Transport / Au cœur des conflits quotidiens entre chauffeurs, apprentis gbaka et clients

Photo : DR
Le transport « gbaka » rime- t-il avec la mort ?
Le comportement des chauffeurs et apprentis de gbaka ne gagne pas l’assentiment de la population du district d’Abidjan. Pour ces populations, il est très difficile de passer un moment agréable avec chauffeurs et apprentis de gbaka. Car, selon les abidjanais, ces conducteurs n’ont aucun égard pour tout client qui emprunte leurs véhicules. Mme Obin Patricia, commerçante à Adjamé et habitant dans la commune de Yopougon, appelle tout un chacun à faire une prière pour demander la protection de Dieu avant d’emprunter un gbaka. Car, selon elle, être dans ce véhicule s’est prendre rendez-vous sans le vouloir avec la mort. « Les chauffeurs de gbaka roulent très mal. Ils sont impliqués dans au moins 90% des accidents de la route », dira-t-elle. Cette assertion est soutenue par M. Kouamé Jules, agent commercial à Adjamé et habitant à Yopougon qui justifie ces propos en ces termes : « Il y a eu, l’année passée, un accident de gbaka sur le pont de la Siporex. Si on ne roule pas très mal, on ne peut pas quitter un pont pour se retrouver en bas. Ce gbaka en plein embouteillage, voulait évier les autres véhicules. A cause de la mauvaise conduite de ces chauffeurs de Gbaka, nous perdons régulièrement des frères et des sœurs », a-t-il déploré. Quant à Attin Etienne, élève en première D au lycée Moderne d’Adjamé et habitant la commune d’Abobo, il est très scandalisé par le manque de prise de conscience des chauffeurs de Gbaka. « Quand tu te plains au chauffeur pour sa conduite, il s’en fout. Parfois il t’insulte. Cette situation stressante nous livre régulièrement aux maladies de cœur », martèle t-il. L’autre situation que les populations de façon générale trouvent choquante, c’est que ces acteurs du transport peuvent laisser les passagers avant la destination finale indiquée. Les chauffeurs de gbaka, selon toujours, M. Attin Etienne, descendent généralement les clients avant le terminus prévu. « Et lorsque les passagers se plaignent, cela ne les fait ni chaud, ni froid », précise-t-il. Quant aux apprentis, ils ne sont pas ménagés par M. Kouamé Jules. Pour lui, le respect ne fait pas parti du monde des apprentis gbaka. « Dès que vous montez dans un gbaka, l’apprenti vous demande automatiquement le transport. Toutefois, pour vous remettre la monnaie, vous êtes obligé de faire la police derrière lui. L’apprenti sait très bien qu’il a votre monnaie mais il va attendre, vous êtes obligé de lui rappeler à chaque fois. Et souvent, c’est lorsque vous arrivez à votre destination qu’il vous remet votre monnaie. Cette situation conduit à des disputes. L’apprenti peut avoir la monnaie dans la poche et ne pas vouloir vous rendre. Et il ne vous dit rien, par malheur, vous pouvez oublier votre monnaie pour descendre. J’ai été victime de cette situation au moins deux fois », déclare cet agent commercial. Et d’indiquer qu’à la montée d’un gbaka, plusieurs apprentis se présentent aux clients et chacun vous donne un prix. Dès que vous êtes dans le gbaka, dira-t-il, c’est un seul apprenti qui vous fixe le prix du transport « qui est généralement plus élevé que celui qu’on vous a proposé avant le départ du véhicule », ce qui conduit, a-t-il déclaré à des polémiques. Toutes ces accusations portées à l’encontre des chauffeurs et apprentis gbaka sont soutenues