La migration des patriarches (Abraham, Isaac, Jacob), l’épique sortie d’Egypte où le peuple juif avait été réduit en esclavage et la conquête de Canaan, la terre promise par Dieu, ont-elles réellement existé ? Depuis cinquante ans, les chercheurs confrontent la Bible aux découvertes les plus récentes et bouleversent ainsi des certitudes scientifiques ou théologiques établies depuis la nuit des temps. Ainsi, Zeev Herzog, professeur d’archéologie à l’université de Tel-Aviv, souligne qu'”aucune démarche scientifique ne prouve la réalité de cette sortie d’Égypte, des grandes années d’errance dans le désert et de la conquête de la Terre promise”.
Une telle couleuvre était déjà difficile à avaler par les milieux juifs ultra-orthodoxes, mais comment réagiront-ils à la lecture de la magistrale synthèse de deux archéologues israéliens, Israël Finkelstein et Neil Asher Silberman, qui vient de sortir en France, sous le titre La Bible dévoilée ? Il y a un an, aux Etats-Unis, leur livre avait été mis à l’index dans les milieux traditionalistes. Mais ce texte avait suscité le plus vif intérêt chez les juifs orthodoxes, libéraux et laïcs. Leur hypothèse de travail bouleverse les études bibliques.
Israël Finkelstein et Neil Asher Silberman n’ont en effet aucun doute sur l’inauthenticité des grands récits fondateurs. Pour eux, la Bible est une géniale reconstruction, littéraire et politique, de toute l’histoire du peuple juif, qui correspond à l’émergence du royaume de Juda (royaume israélite du Sud) comme puissance régionale au VIIe siècle avant Jésus-Christ. Une époque où le royaume d’Israël (royaume israélite du Nord), autrefois plus prestigieux que Juda, passe sous la coupe de l’Assyrie voisine et où l’empire assyrien amorce son déclin.