Palais de la Justice / Sit-in du CIPJ hier : Les journalistes bastonnés et pourchassés dans la Cathédrale St-Paul

Photo : DR
Les journalistes de Côte d’Ivoire réunis au sein du Collectif ad hoc dénommé Comité ivoirien pour la Protection des Journalistes (CIPJ) ont marché hier vendredi au Plateau pour réclamer la libération de leurs confrères emprisonnés, depuis le vendredi 16 juillet 2010, à la Maison d’arrêt et de correction (Maca). Ce sont Stéphane Guédé Bahi, Théophile Kouamouo et Saint-Claver Oula, respectivement Directeur de la Publication, Directeur des Rédactions et Rédacteur en Chef de ‘’Le nouveau Courrier’’. Une marche réprimée par la Police Nationale. Le sit-in, selon Glodé Marcelin, le porte-parole du collectif, a été motivé par le report “contre toute attente” du délibéré de l’audience du 21 juillet dernier, au Palais de justice du Plateau. ‘’Ce qui justifie notre sit-in de ce jour devant le Palais de Justice au Plateau..Nous dénonçons avec vigueur ces reports successifs qui n’ont d’autre but que de maintenir de façon abusive et prolongée nos trois confrères dans les liens de la détention’’, a-t-il déclaré. Bien avant, la mobilisation s’est faite à la Maison de la Presse au Plateau, pour organiser ladite marche. Sur les tee-shirts mis en vente au prix de 2000 Fcfa, l’on pouvait lire: Liberté fragile pour le journalisme d’investigation; Pour tous ceux qui n’abandonnent jamais! Oeuvrent pour la liberté! Créent en toute liberté d’expression. Sur des papiers au format A3 tenus par chacun, les journalistes demandent de liberer les trois journalsites incarcérés. Les caricaturistes de la presse écrite ont également marqué de leur crayon la marche sur les tee-shirts et sur des A3. De la Maison de la presse au CCIA, ceux qui n’avaient pas été au départ de la mache rejoignent leurs confrères. A quelques pas du Palais de la justice, les coups de sifflets harmonieux se font entendre par les marcheurs contre la violation de la liberté de la presse. Devant le portail du Palais, un cordon de policiers aux ordres attend. Le sit-in se fait à leur nez et au choeur de “Tchimou corrompu”, “Libérez les journalistes”. Comme si tout s’arrêtait dans le périmètre du Palais et dans le Palais, les passants, travailleurs et autres badauds observent l’ambiance rythmée de bruits de sifflets ou vuvuzelas selon des journalistes-marcheurs. Embêtés, les hommes du Commissaire Kouyaté, après des instructions reçues, demandent aux journalistes de libérer l’entrée principale du Palais et de manifester dans le jardin entre le Palais et la Cathédrale Saint-Paul. “Nous respectons la nature, nous ne pouvons pas la détuire”, a retorqué Goué Stéphane soutenu par le collectif. “Ne cédons pas à la provcation, notre adversaire n’est pas la police, mais Tchimou. Nous sommes là pour nous faire entendre et demander la libération des journalistes incarcérés”, font comprendre les interlocuteurs Goué, Coulibaly Brahima et Glodé. Après des négociations avec les policiers, les journalistes acceptent, difficilement, de reculer jusque dans le parking du Palais pour lire, après deux heures de sit-in, la déclaration du collectif. Ils se verront brutaliser dans leur intention de reculer. La situation dégénère lorsque le Commissaire Oré Brice arrive sur le lieu du sit-in. Des policiers lèvent la matraque sur des journalistes, les tabassent et confisquent des appreils photos (de Nord-Sud Quotidien et AFP) et un téléphonne portable (de Simon Konan de Le Flambeau) qui ont capté leur besogne. Non satisfaits de déloger les journalistes devant le Palais, les policiers veulent les prendre en sandwich devant la Cathétrale Saint-Paul en demandant aux vigilles de fermer les grilles. C’est la course poursuite dans la cour de la Cathédrale. Les policiers n’abdiquent pas et recommandent aux journalistes d’en sortir de la maison de Dieu. Par deux fois ils y seront pourchassés. Empêché finalement d’en sortir, le Collectif fait lecture de sa déclaration dans la cour de la Cathédrale. En sept points, Glodé Marcelin, sécretaire général adjoint du Synappci et porte-parole du collectif donne la position du Comité ad hoc du CIPJ. Vers la fin les journalistes ont regagné la Maison de la presse par la marche. Les policiers qui ont voulu les en empêcher finissent par les y escorter. Ils y attendront jusqu’à ce que prenne fin la rencontre de la Maison de la Presse où des dispositions nouvelles ont été prises. Les appareils confisqués ont pu être récuperés dans la même journée d’hier auprès des Commissaires Oré et Touré.

