Couper-décaler, crise au sein de la jet-set: Lino Versace dit ses vérités !

• On te voit de moins en moins sur la scène…

– Oh, “le marabout du quartier” se porte à merveille. Je suis plus à l’extérieur depuis quelque temps. Je tourne beaucoup en Europe. Après donc les tournées, j’étais à Paris, avec ma petite famille qui me manquait. J’ai profité de ce temps pour produire une artiste, une jeune ivoirienne du nom de Sly 2 de Sly dont vous entendrez bientôt parler en Côte d’ivoire.

• Tu nous as revelé récemment que tu abordes en ce moment un autre tournant de ta carrière. Comment cela se traduit-il concrètement ?

– J’ai sorti des singles et fait beaucoup de featuring avec des artistes à l’international ces derniers temps. Vous voyez déjà les vidéos sur les chaines de télévisions africaines. Après plus de 10 ans de carrière, je pense que je suis à une autre dimension aujourd’hui. Je veux passer à la vitesse supérieure. Je parle plus de maturité. J’ai eu la chance de faire plusieurs festivals dans le monde. Et de représenter la Côte d’Ivoire à un haut niveau. Je n’ai pas le droit aujourd’hui de jouer avec ma carrière.

• Ton compère Molare avec le succès de son dernier disque “Autre dimension” a progressé dans le couper-décaler et fait monter sa côte…

– Je lui tire mon chapeau. J’avoue que Molare a beaucoup progressé. Il n’est pas le seul. Jean Jacques Kouamé également a fait une belle percée. Ils chantent et proposent de belles vidéos. C’est une bonne chose pour le couper-décaler et aussi la musique ivoirienne. Ils amènent les autres à bosser davantage et faire mieux.

• Précurseurs du mouvement couper-décaler, 10 ans après, n’avez-vous pas le sentiment, au sein de la Jet Set, d’avoir passé plus de temps à faire le boucan, qu’à vous consacrer à la musique ? Ce réveil n’est-il pas un peu tardif ?

– (Il rigole) Famille, mieux vaut tard que jamais. Vous savez, la Jet Set, nous sommes entrés dans ce milieu du show-biz sans en connaître véritablement les rouages ni la chose musicale. C’est seulement après qu’on a découvert plein de choses, les réalités du terrain. L’amusement, c’est fini.

• Tu as donc mis un trait sur les virées, le boucan en boîte ?

– Au couper-décaler, on ne peut pas se départir de la nuit. Ce sont deux mondes intimement liés. C’est dans la nuit qu’on s’est fait connaître et c’est dans la nuit qu’on s’exprime et on fait notre promo. A la différence que désormais nous avons muri et donc il y a des actes tels que distribuer l’argent ici et là dans le show, qu’on ne se permettra plus. A un moment donné on devient comme un miroir pour toute une jeunesse. On gère notre carrière désormais.

• A quel niveau situes-tu ta carrière aujourd’hui ?

– Je fais mon petit bonhomme de chemin. Ce que je sais, je n’ai pas intérêt aujourd’hui à jouer avec ma carrière. Je veux aller plus loin, je vise plus l’international. Et être un des portes flambeaux de la musique ivoirienne.

• Qu’est-ce qui manque à ce jour à ta carrière ?

– Ecoutez, je suis parti de rien du tout pour côtoyer aujourd’hui des grands noms de la musique africaine. Je continue d’apprendre. Je pense peut-être qu’il manque ce déclic qui permet d’imposer l’artiste sur le plan international. Aujourd’hui, je fais plus les festivals où je ne me produis qu’en live, même quand je joue en boîte, je veux passer en live. Je travaille aussi beaucoup la voix.

• Côté musique, tu reviens en Côte d’Ivoire avec un nouvel opus, “Sans frontière”, pourquoi l’avoir intitulé ainsi ?

