La‟ désethnisation″ un combat avant-gardiste


Mon dernier mot sur le caractère pernicieux de l’usage qui est fait de la notion d’ethnie et sur mon projet de ‟désethnisation″ de nos rapports sociopolitiques ne sera certainement pas le dernier des mots que j’aurais à dire sur la question. Des lecteurs aux soucis culturels très pertinents ne partagent pas ma position qui s’inspire, en fait, de celle de Pierre Buyoya, ancien Chef d’Etat Burundais. Ils partent de l’idée que les ethnies étant productrice de culture, ne plus en parler ou s’en débarrasser comme je l’ai d’ailleurs confusément suggéré reviendrait à s’acculturer. Face à cette observation qui m’apparait par ailleurs pertinente, je me trouve dans l’obligation de clarifier ma position parce que je suis loin de penser qu’il faille faire de l’homme un maillon politique sans culture. Il est peut être vrai que cela purgerait nos conflits politiques d’un facteur aggravant en raison du caractère essentiellement cloisonnant de l’ethnie, mais même si Aristote pense que l’homme est un animal politique, il faut se rendre à l’évidence qu’il n’y a pas que la politique dans la vie de l’homme. Il importe donc à l’homme politique, en l’occurrence Pierre Buyoya, de relativiser sa position et au chroniqueur de repréciser sa pensée.
Il y a une formule de Jean J. Rousseau, au début de l’Emile qui permet de clarifier ce qui, à première vue, semble confus. Rousseau dit ceci : «On façonne les plantes par la culture et les hommes par l’éducation.» Devient-on Bété, Attié, Achan ou Gagou par l’éducation ? Cette question, sans y répondre nous dit clairement que la notion d’ethnie au sens descriptif du terme nous renvoie bien plus à notre nature initiale qu’à ce que la culture a pu faire de nous. Ensuite on voit apparemment que l’ethnie n’empêche pas la culture au sens Rousseauiste du terme et si elle la favorisait, l’ignorer ne serait pas un handicap fondamental puisque ce n’est pas la spécificité de la nature qui conditionne la culture. Dans une sorte de transposition conceptuelle, on pourrait dire en politique que la notion d’ethnie nous rappelle plus l’Etat de nature que l’Etat de droit où le citoyen doit être considéré bien plus du point de sa culture citoyenne que de sa nature ethnique. En principe, un homme politique responsable qui se dit Chef d’Etat d’un Etat moderne devrait se tenir constamment au dessus des clivages ethniques. Chaque fois qu’il y recourt, il tire la société vers le bas en rappelant à la conscience collective les affres de la jungle où les guerres opposant les ethnies ou les tribus étaient les seuls moyens de s’affirmer. Au-delà, ce chef d’Etat perpétue la tradition des impérialistes qui dans leur approche scientifique des peuples d’Afrique ont fait le choix de l’ethnologie pour répondre efficacement à leur besoin de domination…Malheureusement !



Joseph Marat

Mon, 12 Mar 2012 02:43:00 +0100

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