Bravo à la COP 28 de l’ONU à Dubai, à quand la COP interne de la Côte d’Ivoire ? – Par Kobena I. Anaky (Ancien ministre ivoirien, auteur de « ALASSANE OUATTARA CONTRE LA NATION IVOIRIENNE»)

Il est autant agréable que rassurant de relever que la Côte d’Ivoire, par une évidente grande volonté politique de son gouvernement, se présente désormais comme l’un des pays les plus attentifs au nouveau défi mondial de mettre un terme à la détérioration des cycles climatiques et de l’environnement général sur la planète terre; phénomène qui, hélas, a pris une grande accélération depuis quelques décennies. 
Nous avons tous en fraîche mémoire la tenue de la COP 25, du 9 au 20 Mai 2022 ici en Côte d’Ivoire, qui a été auréolé de “l’Initiative d’Abidjan”, un programme de gestion durable des sols et de reconstitution des écosystèmes forestiers que tous les pays du monde pouvaient s’approprier.
Et la participation significative de notre Pays à la 28ème conférence des parties sur le climat de l’ONU (COP 23), à Dubai, du 30 Novembre au 12 décembre 2023, ne fait que le confirmer.
Un pavillon sur 2 niveaux , une délégation de 370 membres à la tête de laquelle le Vice-President en personne, avec 6 Ministres .
Nous osons espérer que le retour sur investissement d’une participation forcement coûteuse pour le budget de l’État répondra largement à nos légitimes attentes, et que la volonté politique clairement affichée de notre pays d’être l’un des phares de ce nouveau grand défi de l’humanité sera reconnue et admise de tous  en Afrique comme sur les autres continents ; nous ne doutons pas que toutes les instances internationales dédiées à cette mission en prendront acte.
Mais puisque, comme le recommandent tous les parlers en circulation en Côte d’Ivoire, il faut bien balayer devant et autour de sa propre case avant d’interpeller les autres villageois, qu’avons nous pris, ces dernières années, comme mesures-phares pour que toute la population soit informée de ce nouveau cap et se l’approprie ?
Et quelles nouvelles actions publiques visibles peuvent impacter la conscience de tout citoyen pour l’admonester de la survenue d’une nouvelle manière de co-vivre avec son environnement ?
Commençons par les ordures ménagères, pour l’enlèvement et le traitement desquelles beaucoup a été dit et crié sur tous les médias du pays.
De lourds investissements permettent d’espérer que, pour la grande zone panurbaine d’Abidjan, ce sera bientôt un acquis. Mais quid de l’intérieur du pays, les grandes villes, les villes moyennes, jusqu’aux villages et hameaux ? Aller à la découverte du pays profond et être accueilli, à l’entrée et à la  sortie de chaque village, par des dunes de déchets et immondices où farfouillent les poules, le bétail et autres porcs, est une douche glaciale à tout militantisme pour l’environnement !
– Le changement climatique amènera à revoir totalement la relation de l’habitat humain avec les océans, les cours d’eaux, fleuves et lacs. Quelles anticipations sont en cours pour nos 550km de rivage Atlantique ? Assinie, Bassam, Jacqueville, Grand-Lahou, la mythique Sassandra, etc. ? De quels moyens disposent les maires de ces localités déjà fortement dépeuplées ? Ne sont-ils pas en droit d’attendre que le gouvernement prenne les choses en mains ?
Le monde entier regarde et repasse le documentaire du jeune Ivoirien Hayek Hassan qui décrit et fait vivre, avec une rare émotion, les perles naturelles et environnementales dont notre pays est doté, et que nous ne protégeons pas parce que ne les ayant même pas encore découvertes nous-mêmes !
Si, aujourd’hui, des pluies interminables arrivent à provoquer inondations et mort d’hommes partout dans le monde, et surtout en Europe de l’Ouest où l’on avait assis le développement et le bien-être sur une maîtrise totale de la nature et de ses éléments, que faisons-nous en prévision des grandes crues à venir du Cavally, du Sassandra, du Bandama et de la Comoé, pour ne citer que les quatre grands fleuves du pays ?
Car toute la grande région immédiatement sous le Tropique du Cancer a été un océan, puis une grande forêt, et ses sols et sous sols ont une capacité d’absorption faible depuis des millénaires.
