Côte d’Ivoire: Le nouveau Premier ministre peut-il rassembler les Ivoiriens?

D’après un scénario bien réglé d’avance, Jeannot Kouadio-Ahoussou est désormais le nouveau Premier ministre de Côte d’Ivoire.

Le président Alassane Ouattara l’a nommé par décret le 13 février, en remplacement de Guillaume Soro élu président de l’Assemblée nationale la veille même.

Cette redistribution des postes au sommet de l’Etat consacre l’arrivée à la Primature d’un membre du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) de l’ancien président Henri Konan Bédié. Elle répond ainsi à un engagement politique contracté par le Rassemblement des républicains (RDR) d’Alassane Ouattara auprès du PDCI dans le cadre de son soutien au second tour de la présidentielle du 28 novembre 2010.

Un proche d’Henri Konan Bédié

Le nouveau Premier ministre n’est pas un ancien baron du PDCI ou un apparatchik.

Secrétaire général adjoint, chargé des affaires juridiques du parti, il était déjà membre du gouvernement sortant au poste de ministre d’Etat, ministre de la Justice. Avocat d’affaires, Me Jeannot Ahoussou-Kouadio est un proche lieutenant et fidèle d’Henri Konan Bédié. Et il l’a démontré à l’occasion des négociations des accords de paix au plus fort de la crise ainsi que lors de l’élection présidentielle dont il a été un des protagonistes. Cela lui vaudra, du reste, son portefeuille de numéro deux et ministre de la Justice dans le précédent gouvernement depuis le 5 décembre 2010.

D’emblée, Jeannot Ahoussou-Kouadio a indiqué qu’il se considère comme un Premier ministre de la continuité afin de sortir la Côte d’Ivoire de la longue situation de crise qui n’a épargné aucune famille.

Peu après sa nomination, il a déclaré:

«tout est priorité, il y a l’insécurité, la hausse des prix des denrées de première nécessité, la corruption (…). Tous ces problèmes, nous en avons une lourde conscience, nous inscrivons cela dans notre programme de gouvernement».

L’homme qui peut faire taire les divisions?

Le nouveau Premier ministre ivoirien est entré en politique dans les années 1970. Il a été ainsi ministre de l’Industrie au début des années 2000 avant que la tentative de coup d’Etat du 19 septembre 2002 ne plonge le pays dans la guerre. Il a aussi dirigé la campagne du candidat Henri Konan Bédié lors du second tour de la présidentielle.

D’après certaines sources à Abidjan, Jeannot Ahoussou-Kouadio serait membre de la franc-maçonnerie et fréquenterait en qualité d’apprenti la Grande Loge Unie de Côte d’Ivoire (GLUCI).

Nombre d’Ivoiriens le considèrent comme quelqu’un d’assez intègre, de pondéré et de professionnel.

Mais cela ne semble pas être le cas pour les partisans de l’ancien président Laurent Gbagbo qui l’accusent, sans ambages, d’être à l’origine des arrestations des dirigeants du parti.

Alphonse Douati, un membre du Front populaire ivoirien (FPI) fondé par l’ex-président Laurent Gbagbo affirme:

«il a été à l’origine de l’arrestation de Pascal Affi N’Guessan (ndlr: président du FPI)… C’est encore lui qui a estimé que Michel Gbagbo (ndlr: franco-ivoirien) méritait la prison, parce qu’il était le fils de son père Laurent».

Et de conclure: «il est hors de question que le FPI participe à un quelconque gouvernement Ahoussou».

Dans ces conditions, on peut se demander ce que peut faire Jeannot Ahoussou-Kouadio pour réconcilier les Ivoiriens. Ce qui est une condition sine qua non pour que la Côte d’ivoire panse ses plaies durablement. Car la vie politique du pays semble dorénavant bipolaire et crispée entre la coalition au pouvoir et les tenants de l’ancien régime. Le départ de Guillaume Soro, porte-étendard de la rébellion ivoirienne, et l’arrivée de Jeannot Ahoussou-Kouadio du PDCI ne semble apparemment rien y faire.

100 jours pour convaincre

Beaucoup d’Ivoiriens veulent pourtant faire confiance à leur nouveau Premier ministre. Pour Joseph Soro, commerçant à Korhogo:

«il faut laisser un peu de temps au nouveau Premier ministre pour qu’il se mette à l’œuvre. C’est à l’œuvre qu’on reconnaît l’artisan. D’ici à la prochaine présidentielle au plus, les alliances ne seront plus les mêmes et la coalition au pouvoir actuellement devra en tenir compte dans sa gestion du pays. C’est pourquoi je pense que malgré les ressentiments partisans, le dialogue va continuer entre Ivoiriens jusqu’à un apaisement définitif».

En attendant, les Ivoiriens dans leur ensemble espèrent beaucoup du nouveau gouvernement de 35 membres qui a été formé en ce qui concerne l’amélioration de leurs conditions de vie. Eux qui sortent à peine d’une longue et difficile période de conflit qui leur a été imposée par des hommes politiques aux motivations inavouées.

L’avenir du régime du président Alassane Ouattara dépend, en effet, pour une large part de l’alternative au régime Gbagbo qu’il leur proposera au cours de son mandat. Un mandat pour lequel ses principaux alliés, Guillaume Soro et Henri Konan Bédié, seront tout aussi comptables.

Marcus Boni Teiga in slateafrique.com

Wed, 14 Mar 2012 21:43:00 +0100

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