Côte d’Ivoire. Vers le retrait de la Licorne?

Normal? Sain? Salutaire? Un an plus tard, les ivoiriens, les peuples africains et français sont à même de juger de la véracité et de la nocivité de cette déclaration. Le recul aidant, il apparait que la France n’a pas délaissé son tropisme gaullien vis-à-vis de ses ex-colonies, la guerre coloniale menée par Sarkozy-Lyautey en terre ivoirienne en est l’exemple criant.

Une politique arrogante, mortifère et inefficace…

Cela étant, les temps ont changé. Le retour à une diplomatie coloniale a boosté les affaires des entreprises de pompes funèbres ivoiriennes et fait grincer des dents en France et sur le continent africain. Et pour quels résultats ?

Une démocratie bancale où l’emprisonnement d’opposants est une banalité, où les exécutions politiques et extra-judiciaires sont monnaie courante, où les premières décisions économiques sont prises à l’avantage non pas des autochtones mais à celui du capitalisme financier mondialisé et des amis de l’ami Nicolas.

Sur le plan international, la France est pointée du doigt et conspuée pour sa politique sur l’ensemble du continent.
Le roi Midas-Sarkozy, bien décidé à transformer tout ce qu’il entreprend en échec cuisant, a atteint son but au-delà de toute attente. Voulant transformer son poulain Alassane Ouattara en président, il n’a réussi qu’à le vêtir des oripeaux du roi nègre, despote non-éclairé, passible de la CPI.

Un préfet-sident, reconnu par la communauté internationale, démocratico-incompatible du fait de ses liaisons plus que dangereuses avec les "comzones" ou autres brigands de grands chemins, démocrates à temps partiel, assassins à temps plein, sillonnant le nord de la Cote d’Ivoire depuis la partition de 2002.

Des responsabilités à établir…

Mais le serviteur empressé des intérêts de la finance mondialisée mérite-t-il seul l’opprobre ? Au regard de ses soutiens extérieurs, cette marionnette dénuée de charisme et d’épaisseur politique n’est pas seul responsable, le chef des «frères cissé», n’est qu’un pantin pathétique.
L’exécutif français, ayant décidé et mis en œuvre l’intervention de la Force Licorne, est également comptable de la situation qui prévaut en Côte d’Ivoire.

Si les citoyens ivoiriens, victimes de la soif inextinguible de pouvoir d’Alassane Ouattara, réclament justice, les citoyens français, abusés et intoxiqués par leur gouvernement et leurs médias caniches, méritent la vérité.
L’initiative, demandant la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire sur l’intervention de la force Licorne, va dans ce sens: informer nos concitoyens français, endormis par la propagande étatique et médiatique et assurer le peuple ivoirien de notre soutien indéfectible.

Cette action est apparue comme un vœu pieux pour certains, car formulée au milieu d’un océan de louanges célébrant le retour d’une Plus Grande France, garante de l’émancipation des peuples africains, pour d’autres, un coup d’épée dans l’eau, destiné à se retrouver dans les poubelles de la contestation inaudible.

Un appel entendu…

Le mardi 12 juillet 2011 sera un point de repère symbolique. Quelques députés (Mme Marie-Hélène Amiable, M. François Asensi, M. Alain Bocquet, M. Jean-Pierre Brard, solidaires de la résolution de M. Braouzec), bravant le consensus colonial ont décidé, accédant à notre requête, de déposer un projet de résolution visant à la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire portant sur les agissements de la force Licorne (Voir ici http://www.assemblee-nationale.fr/13/dossiers/role_force_licorne_cote_ivoire.asp)*.

Le texte, reprenant certains passages du courrier adressé à Nicolas Sarkozy (http://alternativesetcoherence.blogspot.com/2011/05/pour-une-commission-denquete.html ), marque une prise en compte et la reconnaissance des sentiments de révolte et de colère qui habitent ceux qui ont soutenu la démarche en signant la pétition.
Il est à noter que MM. Jean-Paul Lecoq et Jean-Jacques Candellier, sont les seuls députés ayant répondu personnellement aux doléances formulées dans les courriers adressés aux parlementaires, qu’ils en soient tous deux remerciés.

Un long chemin à parcourir…

Pour autant, devons-nous crier victoire ?
Evidemment non, l’effort de mobilisation nécessite d’être poursuivi et amplifié. La résolution doit être soutenue par tous ceux qui aspirent à la fin de la Françafrique et espèrent voir exposées sur la place publique, les véritables motivations et actions du gouvernement français et de l’hôte de l’Elysée.

