conjuguant nos efforts que nous arriverons à relever les défis de notre pays. Au plan économique aussi, Laurent Gbagbo a pris des mesures courageuses.

N.V : Quelles sont ces mesures ?

S.M.O : Ces mesures, c’est la première fois en Afrique et même dans le monde qu’elles étaient prises. Vous vous souvenez qu’en 1999, la Côte d’Ivoire était au ban de la communauté financière internationale, suite au scandale de la gestion de 18 milliards de l’Union européenne dans le secteur de la santé. Le pays était isolé. Les ponts étaient coupés entre nous, le FMI et la Banque mondiale. Laurent Gbagbo a donc décidé de recruter les principaux dirigeants des régies financières par appel à candidature. C’était une grande première dans l’histoire politique des nations. Un cabinet privé a été commis qui a eu pour mission de recruter les directeurs généraux des impôts, de la douane et du trésor. Au terme de cet appel, ce sont trois cadres du Pdci qui ont été recrutés. Feh Kessé aux impôts, Gnamien Konan à la douane et Charles Diby au trésor. L’Etat n’a fait qu’élaborer un cahier des charges indiquant aux différents responsables que le pays doit vivre en comptant sur ses propres ressources et en considérant le concours extérieur comme un appui. C’est ce qui a permis de mettre en place ce que feu le ministre Paul Antoine Bohoun Bouabré a appelé le budget sécurisé. Et la Côte d’Ivoire s’en est sortie à bon compte en dépit du fait que le pays était divisé en deux, une grande partie étant occupée par la rébellion qui levait des impôts et percevait des taxes pendant que ses animateurs étaient payés sur le budget national établi à partir des recettes fournies par une moitié du pays.
Laurent Gbagbo aurait bien pu positionner ses seuls partisans dans la gestion du pays. Il ne l’a pas fait. Il a associé tout le monde comme je viens de l’expliquer. Je crois que ce sont des choses que nous perdons souvent de vue. C’est un acte majeur dans la conduite des affaires de l’Etat. Quand, face à cela, on voit d’autres attitudes qui tendent à montrer que les responsables ne pensent qu’à leur clan, nous disons que c’est regrettable.

N.V : Vous avez appelé Alassane Ouattara à faire en sorte que son frère Laurent Gbagbo revienne au pays. N’est-ce pas une façon de prêcher dans le désert puisque le pouvoir estime que le cas Laurent Gbagbo n’est plus de son ressort ?

S.M.O : Je trouve que cette façon de voir est malheureuse. Je considère même que c’est une fuite en avant. Parce que c’est le président Alassane Ouattara qui a écrit aux responsables de la CPI pour leur livrer le président Laurent Gbagbo. Et tout le monde sait comment il a été traité et transféré. Le même chef d’Etat peut écrire pour demander, au nom de la réconciliation, que son frère lui soit ramené. Il peut le faire. On nous oppose chaque fois l’Etat de droit, la justice… On voit tous que la justice brandie par les tenants du pouvoir a montré ses limites. On voit aussi que l’Etat de droit a montré ses limites. Car, pour parler d’Etat de droit la justice doit être impartiale. On applique strictement les règles de droit. On ne les applique pas de manière partisane comme on le voit en Côte d’Ivoire presqu’au quotidien.

N.V : Que voulez-vous dire ?