par M. Issouf Ouattara, Délégué médical. Selon lui, ces acteurs du transport vénèrent les clients quand ceux-ci sont hors de leurs véhicules. Mais, souligne-t-il, chauffeurs et apprentis de gbaka montrent le contraire, lorsque vous vous trouvez dans leur mini car. « Quand tu n’es dans le gbaka, ils te considèrent comme roi, même étant à 50 m du véhicule et marchant à pas de tortue, ils vont t’attendre. Mais dès que vous mettez pied dans le gbaka, le chauffeur ne vous laisse pas le temps de vous asseoir et il démarre la voiture. C’est pareil, quand vous voulez descendre. En cas de plainte, apprenti et chauffeur vous accueillent avec des injures de tout genre », affirme t-il. Poursuivant, il souligne que certains acteurs de ce transport, sans état d’âme, portent généralement main à des clients. Toujours dans cette dynamique de dénonciation des attitudes « déviationnistes » des chauffeurs et apprentis de gbaka, M. Kambou Aboubakar, souligne qu’il a du mal à rouler sa voiture en présence des gbaka. Pour lui, la voie est très obstruée en présence de ces mini cars. Ces derniers, précise-t-il, sont adeptes des dépassements fantaisistes et des mauvais stationnements en pleine route. « Cherchant l’argent avec leurs véhicules, les chauffeurs de gbaka sont toujours pressés. Ce n’est pas la conduite qu’ils font, ils déplacent simplement la voiture », fustigent-il. Avant d’ajouter que ces transporteurs qui doivent trouver la recette du propriétaire du gbaka ainsi que la leur, travaillent sous une grande pression. « Ils ne roulent que pour de l’argent, le reste n’est pas leur problème. Ils doivent avoir la recette demandée par le propriétaire du véhicule et ensuite chercher la leur. C’est cette pression qui conduit les chauffeurs et apprentis de gbaka à être très pressés. En clair, ils font une course à l’argent. Il faut être le premier à prendre sur le chemin plusieurs clients », déclare t-il. Poursuivant, M. Kambou, ne va pas du dos de la cuillère pour affirmer que ces acteurs prennent des excitants notamment, la drogue pour défier la pression. « Pour supporter le coup, les chauffeurs et apprentis de gbaka se droguent quotidiennement. Je le dis, car j’ai des frères dans ce milieu. Ces derniers se droguent chaque jour avant de commencer à rouler », martèle-t-il. M. N’goran Jonas, machiniste à la sotra, ne dit pas le contraire. Pour cet autre acteur de la route, la conduite s’avère plus difficile avec les chauffeurs de gbaka. A l’en croire, l’indiscipline, l’impolitesse et l’inconscience sont ces quelques mauvaises qualificatives qui identifient mieux les chauffeurs et apprentis de gbaka. « Nous constatons qu’ils sont aigris vis-à-vis des chauffeurs de la sotra. Pour eux, nous gênons leur mobilité car tout chauffeur de gbaka aime la rapidité. Ce qui fait qu’ils ont horreur d’être derrière les bus qui les empêchent de bien faufiler entre les véhicules », déclare-t-il. Même son de cloche chez un agent de police qui a requis l’anonymat. Ce dernier souligne que les nombreuses infractions sur la route relèvent généralement des chauffeurs de gbaka. « Ils violent régulièrement les feux rouges, la majorité des chauffeurs de gbaka laissent le trottoir pour garer en pleine route. Quand ils sont à un carrefour et qu’ils veulent tourner, ils n’allument pas leurs clignotants. Et lorsque nous les interpellons sur ces différents faits, ils sont les premiers à nous injurier », s’indigne -t-il.

