Le sort des huit Français enlevés dans la zone par des groupes islamistes reste un sujet crucial au moment où un otage français, détenu en Somalie depuis 2009, vient d’être tué, selon Paris, lors d’une opération des services d’espionnage français (DGSE) pour tenter de le libérer.
Avec l’intervention au Mali, "le risque pour la France est de perdre des hommes, et bien sûr les otages. Cela aurait un effet dévastateur", souligne Dominique Thomas, spécialiste des mouvements islamistes.
Un soldat français a d’ailleurs été tué lors d’un raid d’hélicoptère vendredi au Mali, selon le ministre de la Défense Jean-Yves le Drian.
A la manoeuvre diplomatique depuis des mois sur le dossier malien, tout en assurant qu’il n’engagerait pas de troupes au sol ni même de pilotes de bombardiers, Paris s’est décidé à entrer en action en raison d’une avancée vers le sud et Bamako des groupes qui contrôlent le nord du pays depuis l’été.
La France compte quelque 6.000 ressortissants dans la région de la capitale malienne.
Il fallait répondre à l’appel à l’aide d’un pays ami "qui se noie" selon les termes du chef de la diplomatie Laurent Fabius, en avançant que "pour la première fois des terroristes risquaient de mettre la main sur un Etat africain".
La dernière entrée en guerre de la France en Afrique remontait à 2011 avec une intervention aérienne en Libye combinée avec principalement les Etats-Unis et la Grande-Bretagne. Ces dernières semaines, Paris a refusé d’apporter son aide militaire au président centrafricain François Bozizé, qui fait face à une insurrection.
Pour le Mali, la France s’est engagée seule jusqu’à présent avec des moyens aériens – et peut-être terrestres – non précisés. Washington a indiqué étudier l’hypothèse de participer à l’opération avec des drones, des avions sans pilote pouvant être dotés de missiles et des avions ravitailleurs.
"Risque d’enlisement"
L’action française a fait l’objet de concertations, notamment avec l’Algérie réticente à voir Paris intervenir militairement dans son arrière-cour. Alger n’a toutefois pas commenté jusqu’à présent l’intervention française. Pour la justifier légalement, Paris met en avant l’article 51 de la charte de l’ONU qui mentionne "le droit de légitime défense, individuelle ou collective, dans le cas où un membre des Nations unies est l’objet d’une agression armée".
Pour l’ex-ministre socialiste de la Défense, Paul Quilès, il est toutefois "indispensable, de façon à éviter toute ambiguité, que le Conseil de sécurité donne un mandat explicite à la France". "Espérons que cette opération sera efficace", ajoute-t-il sur son blog en réclamant des précisions sur les buts de guerre: terrorisme, intégrité de l’Etat, protection des Français ou sort des otages.
Si l’entrée en action française a été saluée par les principaux partenaires occidentaux et africains de Paris, ses contours restent en effet flous. Arrêter la progression des islamistes ? Aller jusqu’à aider sur le terrain le Mali à reconquérir sa partie nord ?
Les militaires français ne seront "pas en première ligne" pour la phase de reconquête du nord, à la charge des forces maliennes et des troupes africaines de la Cédéao, a assuré vendredi Laurent Fabius.
Mais vu l’état de déliquescence de l’armée malienne, plusieurs experts sont dubitatifs, certains allant jusqu’à évoquer "un risque réel d’embourbement".
Dans un entretien ce week-end au Journal du Dimanche, un spécialiste du Sahel, Serge Michailoff, met en garde contre le "risque d’enlisement" et la difficulté d’une opération s’appuyant sur l’armée malienne, "autonomisée par rapport au pouvoir", et "le régime vermoulu" de Bamako.
Vendredi, le président français François Hollande s’est bien gardé de donner des paramètres précis sur l’intervention. Elle "durera le temps nécessaire", a-t-il seulement dit.
In lepoint
Sun, 13 Jan 2013 12:53:00 +0100
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