Un soutien massif et populaire peut contraindre l’Etat français à dévoiler les ressorts inavouables de sa politique africaine, et le cas échéant à engager des poursuites.

Le débat public doit avoir lieu, afin de rendre accessible à nos concitoyens les véritables tenants et aboutissant de cette résurgence de l’interventionnisme colonial français.

Ne nous voilons pas la face, la route est encore longue et les obstacles nombreux avant que ne siège cette nécessaire commission, la quasi-totalité de la Représentation Nationale se reconnaissant dans la politique belliciste de Sarkozy-Lyautey.

Il suffit pour cela d’analyser la répartition du vote parlementaire portant sur la poursuite des opérations militaires en Libye (en date du Mardi 12 juillet).

Les humanistes et internationalistes du Parti Socialiste ont voté, main dans la main avec la représentation UMP, la poursuite de la guerre menée à grands frais pour le compte d’Exxon, BP et Total.
La démocratie, selon toute vraisemblance, s’impose à coup de missiles ou de bombes rasant pâtés de maisons, tuant hommes, femmes et enfants, chirurgicalement, cela s’entend.

Les ivoiriens, élèves récalcitrants, récitant à présent, à leur corps défendant, la sanglante leçon apprise de la Force Licorne sont bien placés pour le savoir…

Responsabilité et lucidité…

Il n’est pas question d’angélisme ou d’idéalisme, seul le principe de réalité doit primer.
La commission n’étant qu’au stade embryonnaire, il est impératif de signer et faire signer la pétition. La vigilance est de mise, car la récupération politicienne est une hypothèse à ne pas occulter. Le débat à venir, ne doit pas être également un moyen d’absoudre le gouvernement français de ses fautes, ni un moyen détourné de lui accorder une légitimité post-intervention.

Nous tenons à remercier les membres d’attac qui ont relayé la pétition et les différents courriers envoyés aux responsables politiques. Leur action a été déterminante quant au franchissement de ce premier col.
Pour finir, nous tenons à préciser aux militants de Survie qui, trouvant la pétition pro-Gbagbo, soumettaient leur éventuel soutien à sa modification que nos convictions en la matière ne sont pas négociables. Le soutien assumé du Président Sarkozy à Alassane Ouattara n’est plus à démontrer ou établir.

Partant, le mentionner n’est aucunement la manifestation d’un soutien partisan, mais simplement la transcription d’une évidence. Il n’appartient pas aux citoyens français de prendre position ou de soutenir qui que ce soit.
Pour autant, les vérités ne doivent pas être niées, et ne le seront jamais de notre chef.

Une nouvelle fois…

Par conséquent, et conformément à notre première interpellation, nous demandons toujours, et plus que jamais, la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire portant sur les conditions de l’intervention de la Force Licorne.

Nous appelons au soutien de la résolution déposée par M. Braouzec, par la signature de la pétition qui en est à l’origine. Nous restons vigilants et convaincus de la justesse de nos positions et engagement.
Nous ne dévierons pas de notre orbite…

Ahouansou Séyivé in cameroonvoice.com

Fac-similé de la résolution n° 3647 qui nous a été communiqué mercredi 13 Juillet.

PROPOSITION DE RESOLUTION Visant à créer une commission d’enquête sur le rôle de la Force Licorne en Côte d’ivoire

EXPOSE DES MOTIFS
Les récents évènements survenus en Côte d’Ivoire et l’implication des forces armées françaises dans une guerre civile témoignent que le gouvernement a, de par son action, plus favorisée que tempérée alors qu’auraient dû être défendues d’une part, la neutralité quant aux enjeux internes ivoiriens et d’autre part, les valeurs intemporelles et universelles qui sont les fondements de l’État français. En effet, il était impératif que la souveraineté du peuple ivoirien soit respectée, car au regard du droit international et particulièrement de l’article 2§4 de la Charte des nations unies, il n’est pas acceptable qu’une puissance étrangère s’immisce dans le déroulement des affaires internes d’un pays quel qu’il soit. Dès lors, le rôle joué par la présence militaire de la France en terre ivoirienne, compte tenu de l’histoire coloniale qui lie la France à la Côte d’Ivoire, ne peut qu’être considéré comme ambigu et problématique.

Seul le respect des principes et des valeurs portés par le droit international auraient dû prévaloir, pourtant la France, mandatée par l’ONU pour protéger les populations civiles, s’est possiblement rendue coupable de complicité de meurtres de masse, voire d’épuration ethnique à Blolequin ou à Duékoué en étant l’allié objectif et parfois agissant, des forces présentées aujourd’hui comme républicaines.

