Mel Eg Théodore, président de l’Udcy : «Je ne vais pas renier Gbagbo»

Notre Voie : Vous sortez d’un congrès qui vous a confié un autre mandat de 5 ans. Que peut-on retenir de l’état de votre parti ?

Mel Eg Théodore : Nous saisissons l’occasion que vous m’offrez pour remercier l’équipe de Notre Voie qui a couvert notre événement. L’Udcy se porte bien. Notre parti a subi beaucoup de dégâts au plan moral et au plan matériel. Mais, nous avons apprécié qu’au moment où nous ne nous attendions pas à une grande participation des militants de l’intérieur, nous avons observé que plus de 500 délégations sont arrivées au congrès. Ce qui traduit la vitalité de notre parti.

N.V. : L’Udcy s’est doté d’une commission chargée de la réconciliation. Quelle est votre recette pour parvenir à la réconciliation nationale?
M.E.T. : Le Congrès a effectivement pris une résolution instituant une commission citoyenne pour la réconciliation. De même le congrès a approuvé le pacte fraternel que nous avons proposé pour parvenir à la réconciliation des Ivoiriens. Le parti a demandé à la commission citoyenne de réconciliation de suivre et de défendre ce pacte fraternel.

N.V : L’Udcy a participé aux dernières législatives, vous êtes rentré d’exil et votre parti était au dialogue républicain initié par le gouvernement à Grand-Bassam. Qu’avez-vous obtenu concrètement après tous ces gestes ?

M.E.T. : Nous ne nous attendions pas à obtenir quelque chose de particulier. Vous savez que Grand-Bassam a été une réunion de prise de contact et de présentation des griefs des uns et des autres. Donc nous avons fait le tour de toutes ces questions. Je dirais que si nous sommes allés à Grand- Bassam, c’est parce qu’un certain nombre de choses que nous avions demandés avaient connu un début de commencement. Notamment la libération d’un certain nombre de personnes qui étaient en détention préventive. Evidemment, il y a eu des couacs et les positions se sont raidies à nouveau. C’était du gagnant-gagnant, parce que nous avons fait un premier pas, un second et il y avait une volonté. C’était un début, c’était un bon début.

N.V. : Où en êtes-vous avec ce dialogue républicain depuis l’étape de Grand-Bassam ?

M.E.T.: Nous avons souhaité que ce cadre permanent puisse suivre les questions que nous avons évoquées. Mais pendant que nous sommes en train de réclamer que le gouvernement reprenne le dialogue, nous sommes heureux de voir que nous sommes convoqués le 25octobre prochain. Nous verrons s’il y a de bonnes nouvelles qui vont être annoncées. Peut-être, ce sera la reprise des discussions sur des points précis.

N.V. : Pendant que vous êtes dans cette dynamique, le secrétaire général du Fpi Laurent Akoun et l’ex-ministre Alphonse Douati sont emprisonnés. Qu’en pensez-vous ?

M.E.T. : Nous déplorons tous cette situation. Mais, il faut pouvoir le dire à la bonne oreille. C’est pour cela que nous proposons ce pacte fraternel. J’invite donc les camarades du Fpi à ce dialogue. Que cette volonté soit clairement affichée. Depuis la table-ronde de Linas-Marcoussis, nous avons une position de principe et une position de compromis. Il faut aller à la table de négociation pour faire valoir ses positions. Faire avancer la position de compromis si la position de principe n’est pas acceptée. On peut toujours sauver quelque chose.

N.V. : Pour vous, il faut une démarche vers la paix. Mais le pouvoir estime que les poursuites judiciaires doivent aussi se faire. Pensez-vous qu’on peut avoir la réconciliation pendant qu’on emprisonne ?

M.E.T. : Nous attendons des actes d’apaisement de la part du gouvernement. Le gouvernement joue sa partition de gouvernement. Nous attendons que les procureurs jouent leur partition et les juges auront à trancher et à dire la vérité. Ce que nous avons souhaité et que nous soutenons dans le pacte fraternel, c’est que le président de la République qui en a la possibilité, puisse demander une accélération de l’ensemble de ces procès pour être sur la table du juge. Vous savez qu’il y a des gens qui ont été arrêtés mais qui n’ont pas commis de délits particuliers. Mais le procureur poursuit en avançant l’argument de la paix sociale et de trouble à l’ordre public. Il est obligé de poursuivre. Mais le juge apprécie et est censé juger en liberté de conscience. A mon sens, la situation de nos frères et sœurs qui se trouvent dans les liens de la captivité mérite d’être examinée avec beaucoup de sérénité. Donc il faut explorer toutes les voies de recours qui nous sont offertes.

N.V. : Lors de son Congrès, l’Udcy a réaffirmé son appartenance à la Ligue des mouvements pour le progrès (Lmp). Pourquoi cette entité à l’intérieur du Cnrd ?

M.E.T. : Nous avons mis en place une plate-forme pour débattre des questions politiques à notre niveau. Cela ne veut pas dire que nous n’allons pas assister aux réunions du Cnrd. Il n’y a pas de contradiction. Nous avons notre chapeau commun mais les axes d’approche politique étant différents, nous avons mis en place notre plate-forme. Nous sommes des petits partis donc le besoin d’unité est beaucoup plus important que le Fpi qui est un grand parti.

N.V. : Etes-vous encore en contact avec le Fpi qui était votre allié avant la dernière présidentielle ?

M.E.T. : Bien sûr, nous sommes en contact. Nous avons récemment eu une réunion avec le Fpi au siège provisoire de ce parti. Et c’est Appiah Kabran qui a conduit la délégation de la Lmp. La réunion a duré plus de 3h. Nous avons harmonisé et coordonné nos points de vue. Nous sommes en contact avec le Fpi et je souhaite que cela demeure.

N.V. : Dans l’esprit de certains Ivoiriens, la Lmp a été créée pour faire le jeu du pouvoir en isolant le Fpi. Que répondez-vous ?

M.E.T. : Le temps nous donne raison car nous continuons d’entretenir des relations avec le Fpi. Ceux qui ont pensé que c’est pour faire le jeu du pouvoir et isoler le Fpi ne font que construire dans leur propre esprit.

N.V. : Est-ce que Mel Théodore et ses camarades de la Lmp acceptent qu’on les appelle encore des partis pro-Gbagbo ?

M.E.T. : Ce n’est pas une histoire d’accepter. C’est ce que nous avons vécu et c’est ce que nous sommes. Personne n’a renié Laurent Gbagbo. J’ai toujours dit que ce n’est pas un crime de soutenir quelqu’un. Maintenant que Gbagbo se trouve dans une situation quelque peu difficile, c’est normal que ses partisans ressentent cette difficulté. Que les uns et les autres sachent que c’est la loyauté qui fait qu’un homme est un homme. Si vous virevoltez comme il y en a beaucoup dans ce pays, ça veut dire que vous n’avez pas de conviction. Moi, je suis un pro-Gbagbo parce que je suis un ami de Laurent Gbagbo. Je ne vais pas le renier pour dire que je ne le connais pas. Ce n’est pas mon état d’esprit. En revanche, il faut que cela soit clair. Même si nous sommes des pro-Gbagbo, nous sommes dans une situation dans laquelle nous sommes obligés de trouver une porte de sortie. Si nous sommes enfermés dans un labyrinthe et quelqu’un nous ouvre la porte, je ne refuserai pas d’en sortir.

Interview réalisée par Benjamin Koré in NOTRE VOIE

Mon, 22 Oct 2012 21:28:00 +0200

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