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    La Liberté d'Informer

    Œuvrer en faveur d’une renaissance africaine à travers la culture et l’histoire

    ByLa Dépêche d'Abidjan

    Sep 28, 2023

    Comment, à travers la tradition orale et la connaissance de l’histoire, la culture africaine véhicule la paix et la créativité sur le continent, au-delà, et dans le monde entier.

    Dans le folklore ouest-africain, Anansi était un charmant farceur ayant l’apparence d’une araignée. Il s’aperçut que les êtres humains étaient tristes, car ils n’avaient aucune raison d’espérer ni d’envisager un avenir radieux. Il se souvint alors que Nyame, le dieu du ciel, possédait des choses magiques appelées histoires. Ces histoires pourraient rendre les humains heureux, pensa Anansi.

    Il rendit visite à Nyame et demanda à lui acheter ses histoires. Cependant, le dieu du ciel lui répondit qu’elles n’étaient pas à vendre. « Je ne les vendrai pour rien au monde, excepté pour Onini le python meurtrier, Osebo l’insaisissable léopard, Mmoatia la fée malicieuse et Mmoboro, l’essaim de frelons mortels », dit Nyame. Cette mission relevait de l’exploit, mais pas pour Anansi, qui parvint à capturer ces quatre cibles hors d’atteinte en usant de son génie. Lorsqu’il les livra à Nyame, ce dernier ne fut pas satisfait. Toutefois, ayant conclu un marché avec Anansi, il se devait d’honorer sa promesse.

    « Rapporte ces histoires sur terre et donne-les aux humains, dit Nyame. Ils te seront éternellement reconnaissants. D’ailleurs, ils baptiseront tous les grands contes, “histoires d’araignées” en ton honneur. »

    Ainsi, Anansi le farceur devint le dieu qui connaissait toutes les histoires. Le mythe d’Anansi illustre la nécessité pour chaque société de créer et de partager des histoires.

    Netflix et l’UNESCO se sont associés afin de lancer un concours de courts métrages innovant sur le thème « Contes populaires africains revisités », dans toute l’Afrique subsaharienne. Les lauréats du concours seront formés et suivis par des professionnels du milieu et recevront un budget de production de 75 000 dollars afin de réaliser des courts métrages qui seront diffusés pour la première fois sur Netflix en 2022, sous la forme d’une Anthologie des contes populaires africains. L’un des principaux objectifs de ce concours est de découvrir de nouvelles voix et de donner une visibilité internationale aux jeunes réalisateurs d’Afrique subsaharienne.

    De contes d’araignées à l’histoire de l’Afrique

    Les récits tels que ceux partagés par Anansi sont au cœur de la vie humaine depuis des milliers d’années, telle une sorte de jeu cognitif qui stimule l’esprit humain, nous permettant de comprendre les phénomènes naturels et sociaux, et d’imaginer différentes stratégies pour vivre dans un monde complexe. On pourrait supposer que plus nous collectons et partageons ces histoires, plus nous serons capables de nous comprendre, et de comprendre les autres, le monde qui nous entoure, les valeurs et traditions respectives et communes. Le travail de l’UNESCO, réalisé au cours des dernières décennies afin de documenter, collecter et écrire ces récits provenant du monde entier, ne constitue pas seulement un effort indispensable pour protéger et préserver un patrimoine précieux, mais également un effort visant à développer la connaissance du monde ainsi que notre capacité collective à nous comprendre.

    Les contes d’araignées sont répandus en Afrique de l’Ouest, toutefois les contes ghanéens d’Anansi figurent parmi les plus connus, en langue akan le nom Anansi provient du mot « araignée ».
    Aujourd’hui, Anansi symbolise la sagesse, la créativité et la complexité de l’ensemble du continent africain. Les traditions orales — messages, chansons, fables et proverbes — se transmettent d’une génération à l’autre sans écrit, permettant aux populations de donner un sens au monde qui les entoure et leur enseignant des aspects essentiels de leur culture.

    À l’instar des contes d’Anansi, racontés depuis la nuit des temps, l’histoire du continent africain s’est transmise oralement de génération en génération. Bien qu’il existe des écrits historiques en Afrique de l’Ouest depuis de nombreux siècles, la majorité des populations du continent était incapable de les lire. La tradition orale permettait aux Africains de partager leur histoire commune, qu’ils soient originaires du nord ou du sud du continent, cependant les Européens considéraient que ce dernier n’avait pas d’histoire, car ils étaient incapables de la lire et de la comprendre. Ainsi, l’histoire de l’Afrique qui a été partagée avec le reste du monde a commencé avec le récit du colonialisme et celui des Européens en Afrique.

