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    « Le franc CFA freine le développement de l’Afrique »

    ByLa Dépêche d'Abidjan

    Nov 20, 2021

    Le franc CFA est-il un frein au développement des pays africains qui l’utilisent ?

    La monnaie doit être au service de la croissance et du développement. Pour cela, il faut des crédits. Or le ratio crédit à l’économie sur PIB dans les pays de la zone franc est de 23 % quand il est de plus de 100 % dans la zone euro. [Si bien qu’il] est quasiment impossible pour nos pays de rattraper les économies émergentes si le franc CFA reste arrimé à l’euro. Ne faut-il pas envisager des régimes de change alternatifs un peu plus flexibles pour financer l’émergence ?

    Si cet arrimage était une garantie de stabilité monétaire dans la zone franc et qu’en contrepartie, ces pays avaient des taux de croissance relativement faibles, on pourrait considérer que l’arbitrage fait à la création du franc CFA en 1945, confirmé à la création de l’euro en 1999, a son sens. Mais on voit bien avec le cas de la Grèce qu’une économie faible qui a une monnaie forte engendre des ajustements très difficiles à soutenir. Comment pouvons-nous avoir un discours crédible sur l’émergence si nous ne touchons pas aux outils dont nous disposons ? Il faut revoir l’arrimage fixe du franc CFA à l’euro, si nous voulons développer nos économies.

    Quelle est votre solution, sortir de la zone franc ?

    Nous pouvons au moins procéder par étapes. Il faut remettre sur la table les objectifs des deux banques centrales d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale ainsi que leur capacité à financer la croissance économique et évaluer la qualité de leur gestion monétaire. Qu’est-ce qui empêche d’ouvrir ce débat ? La seconde étape consisterait à modifier le régime de change pour aller vers un régime plus flexible avec, par exemple, un arrimage du CFA à un panier de devises. Cela va supposer de revoir le dispositif institutionnel. Aujourd’hui, le franc CFA via son rattachement à l’euro est beaucoup plus déterminé par les événements au sein de la zone euro que par la conjoncture au sein de la zone franc. C’est une hérésie !

    Mais les 16 pays de la zone franc ont-ils la capacité d’avoir une monnaie unique autre que le CFA ?

    Il n’est même pas nécessaire d’aller jusque-là. Ce qu’il faut, c’est que les dirigeants africains fassent preuve de responsabilité et ouvrent le débat sur la gestion monétaire. C’est un exercice démocratique auquel nous devons tous participer. Les gouverneurs de nos banques centrales doivent expliquer les fondements de leur politique monétaire, comme le font tous les gouverneurs de banques centrales. Je n’ai jamais entendu le gouverneur de la BCEAO ou de la BEAC s’exprimer devant un parlement quelconque. Dans l’absolu, ce n’est pas impossible d’avoir une monnaie qui nous soit propre, puisqu’il s’agit d’un élément de la souveraineté nationale. Les autres pays africains ont leur propre monnaie, cela ne pose aucun problème.

    Pourquoi ce débat sur le franc CFA et sa parité fixe à l’euro est tabou ?

    Les termes du débat sont parfois mal posés. Certains en parlent en termes de panafricanisme ou de revendication identitaire. C’est une approche contre-productive. Nous devons d’abord définir le modèle de société que nous voulons construire. Cela permettrait de dépassionner le sujet. A quoi cela rime-t-il de bomber le torse en prétendant avoir une nouvelle monnaie que nous serons incapables de gérer ? Tout n’est pas mauvais dans la situation actuelle : la centralisation des réserves de change, par exemple, est une forme de solidarité entre les Etats qu’il est important de préserver.
    La question de la souveraineté qui sous-tend ce débat est plus que légitime. Car, il est inconcevable que 55 ans après les indépendances, les pays de la zone franc continuent d’avoir une monnaie physiquement fabriquée en France, d’avoir leurs réserves de change déposées auprès du Trésor public français. Mais il ne faut pas penser que la monnaie est l’alpha et l’oméga du processus de développement et de croissance de l’Afrique. Il y a des questions liées à la gouvernance et à la démocratie, à la productivité et à la compétitivité que nos pays doivent résoudre.

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    Sat, 18 Jul 2015 23:19:00 +0200

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