Lionel Jospin tiré de sa retraite par François Hollande

C’est son grand retour. Lionel Jospin présidera la commission sur la moralisation et la rénovation de la vie politique, dont la création a été annoncée par le président de la République samedi 14 juillet. François Hollande a tiré de sa retraite celui qui lui avait fait confiance pour diriger le Parti socialiste quand la gauche plurielle était arrivée au pouvoir en 1997. "Un homme incontestable pour son intégrité", a déclaré le chef de l’Etat dans son interview télévisée.

L’"austère qui se marre", comme M. Jospin s’était dépeint lui-même, avait pratiquement disparu de la vie publique après son retrait au soir du premier tour de l’élection présidentielle, le 21 avril 2002. Il avait tenté de revenir dans le jeu, en 2006, quand les socialistes allaient choisir leur candidat à la présidentielle, avant de renoncer devant la popularité alors acquise par Ségolène Royal. Il n’exerce aucun mandat électif et n’a plus de fonctions au PS.

"RÉNOVER LA VIE POLITIQUE"

François Hollande ne l’a pas oublié durant la présidentielle. Il a invité l’ancien premier ministre à la convention d’investiture du candidat, en octobre 2011, à la Halle Freyssinet. En mars, Lionel Jospin fut envoyé à Dakar, en compagnie d’Harlem Désir, pour représenter le candidat socialiste lors de l’investiture de Macky Sall, nouveau président du Sénégal. Lors de son dernier meeting de campagne, à Toulouse, le 3 mai, le candidat demanda à M. Jospin de monter sur scène et de prendre la parole.

Une fois l’élection passée, on revit sa crinière blanche lors de la cérémonie du 8-Mai aux Champs-Elysées. Et de nouveau, le 15 mai, lors de l’investiture de M. Hollande. En dépit des divergences qui les avaient opposés dans les deux dernières années de gouvernement de la gauche plurielle et pendant la campagne de 2002, M. Hollande reconnaît sa dette envers M. Jospin.

D’une façon comparable, Nicolas Sarkozy avait confié à l’ancien premier ministre – et candidat à la présidentielle de 1995 – Edouard Balladur, qui avait été son mentor, la présidence du comité sur la modernisation des institutions, dont était sortie la révision constitutionnelle de 2008.

Voilà donc Lionel Jospin, 75 ans, chargé d’une mission officielle. Celui qui dirigea par deux fois le PS – de 1981 à 1988 et de 1995 à 1997 –, avant d’en passer les rênes à François Hollande, quand il remporta les élections législatives, se retrouve investi d’une tâche de "rénovation" de la vie politique.

NON-CUMUL DES MANDATS

La commission qu’il préside et dans laquelle il retrouve son fidèle ancien directeur de cabinet, Olivier Schrameck, sera chargée de faire des propositions sur le non-cumul des mandats, le financement des campagnes, les modes de scrutin et la définition d’une "charte ethique", comme s’y était engagé le candidat socialiste. M. Jospin n’avait pourtant pas laissé de traces mémorables comme rénovateur à la tête du PS.

Quand il reprend les commandes du PS, en octobre 1995, le parti a pourtant bien besoin d’un coup de neuf. Le premier secrétaire avait annoncé, alors qu’il n’était encore que candidat, une rénovation, attendue par les militants. S’il avait bien lancé une grande consultation parmi eux, et gagné une véritable adhésion, la rénovation façon Jospin s’était limitée à l’élection des principaux responsables du parti (premier secrétaire national, premiers secrétaires fédéraux, secrétaires de section) au scrutin direct et secret par tous les adhérents, lui permettant ainsi d’accéder en force au poste de numéro un.

"SORTIR JOSPIN DU PLACARD"

François Hollande ne fut pas plus novateur. Il garda l’élection du premier secrétaire et, pour la désignation du candidat à l’élection présidentielle, une primaire interne réservée aux seuls militants. Il ne s’aventura pas plus loin durant les onze ans que dura son règne sur le PS. Il fallut attendre Martine Aubry pour voir, avec le lancement des primaires citoyennes et l’instauration de la règle de non-cumul des mandats, le début d’une vraie rénovation, impulsée par Arnaud Montebourg.

Au-delà du geste envers son ancien mentor, faut-il voir dans cette nomination le signe que la rénovation ne sera peut-être pas aussi audacieuse qu’affiché par le candidat ? La droite s’est empressée, en tout cas, de railler le choix du président de la République. "Sortir Jospin du placard pour moderniser la vie politique, on croit rêver !", s’est exclamé, lundi 16 juillet, le chef de file des députés UMP, Christian Jacob.

M. Jospin a répondu que les travaux de sa commission prendront "en compte les engagements du président" durant la campagne. Ceux qui critiquent "regarderont les résultats des réflexions de la commission, et c’est à ce moment-là que leur interrogation apparaîtra ou non comme valide", a-t-il prévenu.

Sylvia Zappi in lemonde.fr

Tue, 17 Jul 2012 10:53:00 +0200

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