    Décoloniser l’histoire africaine

    Au début des années 60, alors que l’Afrique entrait dans une phase de décolonisation rapide, les intellectuels et les dirigeants des pays nouvellement indépendants se sont efforcés de libérer leur histoire ainsi que celle de leur nation. Afin de mettre un terme à la méconnaissance générale de l’histoire africaine, l’UNESCO a lancé « l’Histoire générale de l’Afrique » en 1964. L’Organisation a invité les intellectuels africains à écrire, pour la toute première fois, l’histoire de leur continent en ayant recours à des sources souvent ignorées par les historiens occidentaux, telles que le folklore, les traditions et la culture, afin de fournir une perspective africaine, dépourvue des biais raciaux émanant de la traite des esclaves et de l’intervention européenne.

    Ce projet ambitieux, censé renouveler les approches scientifiques de l’histoire de l’Afrique, a eu d’immenses répercussions sur l’histoire du monde, et a offert une nouvelle perspective globale sur l’histoire de tous les continents. Il a placé l’Afrique au cœur de l’histoire de l’humanité. Pour la première fois, on tentait de dépasser les frontières des récits nationaux afin de construire une véritable « histoire générale », soulignant les points communs entre les peuples et les cultures, révélant les tendances et les échanges au fil des siècles au-delà des frontières nationales, et mettant en valeur les identités comme jamais auparavant.

    Le continent africain possède la plus longue histoire du monde : c’est le berceau de l’humanité. Au XIXe siècle, Charles Darwin a été le premier à avancer que l’ancêtre commun des êtres humains était très probablement africain, une idée qui en a alarmé plus d’un à l’époque. « Le fait que nous puissions avoir évolué en Afrique constituait un anathème pour beaucoup, qui étaient incapables de croire que les populations du nord, d’un blanc pur, aux yeux bleus et aux cheveux de lin, aient pu être originaires du “continent noir”. Pourtant, tous les événements majeurs liés à notre histoire remontent à l’Afrique », explique le paléontologue kenyan, Richard Leakey, l’un des premiers contributeurs au projet de l’Histoire générale de l’Afrique. « Nous sommes un animal africain, une espèce africaine qui a colonisé et recolonisé le monde à différentes époques et de différentes manières. Aujourd’hui, aucun être humain ne peut affirmer que l’Afrique n’est pas sa mère patrie ».

    L’Histoire générale de l’Afrique

    L’Histoire générale de l’Afrique (HGA) est un projet précurseur, inédit, ayant pour ambition de couvrir l’histoire de l’ensemble du continent africain, depuis le début de l’humanité jusqu’aux défis contemporains auxquels sont confrontés les Africains et leurs diasporas à travers le monde. Une histoire qui révèle au grand jour la période précoloniale et entremêle le destin de l’Afrique à celui de l’humanité en mettant en lumière son lien avec les autres continents et la contribution des cultures africaines au progrès général de l’humanité. Ces dernières années, l’UNESCO a entamé la préparation et la rédaction de trois nouveaux volumes de l’HGA (volumes IX à XI).

    Partant de l’exemple de l’Afrique, l’UNESCO a dirigé d’autres vastes projets d’histoires à l’échelle régionale, telles que l’Histoire générale de l’Amérique latine, des Caraïbes, l’Histoire des civilisations de l’Asie centrale, les différents aspects de la culture islamique ainsi que l’Histoire de l’humanité. Ces volumes et leurs milliers de pages, rédigés bien avant la naissance de plateformes en ligne telles que Wikipédia, représentent l’une des entreprises scientifiques les plus ambitieuses visant à construire une compréhension commune de l’histoire humaine que nous partageons. L’Histoire générale de l’Afrique a depuis changé la perspective mondiale sur la façon dont l’histoire est écrite et constitue un changement d’échelle historiographique que « l’histoire mondiale » moderne et les « histoires connectées » contemporaines continuent d’explorer.

    L’Histoire générale de l’Afrique en vidéo

    L’Histoire générale de l’Afrique (HGA) lancée par l’UNESCO en 1964 est entrée dans une nouvelle phase avec une série documentaire en neuf parties, réalisée par la journaliste et productrice de la BBC, Zeinab Badawi. Cette dernière a voyagé aux quatre coins de l’Afrique, interrogeant des historiens, des archéologues et des citoyens africains dont les témoignages et les histoires dépeignent un tableau aux couleurs vives du passé de leur continent et de son influence sur leur vie actuelle.

    BBC World News :

    SÉRIE EN NEUF PARTIES BASÉE SUR LA COLLECTION DE L’UNESCO INTITULÉE « L’HISTOIRE GÉNÉRALE DE L’AFRIQUE »
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