S.M.O : Je veux dire que la Côte d’Ivoire vit une crise depuis la nuit du 18 au 19 septembre 2002. Il y a eu des morts. Ceux qui ont causé ces morts, qui ont fait du tort aux Ivoiriens, chacun les connait. Beaucoup sont là qui ont eu de la promotion. Si on prétend appliquer la justice, pourquoi n’y a-t-il pas cette volonté que ceux-là soient traduits devant la CPI ? Pourquoi Laurent Gbagbo et certains de ses partisans sont-ils les seuls accusés d’avoir commis des crimes de sang dans la période post-électorale ? Que fait-on des crimes commis avant par la rébellion ? Dans quelle catégorie range-t-on les crimes des forces pro-Ouattara en mars 2011 à Duékoué ?…Tout le monde voit bien que l’application stricto-sensu de la justice pose un problème à Alassane Ouattara. Donc, quand c’est comme ça, il faut recourir à une solution politique. Que le président Ouattara recoure donc à une solution politique pour faire revenir son frère et je dis bien son frère parce que Laurent Gbagbo est son frère. Qu’il fasse donc un effort pour libérer tous les prisonniers, à commencer par son frère Laurent Gbagbo. Il y a des choses qu’on ne peut pas dire sur la place publique. Lorsque nous nous sommes retrouvés en Afrique du Sud, le président Ouattara et moi avons discuté. Il le sait très bien. Quand il parle de Gbagbo, il l’appelle Laurent. Il disait mon ami Laurent. C’est cet ami-là qui est en prison à La Haye. Nous lui demandons de faire des efforts pour faire sortir son ami. Il y a quelque chose qui choque l’éthique et la morale. Laurent Gbagbo ne peut pas être à La Haye et sa femme déposée à Odienné. Si on inversait la situation, ça m’étonnerait que Laurent Gbagbo puisse maintenir Alassane Ouattara à La Haye et Dominique Ouattara quelque part dans une ville perdue de l’ouest. Dans tous les pays au monde, même là où on parle de justice et d’Etat de droit, on prend des mesures de nature politique au nom de la cohésion sociale.
Nous le disons très clairement. Si Laurent Gbagbo sort de prison, la réconciliation va passer comme lettre à la poste. C’est une vérité de Lapalisse. Pour aller définitivement à la paix, il faut que Laurent Gbagbo soit libre.

N.V : Avez-vous fait partager à vos interlocuteurs français cette vision ?

S.M.O : Nous l’avons fait partager partout où nous sommes passés. Que ce soit à l’Elysée ou au Quai d’Orsay, nous l’avons dit. Certains de nos interlocuteurs pensaient que c’était un problème de justice pure. Nous avons démontré avec les faits que continuer de voir la situation ivoirienne sous cet angle équivaut à une fuite en avant. Il y a la justice et les responsabilités qu’on assume au nom de la cohésion sociale. Et les Européens savent bien que leurs intérêts sont menacés s’il n’y a pas de cohésion sociale. Je suis économiste et l’économiste parle de risque-pays. Parce que dans un pays, qui vit de façon boiteuse parce que l’investisseur n’a pas la certitude que dans les deux mois à venir il n’y aura pas de violence, c’est difficile d’investir. Or, il faut que la Côte d’Ivoire sorte de cette mauvaise passe. Il faut que les investisseurs viennent, qu’ils soient mis en confiance. C’est pour cela que nous devons aller à la réconciliation et nous pensons que l’une des conditions sine qua non, c’est la libération de Laurent Gbagbo.

N.V : Vous avez promis d’écrire au chef de l’Etat pour engager le dialogue…

S.M.O : Exactement ! Nous disons qu’il faut que le président Alassane Ouattara invite son opposition et particulièrement le Fpi pour discuter. Et ne nous priverons pas de faire ampliation à tous les responsables français qui nous ont fait l’honneur de nous recevoir, à l’Elysée, au Quai d’Orsay et à l’assemblée nationale française.

N.V : Quel sera le contenu de cette lettre ?