À l’automne 2002, Le gouvernement français a refusé l’application des accords de défense à une Côte d’Ivoire en proie à une rébellion armée approvisionnée par un pays voisin. Un cessez-le-feu a été imposé. Il entérinait la partition du pays.

A cette même époque, dans le cadre des accords de défense – signés le 24 août 1961 – entre la France et la Côte d’Ivoire, la France a envoyé en Côte d’ivoire la « Force Licorne » qui dès le départ a mené une opération militaire, indépendamment de l’opération de l’ONUCI.

Cette Force fut longtemps composée de groupements tactiques interarmés, répartis sur l’ensemble du territoire du pays, comprenant des unités de différentes armes ou services (infanterie, cavalerie, train, service de santé, actions civilo-militaires, etc.), d’un bataillon de l’aviation légère, d’un bataillon logistique (BATLOG), d’escadrons de gendarmerie mobile, d’unités prévôtales et d’un groupement de transport opérationnel (GTO) de l’armée de l’air.

En janvier 2003, lors des accords de Marcoussis, la diplomatie française impose la mise en place d’un gouvernement de réconciliation nationale intégrant des représentants de la rébellion et la mise en œuvre d’un programme abordant les principaux sujets de fond à l’origine de la crise ivoirienne (nationalité, propriété foncière rurale, éligibilité, restructuration de l’armée, désarmement de la rébellion). À Abidjan, des manifestants refusent que les portefeuilles de la Défense et de l’Intérieur soient confiés aux rebelles, comme le prévoyait l’exécutif français. L’objectif était la tenue d’élections démocratiques à la fin de l’année 2005, mais elles ont été repoussées parce que les conditions organisationnelles pour des élections transparentes –notamment le désarmement- n’étaient pas réunies.

Le 4 avril 2004, l’opération des Nations Unies en Côte d’ivoire, ONUCI, 6 240 hommes, – résolution 1572 – prend le relais des contingents de la CEDEAO, aux côtés de la force Licorne.
A partir de cette date, la principale mission de la force Licorne est de soutenir l’ONUCI; elle constitue une force de réaction rapide de troisième rang susceptible d’agir au profit de la force onusienne, celle-ci intervenant en soutien à l’action des forces armées ivoiriennes. Par ailleurs, la force Licorne peut, si besoin est, assurer la sécurité des ressortissants français et étrangers.

Le 6 novembre 2004, l’aviation gouvernementale ivoirienne effectue un raid aérien sur la position française de Bouaké. 9 morts et 37 blessés parmi les soldats français (2e régiment d’infanterie de marine, régiment d’infanterie-chars de marine, 515e régiment du train) sont à déplorer. Les forces françaises ripostent, quinze minutes après l’attaque, en neutralisant, sans les détruire, l’ensemble des forces aériennes ivoiriennes présentes sur la base de Yamoussoukro.

Selon les autorités françaises, soutenues par une résolution des Nations Unies, cette interposition aurait permis d’éviter une guerre civile et de nombreux massacres.
Depuis mars 2008, les structures ont changé, le bataillon logistique et le GTIA43 ont été dissous et l’ensemble des fonctions logistiques et du soutien sont assurés par la base de soutien à vocation interarmées stationnée à Port-Bouët.
L’opération Licorne a impliqué plus de 5 000 hommes et femmes au plus fort de la crise en novembre 2004. Les troupes françaises ont été ramenées à 2 400 militaires depuis août 2007, puis à 1 800 hommes à partir de mars 2008.
Le 31 juillet 2008, le Conseil de sécurité de l’ONU a prolongé de six mois, les mandats de l’ONUCI et de l’opération Licorne dont le nombre de militaires a été ramené à 900. Prolongés jusqu’au 31 janvier 2009, ils devaient sécuriser l’élection présidentielle qui devait alors se tenir le 30 novembre 2008.
Au mois de février 2011, la Force Licorne, renforcée, passe à 1 100 hommes et est redéployée dans le but de protéger les ressortissants français, d’apporter un soutien à l’ONUCI et de détruire les armes lourdes des forces pro-Gbagbo utilisées contre des civils. Depuis le 2 avril, des éléments de commandement et trois compagnies, – 2e REP, RMT et 3e RPIMa – ont été projetées afin de renforcer les effectifs de la Force Licorne. Il y a désormais 1 650 militaires français à Abidjan.