Koné Saydoo

Encadré (1)

Le réquisitoire des conclusions de l’enquête Café-cacao a-t-il été envoyé par mail ?
Dans son édition N° 2035 du lundi 19 juillet dernier, l’IA avait attiré l’attention du Procureur sur les agitations des pirates et des paparazzis qui sont en embuscade et qui guettent désormais tous les rapports des dossiers chauds confiés au Parquet. « De graves menaces planent sur la confidentialité du rapport de Tchimou au sujet de l’enquête dans l’affaire Tagro (…) Depuis que des informations ont été distillées sur l’audition du ministre de l’Intérieur et sur la fin de l’enquête (…), des paparazzis aux dents longues veulent rééditer l’exploit de Le Nouveau courrier, en obtenant et en publiant copie du rapport de l’enquête sur l’affaire Tagro (…). Des experts en NTIC assurent que l’ordinateur n’est pas fiable (…) Raymond Tchimou n’est donc pas à l’abri (…), tant les paparazzis de la presse ivoirienne ont décidé de lui mener la vie dure », révélait en substance Charles Kouassi dans son article. En tout état de cause, seule une enquête de la Police scientifique pourra situer les uns et les autres sur cette affaire a-t-il «vol assisté par ordinateur». Les fins limiers pourront déterminer la date à laquelle l’opération s’est déroulée : après ou avant le 24 juin 2010, le jour où le Président de la République a reçu officiellement copie du réquisitoire

Joël Touré

Encadré (2)

Le Parquet a été mis à nu
Les journalistes ivoiriens sont en prison. Cela ne doit surprendre personne, si la presse ferme désormais les yeux sur certains faits de la société. L’incarcération des trois journalistes de ”Le Nouveau Courrier” et du conseiller en communication du Procureur de la République est révélatrice d’un coup fourré diligenté contre la presse ivoirienne dans son ensemble. A l’approche de la tenue des élections l’on a bien peur qu’on fasse des journalistes des observateurs aveuglés et sourds, par des pratiques honteuses. La presse, à travers cette manœuvre de décapitation des médias, l’on veut simplement intimider. On veut réduire la presse au silence et étouffer la vérité et surtout le devoir d’informer. Ma conviction à moi est que, ”quelque chose se prépare. Et nous n’en avons pas besoin”. Il ne faut pas qu’on envoie des honnêtes citoyens à l’abattoir de façon gratuite. Ce que tous les Ivoiriens doivent savoir dans cette affaire est que les journalistes ne sont pour rien dans ce qui arrive à la Côte d’Ivoire. Ils ont un rôle d’éveil de consciences endormies. Ils n’ont certes pas la science infuse, mais ils ont toujours joué un rôle prépondérant dans la mise en œuvre du processus de démocratisation en Côte d’Ivoire. N’étant pas juge ou policier, le journaliste travaille selon un code de déontologie. Son rôle s’arrête là où commence celui du policier ou du magistrat. Nous écrivions dans ces mêmes colonnes la fois dernière que les confrères n’ont pas volé de document. Ils n’ont pas non plus inventé les faits. Ils ont fait ce qu’ils avaient à faire. C’est-à-dire informer. Ailleurs, on les féliciterait pour leur exploit. Celui d’avoir mis à nu les tares de notre administration. Elle est gérée comme un patrimoine familial. Et le procureur devra s’en prendre à lui-même. Ce qui est arrivé est un dysfonctionnement criard de son service. Il doit l’assumer. Les journalistes incarcérés ne doivent pas servir de bouclier pour sauver sa tête. Il faut qu’il les libère. Ils ne doivent pas être privés de liberté, en vertu du droit constitutionnel qu’a le citoyen d’être informé. C’est pourquoi, nous disons merci, à tous ceux qui ont accepté de descendre le vendredi 23 juillet 2010, dans les rues d’Abidjan, pour réclamer la mise en liberté des journalistes emprisonnés. Ils n’ont tué personne. Ils n’ont fait que sauver la nation par le biais de leur plume, en attirant l’attention de tous, principalement le chef de l’Etat sur les dysfonctionnements dont souffrent les administrations ivoiriennes. Libérez donc les journalistes emprisonnés pour que vive la liberté de la presse pour une démocratie constructive