Combien de ponts ou ouvrages d’art , de construction récente , et qui sont des palmes d’or de notre gouvernement , pourront résister à la houle avant d’être emportés?
De combien d’hélicoptères dispose la protection civile Ivoirienne pour ravitailler en eau, vivres et médicaments, les larges zones qui se révéleront inaccessibles pendant des semaines, ou pour évacuer les populations prises au piège des eaux ?
La grande décision, pour la Côte d’Ivoire de ce début de 3ème millénaire, est, avec courage et pragmatisme, de reprendre totalement l’occupation humaine et économique du territoire telle que l’a conçue et imposée la puissance… la puissance coloniale, il y a presque deux siècles .
C’est la façade maritime, par laquelle arrivaient et partaient les navires, qui importait, et le développement n’a porté que sur la multiplication de ses zones d’accès économique .
Routes et voies ferrées n’ont été ouvertes que pour assurer la prospérité et le monopole des grandes agglomerations du littoral. Les grandes zones de l’intérieur avaient à charge d’acheminer le maximum de denrées agricoles vers le littoral pour ne pas s’exclure de la dynamique de développement imposée par le colonisateur.
Toute la dynamique de développement s’est confinée dans les grandes zones urbaines côtières. Abidjan est l’un des meilleurs cas d’école de ce genre de politique, et lorsque l’on sait que sur les 26 millions d’habitants de la Côte d’Ivoire, près de 10 millions peuplent la grande péripherie abidjanaise, soixante années après l’Indépendance, l’on comprend pourquoi la Côte d’Ivoire a besoin d’un véritable tsunami environnemental pour commencer à retrouver ses propres marques et repères, et amorcer son vrai développement, le sien propre, à son rythme propre.
En suivant une ligne qui partirait de Abengourou à Daoukro, Dimbokro, Toumodi, Sinfra, Bouaflé, Vavoua et Man, nous obtenons la division du territoire en une zone Nord à faible taux de peuplement et peu développée en agriculture et infrastructures, et une zone Sud qui regroupe plus des 3/4 de la population globale qui s’y est repliée et concentrée. Et, pour cette zone Sud, le seul Abidjan et ses environs concentre les 3/4 de la population.
Le développement de la Côte d’Ivoire, en intégrant les nouvelles contraintes du respect de l’environnement et du cadre de vie, démarrera avec l’éclatement de la grosse bulle d’Abidjan, qui se révèle d’ailleurs étouffante et même contre productive face à toute véritable relance du développement économique du pays.
Le Grand Nord, le Centre, l’Ouest de la Côte d’Ivoire, et l’essentiel de la diaspora des pays voisins tels que la Guinée, le Mali, le Burkina et le Niger, doivent ils continuer à se concentrer sur la partie Sud littorale de la Côte d’Ivoire ? L’autoroute du Nord, après Bouaké, devra-t-il présenter aux voyageurs de grands et beaux espaces quasi vides de villages et de populations, mais pourtant encore mieux adaptés à l’agriculture et à l’élevage à large échelle que le Sud Forestier et lagunaire ?
En 1970, les premiers écologistes tels que René Dumont étaient considérés comme de doux utopistes. Un demi siècle plus tard, tout l’univers par la voix des Nations Unies reconnait qu’ils étaient dans le vrai, et qu’il ya urgence à retropédaler pour se mettre à niveau.
Arrêter immédiatement tout grand investissement foncier, industriel ou agricole à Abidjan et sa région, et tout diriger vers les trois grands pôles de developpement des zones Centre et Nord déjà répérés et en cours d”équipement et organisation , est certainement le grand et vrai COP  qu’appelle la Côte d’Ivoire.
Sans compter que le programme de grands travaux qui découlera de ce choix politique d’envergure exceptionnelle ouvrira de grands chantiers sur au moins 30 à 50 années.
C’est là que se formera la majorité de la main d’oeuvre industrielle et artisanale qui assurera à terme le développement industriel et agricole du pays. L’économie Ivoirienne a besoin de se booster fort en interne !
Que vive la Côte d’Ivoire 
Abidjan, le 6 décembre 2023
Ministre kobena I. Anaky
President du MFA
Retrouvez La chronique du Président Kobena I. Anaky, tous les mercredis, sur www.ladepechedabidjan.info
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