Duékoué : LES VENDEUSES DE POISSON DE GUEZABO, UN BEL EXEMPLE D’ORGANISATION ET DE SOLIDARITÉ

Elles sont originaires de divers horizons. L’on y trouve des Libériennes, des Gouro, des Wobé, des Gnanboua et des Malinké. Chaque matin, elles se retrouvent au marché vêtues dans leurs tenues de « service », notamment des robes, des pagnes, des pantalons et quelquefois des blouses. Leur coopérative est répartie en trois sous-groupes : les vendeuses de poisson frais, les fumeuses, et les vendeuses de poisson fumé. C’est un réseau. Mme Tapé Marie-Chantal en est la présidente. Elle dispose d’un bureau situé non loin du marché. C’est elle qui coordonne toutes les activités des vendeuses. Celles de poisson frais sont les plus nombreuses. C’est au bord des fleuves Sassandra et N’zo qu’elles vont acheter le poisson en gros. Très tôt le matin. Quelques heures plus tard, elles reviennent avec du poisson frais qu’elles convoient au marché d’Abidjan, Daloa et d’autres villes à l’aide d’un véhicule de location. Une partie est vendue sur place par elles-mêmes et l’autre proposée aux clientes de poisson fumé. Celles-ci, environ une dizaine, sont assises sous des parasols au bord de la rue qui mène vers Duékoué. Devant elles sont disposés sur des tables les poissons déjà fumés. Dès qu’elles aperçoivent le véhicule de poisson frais, elles s’attroupent aussitôt autour, en laissant entendre des cris de joie et des rires. « Je veux celui-ci ; donne-moi celui-là » ; telles sont les phrases les plus récurrentes. Chacune fait ainsi son choix et confie sa marchandise à son tour, aux fumeuses qu’elles paient en fin de soirée à 1500f pour 20kg de poisson fumé. Il y a plus de 20 fumeuses. En plus du poisson des commerçantes, celles-ci fument le poisson de certaines clientes qui préfèrent acheter le poisson frais avant de le faire fumer. Selon tantie Téa Makoura, comme on l’appelle ici, la plus ancienne des fumeuses (36 ans de présence), les touristes qui viennent des pays voisins et d’Europe sont ses meilleurs clients. « Ils viennent parfois même avec des pattes de bœuf ou de porc », souligne-t-elle. Chaque membre travaille pour son compte, et cotise la somme de 2500 F à la fin du mois. Cette somme est épargnée à la banque. Selon Mme Tapé Marie Chantal, la coopérative a, dans son compte, au moins deux millions de francs. En cas de difficultés financières, l’adhérente a droit a un crédit, remboursable dans un délai défini. Pendant les fêtes, chacune d’elles perçoit sa prime qui varie en fonction des dépenses de l’année. De temps en temps, ces braves dames organisent des fêtes de réjouissance. La présidente effectue souvent des voyages en Europe où elle cherche de l’aide matérielle. Elle a parcouru, entre autres, l’Italie, l’Espagne, la France et bien d’autres pays. C’est à l’issue de son dernier voyage que les fumeuses de poisson ont bénéficié récemment de 10 nouveaux fumoirs construits derrière le marché pour remplacer les barriques, jugées trop artisanales. « Les fumoirs chokkor » sont de petites constructions en forme de pavés, d’une hauteur d’un mètre avec deux foyers en dessous. Ces 10 fumoirs, recoupés en 20 foyers, conservent, selon tantie Téa Makoura, la chaleur permettant d’accélerer la cuisson du poisson, tout en nécessitant peu d’effort. C’est une Ong italienne qui s’est chargée de les construire. « Nous avons des sponsors qui ont financé l’opération. Le coût global est de 13,5 millions de Fcfa. Ces nouveaux fumoirs ont pour avantage de vite cuire le poisson. On utilise donc moins de fagot. Ils nous protègent aussi contre la chaleur du feu », indique l’une des fumeuses. La présidente Tapé Marie Chantal ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Elle continue de chercher des partenaires, car elle a en vue d’autres activités. Notamment, la construction de plusieurs bâtiments en dur sous des préaux pour toutes les vendeuses. L’achat d’un camion de transport de poisson est aussi au programme. C’est pourquoi, elle dit attendre de l’aide de la part de toutes les autorités, avec en tête la mairie. Cette solidarité se poursuit également en dehors du marché. En effet, ces dames apportent chaque fois leur soutien moral et financier à tout membre en difficulté ou en deuil.

Gouagnon Léopold
Correspondant in FRATERNITE MATIN

Mon, 14 Jan 2013 22:37:00 +0100

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