Honoré Kouassi

Encadré (4)

Pourquoi Gbagbo doit mettre le holà
Ce qui est donné de voir depuis le 13 juillet 2010, date de l’arrestation des trois journalistes de Le Nouveau Courrier, démontre qu’il reste encore beaucoup d’efforts à faire pour construire un Etat véritablement démocratique. Théophile Kouamouo, Saint-Claver Oula et Stéphane Bailly, trois journalistes de la direction du quotidien « Le Nouveau Courrier » et Patrice Pohé, président de la CNDPCI, sont détenus par la Justice ivoirienne, sur instruction et par la seule volonté du procureur de la République, Tchimou Raymond Féhou. Le procureur de la République qui accuse les journalistes de « Le Nouveau Courrier » de « vol de documents administratifs », les a écroués à la Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (MACA), au motif qu’ils refusent de dévoiler leurs sources. L’image de journalistes menottés en Côte d’Ivoire comme de vulgaires hors-la-loi, a parcouru le monde entier, mettant ainsi Laurent Gbagbo au banc des accusés. Tout le monde est d’accord pour dire que l’indépendance de la Justice doit être une réalité en Côte d’Ivoire, mais il n’en demeure pas moins que les journalistes méritent respect et considération de la part des acteurs de cette Justice. Tchimou Raymond qui croit servir le Président de la République, livre plutôt la Côte d’Ivoire et Laurent Gbagbo à la vindicte internationale, en présentant une mauvaise image à l’extérieur. Le chef de l’Etat qui n’est pas ménagé dans la presse ivoirienne, a pourtant signé le décret de dépénalisation des délits de presse. Aucun journaliste n’a été emprisonné pour avoir critiqué, d’une manière ou d’une autre, le régime en place. D’où vient-il alors que le procureur Tchimou Raymond, qui se veut plus royaliste que le roi, prend sur lui de maintenir des journalistes en détention, au simple motif qu’ils refusent de dévoiler leurs sources ? Nous disons non à cette forme d’indépendance de la Justice. C’en est assez et Laurent Gbagbo doit y mettre un holà. Il ne s’agit pas pour lui d’interférer dans le pouvoir judiciaire, loin s’en faut. Mais, il est plus que jamais temps, qu’il mette des garde-fous en tant que Magistrat suprême, pour que le procureur de la République connaisse ses limites

Olivier Dion

Encadré (5)

Presse / Affaire « Le Nouveau Courrier »
Au nom du Gouvernement américain, l’ambassade des USA à Abidjan appelle à la libération des journalistes
Les Etats-Unis sont troublés par l’arrestation et de la détention continue par le Gouvernement de Côte d’Ivoire de trois journalistes : Saint-Claver Oula, Stéphane Guédé et Théophile Kouamouo, respectivement rédacteur en chef, directeur de publication et directeur des rédactions du quotidien Le Nouveau Courrier. Le Gouvernement des Etats-Unis réitère son soutien à la liberté de la presse et demande au Gouvernement de la Côte d’Ivoire de respecter les engagements qu’il a pris concernant le traitement équitable des journalistes. Les trois journalistes ont été arrêtés le 13 juillet dernier pour avoir refusé de dévoiler leurs sources d’information suite à la publication d’un article sur les résultats d’une enquête sur des faits de corruption dans le secteur du café et du cacao, et sont accusés de «vol de documents administratifs». Reconnaissant le rôle primordial d’une presse libre dans une société démocratique, les Etats-Unis suivent avec attention le dénouement de ce jugement. Nous sommes particulièrement préoccupés des effets que l’emprisonnement de journalistes peut avoir sur le fonctionnement d’une presse libre, surtout quand ces journalistes n’ont pas encore été reconnus coupables d’un crime. Les Etats-Unis invitent le Gouvernement de Côte d’Ivoire à faire preuve d’équilibre entre la quête de l’Etat à protéger sa vie privée et les intérêts du peuple de Côte d’Ivoire à avoir une presse libre et dynamique devant aider à sauvegarder ses institutions démocratiques

Ambassade des Etats-Unis en Côte d’Ivoire

Avec la collaboration de l’Intelligent d’Abidjan

Sat, 24 Jul 2010 08:52:00 +0200

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