Une atmosphère délétère favorisée en parti par les clients
Chauffeurs et apprentis de gbaka s’inscrivent en faux, face à toutes ces accusations. Pour ces transporteurs, la cohabitation n’est pas au beau fixe entre eux et la population parce que, diront-ils, les populations ont une mauvaise impression, conçue à l’avance, à l’égard des chauffeurs et apprentis de gbaka. « Il y a des clients qui montent dans nos véhicules dans l’intention de nous faire des disputes. Car, pour eux, tous les chauffeurs et apprentis de gbaka sont au préalables des mal éduqués », affirme M. Adama Coulibaly, Chauffeur de gbaka sur la ligne Adjamé Liberté-Bingerville. Poursuivant, il indique que, demander à un client de régler le transport entraîne généralement des disputes. « Des clients insultent sans raison l’apprenti parce qu’il a simplement demandé de régler le transport », souligne-t-il. M. Adama Coulibaly refuse qu’on puisse considérer la conséquence d’une action comme la cause. Pour lui, ce sont les attitudes discourtoises de la population qui conduisent à cette réaction des chauffeurs et apprentis de gbaka, que les uns et les autres, a-t-il indiqué, qualifie d’impolitesse et d’indiscipline. S’agissant du coût du transport qui s’augmente en plein trajet, selon les clients, M. Gogbeu Edmond, Chauffeur de gbaka sur la ligne Yopougon Niangon à Adjamé Liberté Texaco, a carrément accusé les clients d’être responsables de ce disfonctionnement. Pour lui, les clients connaissant très bien l’environnement des gbakas, ne prennent pas le temps de rechercher le vrai apprenti afin d’éviter des polémiques par la suite. « Les clients savent qu’il y a des ‘’gnambro’’ qui chargent les gbakas. Malgré cela, Ils se contentent du prix de transport que ces derniers leur fixe sans chercher à rencontrer le véritable apprenti pour s’assurer du prix réel. Et, lorsque les ‘’gnambro’’ leur dit que le transport est à150, et que par la suite, l’apprenti leur demande de payer 200 ou 250, ils s’enflamment, ce qui conduit inéluctablement à des disputes », déclare-t-il. Se prononçant sur les problèmes de monnaies dans le mini-cars, Traoré Abou, apprenti sur la ligne Adjamé liberté à Bingerville, affirme que cette situation résulte de la mauvaise foi des clients. « Les clients sont très difficiles. En chargeant, nous disons aux clients de monter avec la monnaie. Mais, ils font exprès pour monter par exemple avec 5 000 FCFA pour un coût de transport de 200 FCFA. Quand c’est le cas, cela nous énerve. Parce que lorsqu’ on charge notre gbaka, il n’est pas évident qu’on est toujours la monnaie. Ce problème entraîne généralement des disputes. Pour éviter qu’on dise que les apprentis de Gbaka sont impolis, effrontés, pour éviter les disputes, nous exhortons toujours les clients à monter avec la monnaie », fait –il-savoir. Avant plus, souligner que les clients leur mettent une forte pression pour avoir leurs monnaies. « Dès qu’ils donnent leur argent, ils veulent qu’on leur remette automatiquement la monnaie. Or, il nous faut chercher la monnaie. D’où les disputes de toute sorte », explique-t-il. Quant à leur mauvaise conduite, décriée par la population, les chauffeurs de gbaka ne rejettent pas totalement cette accusation. Toutefois, ils précisent que nombreux, sont les chauffeurs de gbaka qui ont une bonne conduite. « Dans tout métier, il y a des brebis galleuses. Le secteur de gbaka n’est donc pas exempt de cette réalité universelle », déclare Fanny Drissa, Chauffeur de gbaka. Avant d’appeler, la population à leur faire allégeance, car dira-t-il, ils font un commerce, où la concurrence est très rude, ce qui les oblige parfois à confondre vitesse et précipitation. Accusé par les clients, de consommer la drogue, les chauffeurs et apprentis de gbaka ne s’y reconnaissent pas. Pour eux, ils ne consomment que des excitants pour être plus dynamiques. « Aujourd’hui, tout le monde dit que les chauffeurs de gbaka se droguent, ce qui est faux. Les gens disent cela parce que nous sommes très dynamiques quand nous travaillons. Nous faisons un métier qui nous oblige à être très actifs pour avoir la recette du patron et la nôtre. Si tu es donc timide, tu ne peux pas faire ce travail. Et pour être dynamique, nous prenons simplement le café noir qui nous permet d’être très éveillé », précise Koné Ibrahim, chauffeur de gbaka sur la ligne Abobo zoo à Adjamé Liberté.

Avec le partenariat de l’Intelligent d’Abidjan / Par R.Diby

Sat, 22 May 2010 02:45:00 +0200

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