S.M.O : Le contenu est simple. Pour nous, le jeu politique a des règles qui doivent être définies de façon consensuelle. La preuve, à l’occasion des dernières législatives où toutes les règles ont été définies dans notre dos, on a vu les résultats, quand nous avons pris nos responsabilités pour ne pas y participer. On a aujourd’hui une assemblée monocolore qui fonctionne de façon boiteuse. Parce que ceux qui sont élus ne sont pas sûrs de leur propre légitimité. Ils se demandent s’ils auraient été élus si le jeu avait été ouvert. Or, c’est ce qu’il faut éviter. Il faut une assemblée digne de la Côte d’Ivoire. Donc, il faut éviter ces déficits de légitimité et c’est quand les jeux sont clairement définis qu’on peut y arriver.
Le président Alassane Ouattara lui-même raconte partout qu’il nous tend la main mais qu’on refuse de la saisir. Comment peut-on tendre une main à quelqu’un avec un marteau dans l’autre cachée dans le dos pour lui casser la tête ? Nous disons que sur les questions essentielles de libération de nos camarades en prison à commencer par le président Laurent Gbagbo, le financement public des partis politiques, qui est une loi que Laurent Gbagbo a fait voter pour consolider la démocratie, la sécurité, la composition de la CEI…il faut apporter des solutions. Si rien n’est fait, nous ne voyons pas comment nous allons entrer dans le jeu. Aujourd’hui, tous nos hameaux, villages et villes sont occupés par des gens en armes qui n’ont pas le droit de les porter. Il y a des Frci, des dozos qui sont partout. Ce n’est pas normal. Pour aller aux élections, il faut que la preuve soit faite que les Frci sont rentrés en caserne, désarmés et que les dozos ont regagné leur lieu d’origine.
Nous allons même exiger que les élections soient sécurisées par les forces régulières que sont la police et la gendarmerie. La Côte d’Ivoire ne vient pas de naître. Notre pays a acquis son indépendance depuis 1960. Nous avons les forces armées nationales de Côte d’Ivoire. Les militaires, les policiers et les gendarmes sont formés. Ils apprennent le droit à l’école. Donc, ils savent comment assurer la sécurité des personnes et des biens. Nous allons donc exiger que ceux-là soient réhabilités pour assurer la sécurité des élections. C’est eux qui l’ont fait jusque-là et ils l’ont toujours bien fait. Nous n’allons pas laisser des gens qui, constatant que leur candidat est en perte de vitesse, sont prêts à prendre des machettes et des kalachnikovs pour contrecarrer celui qui est en avance, assurer la sécurité des élections. La question de la sécurité n’est donc pas une question de moindre importance.

NV : Est-ce que pendant votre tournée à l’extérieur, vos interlocuteurs ont pris des engagements pour amener le pouvoir à ouvrir véritablement le jeu électoral ?

S.M.O. : En tout cas, on ne peut pas vous dire que les gens ont fermé les oreilles sur nos justes exigences. Plus précisément à l’Elysée, et je voudrais en profiter pour remercier et saluer madame Hélène Legal qui est la collaboratrice du président François Hollande qui nous a reçus en compagnie de son collaborateur, Thomande Roméo. En tout, ils nous ont prêté une attention soutenue. Ils ont dit : « les questions que vous soulevez sont des questions de grande importance ».
Nous avons dit que Laurent Gbagbo avait une formule que tout le monde sait. Il a toujours dit que la démocratie n’est pas un effet de mode. Mais une voie de passage obligée si nous voulons que nos pays accèdent au développement. Car, tous les pays dit développés sont des pays démocratiques. Donc il faut aller à la démocratie avec tout son cœur en y mettant tous les moyens que cela exige. C’est pour cette raison qu’il a fait voter la loi sur la dépénalisation des délits de presse, parce que tout le monde sait que la presse est un élément incontournable en démocratie. Il faut permettre aux journalistes de travailler librement sans se sentir menacés pour avoir écrit ceci ou cela. C’est pour cela aussi qu’il a fait voter la loi sur le financement des partis politiques. Il estime que les activités politiques sont chères. Organiser un meeting politique commande qu’on ait des chaises, des bâches et une sono et il faut en plus un local. Si vous ne l’avez pas, il faut le louer. Et tout cela coûte cher.
La démocratie, c’est comme le marché. C’est quand il y a de la concurrence sur le marché que le consommateur peut se porter mieux parce que les prix peuvent baisser. La concurrence s’exerce par l’atomicité des marchés. C’est-à-dire que les acteurs qui sont sur le marché doivent être si nombreux qu’aucun n’ait la possibilité d’influencer les prix. Cela est aussi valable en politique. Plus les partis politiques sont nombreux plus il y a de projets de société offerts au choix des populations. Chaque parti se bat pour avoir le meilleur projet. Et c’est tant mieux pour ces populations. Alors, tant qu’on ne définit pas de règles consensuelles et on cherche à étouffer l’opposition, il n’y a pas de démocratie.

