Santé / Blanchissement de la peau : Quand la dépigmentation tue

Photo : DR
Problème esthétique et idéologique lié à la domination extérieure, la dépigmentation constitue manifestement un problème de santé publique qu’il convient de ranger parmi les pratiques à haut risque. Selon le professeur Dédy Séri de l’Université de Cocody-Abidjan, ce problème de santé publique (la dépigmentation) qui sévit depuis des décennies, a d’abord frappé les diasporas africaines avant d’atteindre l’Afrique subsaharienne. Un cas récent mais célèbre, à l’en croire, est bel et bien celui de Michael Jackson qui s’est fait sur-blanchir la peau. Plus grave, il vient d’être prouvé que 20% des consultations dermatologiques constatées à Paris, sont dues à des complications liées au blanchissement de la peau chez les immigrés d’origine africaine. Sur le continent même, le phénomène fait des ravages et aucun pays africain n’y échappe. « Au départ, cette pratique néfaste ne concernait que la gent féminine, mais aujourd’hui, elle est aussi le fait des hommes : c’est dire que tout le monde se sent mal dans sa peau noire, et se jette dans la course aux produits de dipigmentation avec ainsi des risques pour la santé par l’utilisation inconsidérée de produits éclaircissants » se désole le Pr Séry.

Nature des produits éclaircissants

Mais l’explication du Pr Dédy Séri, à ce niveau de son analyse, sera encore plus apeurant, surtout lorsqu’il parle des produits dont certaines femmes se servent dans leur quête d’une peau claire. La dépigmentation, comme il l’explique si bien, consiste à appliquer sur le corps et de façon répétée, des substances issues d’industries pharmaceutiques comportant le plus souvent des dermocorticoïdes puissants, de l’hydroquinone à concentration variable (allant de 2% à 8%). Les femmes se procurent des produits cosmétiques (laits, crèmes pommades, savons) à base d’hydroquinone qui gomment, en surface, le pigment noir. Pour obtenir dans les meilleurs délais l’effet escompté (le teint clair), les femmes mélangent les produits de base avec d’autres substances (de fortune pour la plupart) de l’eau de Javel, de la potasse, du champoing Dop, de la pâte dentifrice, du pétrole, du jus de citron, des détergents synthétiques. Puis, elles s’en badigeonnent vigoureusement la peau. Pis, révèle le Pr Dédy Séri, il y en a qui, plus pressées, écrasent des tessons de bouteille dont la ‘’poudre’’, mélangée à de l’eau de Javel, blanchit radicalement la peau, en faisant sauter l’épiderme et le derme. Des crèmes telles que Clair-Liss ; Marie-Claire, HT 25, Immédiat, Maxilight, etc. jouent éminemment ce rôle. « Ce que la plupart des femmes savent est que ces excipients sont d’une efficacité remarquable en termes de blanchissement de la peau ; mais ce qu’elles ignorent, ce sont les conséquences désastreuses sur leur santé, notamment à long terme », souligne-t-il.

Les conséquences de la dépigmentation

Les spécialistes distinguent deux groupes de conséquences : les conséquences locales, celles qui se manifestent sur la peau, et les conséquences globales, celles que le commun des mortels imagine difficilement. Concernant les conséquences locales, ce sont d’abord les brûlures de la peau, généralement responsables des grosses cicatrices sur les parties touchées. C’est le résultat d’une application massive de pommades éclaircissantes. Il y a ensuite les allergies qui se manifestent par l’apparition de boutons sur tout le corps, de noirceurs, des parties de la peau exposées au soleil. Dans bien des cas, ces allergies provoquent des pathologies nouvelles qui entrainent parfois la mort. « Or cette mort, on l’attribue généralement aux sorciers pendant que la dépigmentation, pratique esthétique d’un type nouveau, est en train de faire des ravages », regrette Dédy Séri. Quant-aux conséquences globales, ce sont les effets secondaires des cosmétiques que l’on s’applique sur la peau ou que l’on s’injecte directement dans le sang. Ces produits, selon lui, provoquent des pathologies non transmissibles et dont l’incidence va grandissant : l’hypertension artérielle, les cancers de la peau, les insuffisances rénales. A ces pathologies émergentes, s’ajoutent, aujourd’hui, le risque de mettre au monde un enfant à croissance problématique, les problèmes osseux et la cécité. « Comme on le constate, la dépigmentation, problème esthétique et idéologique lié à la domination extérieure, constitue manifestement un problème de santé publique qu’il convient de ranger parmi les pratiques à haut risque. Y faire face, c’est faire face à un double défi : d’une part, celui du complexe d’infériorité qui pousse les hommes à préférer la peau claire(…), et d’autre part, le défi des conséquences socio-sanitaires », fait savoir le Professeur Dédy Séri. Avant d’interpeller les décideurs sur les mesures appropriées (éducative, législative et économique) à prendre

Avec le partenariat de l’Intelligent d’Abidjan / par David Yala

Thu, 12 Aug 2010 02:25:00 +0200

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