Côte d’Ivoire – Laurent Gbagbo :  « Ce qu’on peut me reprocher, c’est d’avoir nationalisé deux banques françaises »

Lors de la deuxième édition de la Fête de la Renaissance du PPACI, le parti qu’il a fondé après son acquittement par la CPI, à Agboville, au nord d’Abidjan, dimanche 6 avril 2024, Laurent Gbagbo, l’ancien président ivoirien, s’est prononcé sur des sujets brûlants, dont le franc CFA, qu’il estime ne pas être une bonne monnaie. Nous vous proposons un extrait de sa déclaration.

« On m’a arrêté. Une fois arrivé à la CPI, eh bien, on a dit que j’avais tué des gens. Avant de passer devant le tribunal, j’avais quelques craintes. Je me disais que, en tant que chef de l’État, n’étant pas souvent dans la rue, peut-être que les forces de l’ordre ont commis des actes en mon nom sans que j’en sois informé. Donc, nous allons voir ce qui en est.

Lorsque Fatou Bensouda est venue et a exposé… En écoutant cela, j’ai contacté mes avocats et je leur ai dit : « Il n’y a rien au pays. Ne vous inquiétez pas, venez me trouver en prison, nous discuterons, je vous donnerai les faits. »  Ils sont venus me voir, je leur ai exposé les faits, et ils ont conclu : « Nous allons gagner ce procès.» Parce qu’elle raconte des histoires ! Elle avance des affirmations sans fondements. Alors, la seule chose qu’ils pouvaient faire, c’est me garder en détention pour que, ici en Côte d’Ivoire, ils puissent terminer deux mandats… On m’a arrêté en 2011. Le procès a commencé en 2016. J’étais là-bas, et il fallait que le temps passe, il fallait me maintenir en détention. J’ai pensé : « Ce n’est pas grave. Nous allons mener le procès à son terme, on va aller jusqu’au bout. Chacun pourra expliquer ce qui a été fait. »

Nous avons poursuivi jusqu’au bout. Mais avant même d’arriver à la fin, les juges ont déclaré : « Ils ont présenté 82 témoins, c’est suffisant.»  Sam l’Africain a été le premier témoin à comparaître. Les juges ont estimé  inutile que mes témoins se présentent, car ceux qui devaient m’accuser, par leurs témoignages, m’ont en réalité disculpé. Il n’y a aucune preuve dans leurs déclarations pour me condamner. Ils m’ont donc libéré. Je n’ai pas eu besoin de présenter de témoins.

J’ai demandé à mes camarades de présenter tous les détails de l’action économique et bancaire. D’ici mardi, nous allons publier cela dans les journaux en Côte d’Ivoire, afin que chacun puisse le lire, car je dis la vérité. Que ceux qui prétendent dire la vérité également se manifestent.

Ce qu’on peut me reprocher, c’est d’avoir nationalisé deux banques françaises. Oui, je l’ai fait, et alors ? En tant que président de mon pays, lorsque des banques françaises refusent de payer les salaires des fonctionnaires, je prends la décision qui s’impose. Je ne peux pas être chef d’État et laisser les choses ainsi. Non… Regardez l’Afrique de l’Ouest. Peu à peu, les pays s’éloignent de Dakar ! Ce n’est pas une bonne chose ! Tous les pays de la zone franc vont abandonner le franc CFA. Avant, on avait peur, donc on ne le disait pas. Le premier texte que j’ai fait publier contre le franc CFA remonte à 1984. Certains n’étaient même pas encore nés. J’étais en exil en France, j’ai demandé à un étudiant en économie de rédiger un petit texte pour la revue « Peuple Noir, Peuple Africain » de l’écrivain camerounais Mongo Beti. Ce numéro était spécifique à la Côte d’Ivoire, et j’y ai fait publier un article sur le franc CFA. L’article était signé par cet étudiant, sous le pseudonyme de Lucien Kouamé.

Regardez dans 10 ans, vous verrez qui sera encore à Dakar, qui sera encore à la BCEAO. Les pays vont se retirer un par un. Le Burkina Faso, le Mali et le Niger ont déjà commencé. La monnaie est déjà prête. Dans quelques mois, nous verrons.

Chers amis, ceux qui affirment que Gbagbo a braqué une banque se trompent. Non seulement c’est faux, mais c’est mensonger. S’ils veulent m’accuser, qu’ils m’accusent d’avoir nationalisé deux banques françaises. Mais ils savent que les Ivoiriens m’applaudiront. S’ils veulent m’accuser, qu’ils m’accusent d’avoir quitté la BCEAO à Dakar… Je n’ai pas braqué de banque. Sinon, on sait qui a braqué les agences de la BCEAO.

La BCEAO de Man a été braquée pendant que nous étions en guerre contre la rébellion. Celle de Bouaké a été braquée. Celle de Khorogo a été braquée. Voilà les trois succursales de la BCEAO qui ont été braquées. Où est passé l’argent ? Aujourd’hui, ce n’est pas le sujet, mais s’ils veulent qu’un jour nous en discutions, nous en discuterons. Je ne suis pas coupable de braquage de banque.

On parle de vouloir me juger, mais on ne me convoque même pas, moi l’accusé, alors que tout le monde sait que je suis à la CPI, où ils m’ont emmené en Grumman.

Je suis acquitté par la CPI, je rentre en Côte d’Ivoire, et on m’annonce qu’il y a eu un jugement en 2018 et que j’ai été condamné… Il y a des moments où il faut cesser de s’amuser pour être sérieux. Je n’ai jamais joué à ce genre de jeu. Je n’ai jamais emprisonné quelqu’un, en tant que président, pour délit d’opinion. »

K.G.I.

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