N.V. De la France, vous êtes allés à Dakar. Quelle était l’importance de l’étape de Dakar ?

S.M.O. : Nous voudrions d’abord profiter de vos colonnes pour remercier le président Macky Sall pour la grande disponibilité qu’il a manifestée à notre endroit. Parce que nous sommes arrivés à Dakar le 10 décembre à 21 h. Et les services du protocole d’Etat sont venus nous accueillir à l’aéroport. Nous avons été mis dans d’excellentes conditions. Ça veut dire que le président Macky a mis beaucoup de sérieux dans son invitation. Et déjà le lendemain, le président Macky Sall nous reçus à 9h du matin. Ensuite, il a mis en place un comité. Ce comité était composé de son ministre des affaires étrangères, du ministre d’Etat auprès du président de la République à savoir Abdoulaye Batili et il y avait aussi son conseiller spécial chargé des affaires diplomatiques. C’est ce comité qui a travaillé avec nous et qui a rendu compte au président de la République qui nous a reçus, à nouveau, le jeudi. Et le président Macky Sall a dit ceci : « le Sénégal et la Côte d’Ivoire sont des pays frères. Quand quelqu’un est enrhumé à Abidjan, il y a un qui tousse ici à Dakar. Donc j’estime que nous devons partager nos problèmes. Il n’y a pas de raison qu’il y ait des problèmes en Côte d’ivoire et que le président du Sénégal que je suis ne puisse pas s’impliquer dans la recherches de solutions. Je ne veux pas être médiateur comme l’a été le président Blaise Compaoré, mais je voudrais proposer ma facilitation à la recherche de solution à la crise en Côte d’Ivoire.» Nous avons donc discuté avec lui et nous avons senti des engagements et de la sincérité dans ses approches.

N.V. : Pouvez-vous expliquer dans quelle condition est intervenu ce déplacement à Dakar  ?

S.M.O. : Oh, vous savez dans la conduite des affaires politiques, il y a tous les paramètres qui interviennent. Vous ne pouvez pas savoir comment nous avons pu faire une mission en Suède par exemple. Nous avons dans le monde entier des représentants, des militants du Fpi qui prennent des initiatives. C’est donc l’une nos représentations qui a eu à prendre cette initiative et nous avons fait le retour à la base. Puisque nous avions une série de rendez-vous pour lesquels nous étions obligés de rester sur place en France. Quand nous avons été informés de l’invitation du président Maky Sall, nous avons constitué une délégation pour y aller. Et nous sommes heureux du résultat.

N.V. : Est-ce qu’il y a une suite à cette rencontre ?

S.M.O : Il va y avoir une suite, nous l’espérons. C’est une question de méthode de travail. Le président Macky Sall a arrêté une méthode de travail qui lui est propre. Il nous a remercié d’avoir répondu à son invitation et il nous a dit : « je poursuis le travail et quand le moment sera venu de vous consulter à nouveau, je vous ferez appel».

N.V. : Mais le constat est que c’est au retour de votre mission en France et au Sénégal que certains de vos camarades détenus ont été libérés. Est-ce qu’on peut dire que c’est le fruit de cette mission ?

S.M.O. : Cela est possible. Et si c’était le cas, nous ne pouvons qu’en être heureux. Mais je voudrais dire qu’aujourd’hui nous sommes dans une situation telle que chaque ivoirien doit se sentir interpellé par la situation qui prévaut chez nous. S’il y a des hommes politiques connus ou moins connus qui utilisent leurs relations personnelles, leurs entrées personnelles pour œuvrer à la libération et au retour d’exil de nos camarades qui souffrent, il faut saluer toutes ces personnes-là. Nous ne voulons pas nous approprier la paternité de l’acte qui vient d’être posé par la justice. Au contraire, nous voulons saluer toutes les actions visibles et invisibles qui travaillent à cela et encourager le gouvernement à aller dans ce sens. Parce que c’est ce que nous recherchons. Nous disons que huit personnes qui ont été libérées, c’est très bien, mais reconnaissons en même que c’est une goutte d’eau dans la mer. Il faut que le chef de l’Etat fasse l’effort de libérer tous ses frères qui souffrent encore en prison.