– ‘’Sans frontière ‘’, mon 2e album, c’est une sorte d’ouverture que je fais au monde. Dans cet album de 11 titres, j’ai décidé de faire un peu de tout. Vous aurez plusieurs genres de musique, de la danse, de l’afro décaler. L’album sort en France dans quelques jours puis en Côte d’Ivoire, avec pas mal de collaborations.

• Que penses-tu de la jeune génération de chanteurs couper-décaler dont chacun des membres affirme avoir “pris le pouvoir” ?

– Qu’ils redescendent sur terre et continuent de bosser. Mais je pense qu’avec un encadrement mieux maîtrisé, plus efficace, ils peuvent faire de très bonnes choses. Parce que tous ceux qui sont avec eux et qui se disent managers ne sont en fait que des accompagnateurs. Bebi Philip, Serge Beynaud, Dj Mix, Debordo, ce sont des artistes avec lesquels il faudra compter. Beaucoup parmi eux ont déjà réussi à faire le plein du Palais de la culture, il faudrait après qu’il y ait un suivi.

• Ils vous dament le pion apparemment, non ?

– C’est une bonne chose que ces jeunes gens qui sont partis de rien, arrivent aujourd’hui à maintenir le mouvement. Il faut aussi sortir et ajouter d’autres choses à ce rythme. Et accepter de faire des textes.

• Quel est ton avis sur la désignation d’Arafat comme meilleur artiste africain de l’année ?

– J’étais content pour le couper- décaler, parce que ça va faire taire des gens, qui pensaient que le mouvement était en régression. Maintenant en tant que professionnel de la musique, je ne sais pas sur quels critères les organisateurs se sont basés pour lui donner ce prix. En France par exemple, quand on te donne un prix les chiffres sont là de façon officielle qui le justifient. Moi j’ai refusé un prix, parce que j’ai estimé que je ne le méritais pas. Car il ne faut pas confondre succès commercial et notoriété.

• Avec la percée de la musique nigériane, devenue très populaire en Afrique de l’ouest, quel avenir pour le couper-décaler ?

– Le couper-décaler a toujours sa place. Mais il faudrait qu’on fasse attention ! Beaucoup d’entre nous n’ont pas encore compris qu’il faut chercher à améliorer ce qu’on fait. Quand je vois des artistes qui sont encore dans les histoires de chansons spot, j’ai mal, ils n’ont rien compris (Il monte le ton). C’est ce qui peut tuer le mouvement. Sinon, la venue de la musique nigériane ne pourra qu’apporter la concurrence. J’aime la concurrence quand elle est loyale. Mettons-nous au travail. Les chanteurs nigérians sont des bosseurs. Ils investissent dans leurs œuvres, ils font de supers clips, Ils valorisent mieux la musique africaine aujourd’hui.

• O.k., parlant de la Jet Set, où en êtes-vous aujourd’hui, on a entendu dire qu’elle n’existe plus que de nom ?

– La Jet Set n’a pas d’activité depuis quelque temps. Elle n’est pas divisée de façon officielle. Il faut avouer qu’il y a en notre sein de petits problèmes de personnes que je trouve pas nécessaire d’étaler ici.

• Chacun, apparemment, a pris ses distances ?

– Je ne peux pas tourner le dos à la Jet Set. Il y a une réalité aujourd’hui, chacun de nous a décidé de voler de ses propres ailes et faire carrière solo, voilà. Moi, je vis en France actuellement.

• Quelles sont vos relations aujourd’hui ?

– L’histoire retiendra que nous étions de fidèles compagnons par qui tout a commencé au couper-décaler. On n’a pas le droit de laisser mourir ce qui était si cher au Président Douk’Saga. Il est vrai qu’on ne se voit pas régulièrement, mais n’y a pas d’animosité entre nous. On continue de se fréquenter. On s’appelle, on se rencontre souvent en boîte. Mais beaucoup de choses ont changé.
 
 
Par Inzah D.
in Topp Visages
enzo@topvisages.net

 

Sun, 07 Jul 2013 12:55:00 +0200

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