En avril 2011, suite à la résolution 1975, le Conseil de sécurité de l’ONU réaffirme son ferme attachement au respect de la souveraineté, de l’indépendance, de l’intégrité territoriale et de l’unité de la Côte d’Ivoire, et rappelle l’importance des principes de bon voisinage, de non-ingérence et de coopération régionale et accueille avec satisfaction la résolution A/HRC/16/25, adoptée par le Conseil des droits de l’homme le 25 mars 2011, notamment la décision de dépêcher une commission d’enquête internationale indépendante chargée d’enquêter sur les faits et circonstances entourant les allégations de graves violations des droits de l’homme perpétrées en Côte d’Ivoire à la suite de l’élection présidentielle du 28 novembre 2010,

Le 4 avril 2011, les soldats de l’ONUCI et les militaires français de la Force Licorne ont commencé à bombarder les pièces d’artillerie des troupes loyales à Laurent Gbagbo ainsi que certains lieux tels que la RTI. L’ONUCI et la France ont justifié leur intervention en s’appuyant sur la résolution 1975, adoptée par le Conseil de sécurité des Nations unies le 30 mars 2011, qui donnait mandat à l’ONUCI d’utiliser « tous les moyens nécessaires pour s’acquitter de la tâche qui lui incombe de protéger les civils (…) y compris pour empêcher l’utilisation d’armes lourdes contre la population civile5 ».

Le 11 avril 2011, les FRCI avec l’appui de l’ONUCI et de la Force Licorne ont arrêté Laurent Gbagbo.
Amnesty International, dans son rapport -AFR 31/002/2011, Amnesty International, mai 2011- signale que «les forces internationales (à la fois les soldats français de la Force Licorne et les forces de maintien de la paix de l’ONUCI) ont joué un rôle clé en Côte d’Ivoire depuis leur intervention dans cette crise.» Ajoutant que «la légitimité de la présence de ces forces de maintien de la paix a été remise en cause (…) en novembre 2004 et en janvier 2006» et que par ailleurs ces «forces internationales ont fait usage de la force létale en novembre 2004 et en janvier 2006.»

De nombreuses zones d’ombre entourent cette intervention en Côte d’Ivoire.
Il est important de savoir pourquoi et comment la force Licorne est intervenue, son rôle dans l’avancée des "forces républicaines" vers Abidjan et pourquoi elle n’a pas protégé les populations civiles dans le nord de la Côte Ivoire et si des éléments des troupes françaises étaient à proximité de Duékoué.

Par ailleurs, il est impératif de connaître le nombre de victimes imputables aux troupes françaises lors des bombardements visant à protéger les civils ivoiriens.

Mais il est aussi important d’avoir une information sur le rôle des forces françaises dans la capture de M. Gbagbo et de son épouse et où étaient ces troupes lors des exactions commises par les forces républicaines à Abidjan après la capture de M. Gbagbo.

Cette commission d’enquête doit étudier toutes les informations disponibles afin de déterminer les éventuelles responsabilités respectives de l’armée française et de l’ONUCI

Il est aujourd’hui plus que nécessaire qu’il soit mis fin à l’opération Licorne au profit d’un renforcement de l’ONUCI, pour la réconciliation des Ivoiriens et non pour assurer la victoire d’un camp sur l’autre, ce qui serait lourd de menaces pour l’avenir de la Côte d’Ivoire. Si des initiatives d’apaisement doivent être privilégiées, elles ne peuvent se faire que dans le respect de la lutte contre l’impunité qui seule permettrait à la Côte d’Ivoire de ne pas plonger dans la violence et du droit international -qui précise que les personnes commettant certaines violations graves du droit international relatif aux droits humains peuvent être tenues pénalement responsables- et du droit international humanitaire -a Côte d’Ivoire est partie aux quatre Conventions de Genève de 1949 et à leurs deux Protocoles additionnels de 1977. Beaucoup de règles spécifiques figurant dans ces traités sont contraignantes pour toutes les parties à un conflit, y compris les groupes armés. Les violations de nombre de ces règles peuvent constituer des crimes de guerre. L’une des règles fondamentales du droit international humanitaire est que les parties à un conflit «doivent en tout temps faire la distinction entre civils et combattants », et en particulier que « les attaques ne peuvent être dirigées que contre des combattants» et « ne doivent pas être dirigées contre des civils».

Tel est le sens de la proposition de résolution visant à créer une commission d’enquête sur le rôle de la Force Licorne en Côte d’ivoire que nous vous proposons d’adopter.

Sun, 17 Jul 2011 07:40:00 +0200

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