N.V. : Il y a certes les affaires nationales, mais il y a aussi les affaires du parti. L’évènement qui a retenu l’attention au niveau du FPI, c’est qu’il y a eu le remplacement de la représentante du parti en France, Brigitte Kuyo. Cela a suscité beaucoup de commentaires. Quelles étaient les raisons de cette décision ?

S.M.O. : Je pense que ce sont des choses qui ne doivent pas donner lieu à des polémiques. Vous vous souvenez qu’en avril dernier, nous avions tenu une convention. Cette convention très importante a mis la direction en mission. Elle nous a même demandé de renforcer les ressources humaines du parti. Un parti politique, au fur et à mesure qu’il avance, il y a de nouvelles exigences qui apparaissent. Et par rapport à ces nouvelles exigences, il faut de nouveaux hommes. Nous avons rendu un vibrant hommage à notre ancienne représentante Brigitte Kuyo. Nous l’avons saluée et salué tout le travail qu’elle a abattu. Mais nous avons dit qu’il nous faut de nouvelles stratégies et par rapport à cette nouvelle donne, il faut de nouveaux hommes. Mais cela ne veut pas dire qu’elle doit s’écarter des activités du parti et s’asseoir tranquillement. Elle doit apporter son expérience et son concours à sa sœur qui vient d’être nommée, Mme Adé Hortense. Je crois que cela a été compris. Nous n’avons pas remplacé Brigitte Kuyo parce que nous n’aimions pas sa tête. Non ! C’est une militante qui a apporté beaucoup au parti. En plus, c’est ma sœur. Tous les Ivoiriens de la diaspora et même tous les Africains de la diaspora sont des gens qui ont battu le pavé. Ils étaient par pluie, par soleil et par neige en train de crier et de se battre pour le président Gbagbo. Et ils continuent de le faire. Ils organisent de voyages à La Haye pour apporter un tant soit peu un peu de chaleur au président Gbagbo. Et Brigitte a été très active. C’est donc par simple souci d’efficacité que nous avons agi.

N.V. : Pour rester toujours dans le cadre du parti, depuis le dernier grand meeting du Fpi qui a été dispersé à Figayo à Yopougon, il n’a pas encore eu une activité majeure du parti sur la place publique. Les militants s’interrogent.

S.M.O. : Il faut rassurer les militants. En politique, il faut avancer en fonction des contraintes du moment. Il n’y a pas que par les meetings et par les marches qu’on atteint des objectifs majeurs. Pour le moment nous avons choisi la voie de diplomatie. Et c’est une voie qui va porter ses fruits croyez-moi. Et justement quand nous disons que nous allons écrire au président de la République pour définir ensemble les règles de jeu, c’est tous ces problèmes que nous allons évoquer dans le courrier. Les moyens de la démocratie, ce sont les meetings, les sit-in, les marches etc. Il faut donc que le président de la République fasse quelque chose pour garantir la tenue de toutes ces activités. Il faut peut-être même qu’il fasse une déclaration solennelle pour dire qu’à partir de telle date, les partis politiques sont libres de mener leurs activités conformément à la loi. Lorsqu’un meeting doit être organisé, on suit la procédure qu’exige la loi. Une fois que cela est fait il faut qu’on laisse le parti concerné mener ses activités. C’est cela la démocratie. Mais il faut se donner les moyens d’y arriver.

N.V. : Vous vous proposez donc d’écrire au chef de l’Etat. Et s’il vous ramène au cadre permanent de dialogue mis en place à Grand Bassam ?

S.M.O. : Ecoutez, nous ne sommes pas signataires du cadre permanent de dialogue. Je crois qu’on ne va pas revenir là-dessus de façon incessante. Le président de la république lui-même sait que nous n’avons pas été associés de manière pratique à la mise en place de ce cadre permanent de dialogue. Nous l’avions déjà signifié au Premier ministre Jeannot Ahoussou Kouadio. Cela ne date pas d’aujourd’hui. Il s’agit d’aller à la paix et à la réconciliation. Cela veut dire que l’intérêt qui est en jeu est majeur. Il s’agit de l’intérêt de la Côte d’Ivoire. Nous n’allons pas user de fuite en avant en se rejetant la balle. Si nous devrions discuter dans le cadre du cadre permanent du dialogue, les choses auraient avancé depuis longtemps. Parce que si nous, nous n’avons pas été signataires de ce cadre, il y a des partis qui en sont signataires. Mais où est le résultat de ce dialogue-là ?
C’est parce que la situation est bloquée que nous nous donnons les moyens d’aller là où on peut nous aider à débloquer la situation.

N.V. : Quel message à l’endroit des militants du FPI?

S.M.O. : D’abord il faut féliciter les militants. Il faut les féliciter pour avoir tenu. Il faut les féliciter pour leur engagement profond en faveur de la démocratie. Parce qu’avec ce que les uns et les autres ont vécu, ils auraient pu abandonner la lutte et même le Fpi comme beaucoup de nos adversaires le souhaitaient. Mais les militants ont tenu. Surtout nos jeunes avec à leur tête leur secrétaire national Koua Justin que je voudrais féliciter et remercier pour son engagement sans faille. Je voudrais également remercier et féliciter Marie-Odette Lorougnon qui a en charge l’organisation de nos femmes. Mais aussi toutes les autres structures d’activité.
Il faut donc remercier tous les militants où qu’ils soient et leur dire que leur travail est en train de porter ses fruits. Qu’ils prennent donc leur mal en patience et qu’ils restent toujours mobilisés, vigilants et tolérants. Parce que nous avons besoin d’être tolérants les uns envers les autres. Notre pays a beaucoup souffert. Beaucoup de sang a été versé. Il ne faut pas prendre la construction de la démocratie comme une course de vitesse, mais comme une course de fond. Il faut donner les moyens qu’il faut aux différents acteurs. Il ne faut pas être pressé au point de recourir à la violence. Je le répète solennellement, au Fpi, la non-violence est notre culture. C’est de façon consciente et délibérée que nous avons choisi la voie de la transition pacifique à la démocratie. Nous restons fidèles à cette voie et nous allons y arriver avec cette voie.

N.V. : Pour terminer, il y a eu ces temps-ci des attaques des positions des Frci et le pouvoir pointe le doigt vers le Fpi, qu’est-ce que vous avez à répondre ?

S.M.O. : Nous estimons que le pouvoir doit arrêter ça. Il faut que le régime Ouattara prenne des dispositions pour sécuriser les Ivoiriens et tous nos frères qui nous font l’honneur de vivre avec nous dans ce pays et de tous les investisseurs qui veulent venir investir ici. Il sait que les coups de force n’existent même pas dans l’esprit des dirigeants du Fpi. Et nous l’avons toujours dit. A aucun moment un responsable du Fpi n’a donné des ordres à qui que ça soit pour mener une quelconque action de déstabilisation. Je le répète cela ne fait pas partie de notre culture. Nous ne nous sentons pas concernés ni de près ni de loin par ces attaques. Il faut que le pouvoir cherche à l’intérieur de lui-même. Le pouvoir Ouattara sait qu’il est assis sur des braises. Il sait très bien qu’il y a des ambitions autour de lui. Il ne faut chercher des poux sur la tête ses autres. Au regard de sa gouvernance, il y a beaucoup de ses partisans qui sont frustrés. Ne serait-ce qu’au niveau de l’armée républicaine, il y a beaucoup de combattants à qui on avait promis d’être intégrés à l’armée qui ne sont pas intégrés. Qu’est-ce qui dit ce ne sont pas ceux qui manifestent leur déception ?
Il sait aussi que parmi ceux qui ont lutté pour qu’il soit au pouvoir, il y a un certain IB qui a été tué de manière tragique pendant la crise postélectorale. Qu’est-ce que dit aussi ce ne sont pas les partisans de IB qui sont disséminés un peut partout qui s’organisent pour prendre leur revanche ? Il y a donc toutes ces voies qu’il faut explorer. En tout cas le Fpi n’est pas concerné.

Interview réalisée par Augustin Kouyo et Boga Sivori
In Notre Voie

Tue, 08 Jan 2013 23:40:00 +0100

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